Désencombrement de la voie publique, lutte contre la spéculation foncière et fast-track de la mise en œuvre des politiques publiques constituent-ils un choix pertinent avec la suppression du poste de Premier ministre dans la phase 2 du PSE ?
Désencombrement de la voie publique,
OPINION – Après son érection en capitale, Dakar représente de plus en plus le pôle d’attraction de notre économie nationale avec une forte concentration de l’administration et des investissements notamment dans les secteurs secondaires et tertiaires. Sa position stratégique et nodale, la clémence de son climat entre autres font d’elle un territoire de choix pour les Sénégalais en particulier et les Africains en général.
Mais au rythme de son expansion, cette belle ville, qui fait partie des premières de l’Afrique à être planifiée par Pinet Laprade dans les années 1800, se dégrade de jour en jour pour des raisons diverses.
Tantôt c’est l’administration qui laisse faire avec une absence de politique alternative à l’attraction à la vie urbaine, tantôt c’est notre comportement vis-à-vis de l’espace public qui pose problème.
Aujourd’hui, le vrai débat se pose quand le Président lui-même à l’occasion de sa prestation de serment les énumère parmi les défis majeurs de son second mandat. Son discours nous excite et nous pousse à reprendre notre plume pour encourager et donner notre point de vue sur les points essentiels sur lesquels il devrait agir vite et bien afin de relever ces grands défis. Mais faudrait-il aussi mettre le doigt là où nos inquiétudes résident pour être juste.
L’attractivité de Dakar se justifie d’autant plus qu’il est devenu un capital pour les Sénégalais et les étrangers malgré son étroitesse. C’est aussi la centralité de Dakar qui encourage la consommation et ouvre toutes les portes à toute sorte de commerces ou d’activités similaires.
Des marchands ambulants aux charretiers, des conducteurs de «pousse-pousse» aux clandos nous assistons tous les jours à des pratiques illégales qu’on donne du temps à s’étendre et à se légaliser dans notre imaginaire. Or, ce temps donné finira un jour par nous coûter directement ou indirectement des préjudices incalculés.
L’impôt à recouvrer dans cette économie informelle, les accidents provoqués par l’occupation anarchique de la voie publique et même des espaces privés, la pollution, l’insécurité et l’insalubrité, le lotissement des zones non aedificandi, les incendies de marchés sont autant d’effets pervers dus au laisser-faire de notre administration qui pouvait être plus dans la prospective.
L’Etat qui délègue certaines compétences aux collectivités territoriales doit accompagner davantage ces dernières dans la planification urbaine surtout que l’acte 3 de la décentralisation milite en faveur de la communalisation universelle. Car, plusieurs collectivités territoriales font dans le pilotage à vue d’où le risque d’atteindre leur limite sans pour autant prendre en compte les générations futures. D’ailleurs, d’autres ont épuisé leur assiette foncière provoquant ainsi d’énormes conflits en annexant les territoires voisins.
Alors, l’Etat détenteur du monopole de contraintes sur les populations et sur ces territoires doit agir dans l’intérêt de tous. Ceci se fera que par la redynamisation du dispositif institutionnel dont le Conseil national de l’urbanisme, de l’habitat et du cadre de vie, une forte campagne de communication de masse, une bonne politique de citoyenneté et une application vigoureuse des codes de l’urbanisme, de l’environnement et de l’hygiène.
Il est vrai qu’en survolant la capitale, beaucoup d’espaces sont aussi occupés par des épaves de voitures avec une très mauvaise organisation spatiale mais un bon arbitrage pourra déterminer les fonctions de chaque zone par la définition des destinations du sol pour nous éviter des « Pack Lambay » ou des parcs industriels au cœur de la ville ou des marchés surpeuplés et mal aménagés.
A coté de cela, l’Etat doit agir d’abord dans la construction de rotondes pour permettre aux automobilistes de garer leurs véhicules sans encombrer non plus les voies publiques et de veiller à la discipline des automobilistes sur qui le contrôle doit être intransigeant.
Lutte contre la spéculation foncière.
En 2012, le président de la République avait mis en place une commission nationale de réforme foncière dont les rapports tardent à être publiés. Cette commission est créée dans un contexte où les contentieux sur le foncier sont récurrents et très complexes parfois.
A l’occasion de sa prestation de serment en Avril 2019, le Président Macky Sall a laissé croire que ce projet lui est cher, au point de revenir à la charge en déclarant solennellement le combat contre la spéculation foncière. D’où la convocation d’un état des lieux sans complaisance sur l’occupation des sols, mais enfin des mesures hardies et courageuses.
La spéculation foncière à mon sens commence par l’acquisition d’importantes assiettes foncières dans les zones de terroir où l’activité agraire est primordiale et constitue le motif essentiel de la plupart des affectations de terre. D’ailleurs très précaire au début, les spéculateurs trouvent toujours les moyens d’avoir un titre aliénable (bail ou droits réels).
Pour le temps d’une régularisation souvent opaque, c’est quelques années d’essayage en agriculture puis des opérations d’aménagement à but d’habitation. Sous une autre forme, c’est un détournement d’objectif, un changement de la fonction du territoire qui était au départ destiné à l’agriculture. C’est pourquoi son étalement urbain n’obéira à aucune planification urbaine. Cet état de fait laisse entrevoir plusieurs problèmes plombant un bon cadre de vie, l’adhésion des populations aux projets, le degré d’implication de la collectivité territoriale et de l’administration sur la gestion de ces terres à morceler et à vendre.
La spéculation foncière touche aussi les domaine maritime, fluviale, lacunaire et lagunaire affectés souvent aux personnalités politiques, militaires ou religieuses du pays.
Pour celles d’antan comme celles d’aujourd’hui, nous constatons une véritable spoliation du domaine national, un bien du peuple et du domaine privé de l’Etat. Il suffit juste de jeter un coup d’œil sur la conservation de la propriété des droits fonciers pour s’en rendre compte.
Dans ce combat nouvellement entamé par le président de la République, nous estimons, d’une part, que les générations futures doivent être prises en compte dans l’affectation des terres et, d’autre part, qu’il faille veiller à une adéquation de l’usage de nos terres avec les plans d’urbanisme avant une quelconque régularisation de titres.
Enfin Monsieur le Président, nonobstant le formalisme et la régularité, la transcription directe sur le livre foncier doit faire l’objet de contrôle rigoureux et sévère. Alors agissez pour l’équité et la justice.
Fast track de la mise en œuvre des politiques publiques constituent-ils un choix pertinent avec la suppression du poste de Premier Ministre dans la phase 2 du PS ?
La rapidité dans l’exécution efficace et efficiente des projets de l’État est le souhait de tout bon manager. Elle nous fait gagner en temps et en économie. Quoi de plus louable alors d’encourager cette idée du Président Macky Sall d’alléger ces lourdeurs et lenteurs dans la production de livrables au sein de nos administrations.
Cependant, il faut songer à revoir tous les textes réglementaires qui peuvent compromettre l’allégement des procédures administratives en réduisant les risques de corruption, de conflit d’intérêt et de détournements. Alléger les procédures sans surcharger les agents de l’administration ou surcharger les agents et s’attendre à des livrables dans les meilleurs délais reste maintenant la véritable équation à laquelle nous penchons depuis que l’idée de supprimer le poste de Premier ministre est lancée par le président de la République.
Dans tous les cas de figures, une chose est claire que dans le passé des slogans similaires ont été entendus et un resserrement pareil dans le premier gouvernement du Président Macky Sall n’a pas donné grand chose à part des déséquilibres dans la gestion de portefeuilles ou secteurs regroupés.
Par ailleurs, l’idée et la volonté manifeste de la part de l’autorité suprême d’avoir une administration SMART qui réponde aux exigences de l’heure sont pertinentes.
Toutefois, la suppression du poste de Premier Ministre avec une centralisation du pouvoir de l’administration à la présidence seulement ne suffisent guère pour être « fast » dans la mise en œuvre de nos politiques.
Le Territorialiste