La 23e édition du Fanal de Saint-Louis se poursuit (24-31 décembre 2023) dans l’ancienne capitale du Sénégal et de l’Afrique occidentale française. A quelques jours de la fin de cet évènement festif et culturel, l’ambiance risque de ne pas être au rendez-vous comme à l’accoutumée. Le comité d’organisation fait face à d’énormes problèmes financiers dus à des subventions maigres de la part des ministères de tutelle et la commune de Saint-Louis et du retard de l’octroiement de ces appuis.
FANAL DE SAINT-LOUIS – Une situation que déplore Marie Madeleine Diallo, patronne de Jaloré production et organisatrice de ce Fanel. Joint au téléphone par maderpost, elle dénonce le manque de considération des autorités au Fanal de Saint-Louis. Pire, elle estime que ces dernières veulent “tuer ce festival”. Dans cet entretien, elle appelle à sauver le Fanal en particulier et la culture en général car, selon elle, les acteurs culturels, pour la plus part, n’arrivent pas à joindre les deux bouts.
Ce festival culturel, patrimoine historique, est entrain de perdre ses Lettres de noblesse sous le regard désintéressé des autorités politiques. In extenso l’intégralité de l’entretien.
Quel bilan faites-vous de la préparation du Fanal 2023 ?
“Tout n’est pas fin prêt parce que nous attendons des subventions annuelles de nos partenaires institutionnels que sont la Commune (Ndlr : Saint-Louis), le ministère du tourisme, le ministère de la culture, l’Aspt qui souvent nous accompagnent. De même certains sponsors restent frileux parce qu’ils sont portés vers le sport, la lutte etc où il y a plus de visibilité mais je pense qu’un événement grandiose comme le Fanal qui est une spécificité propre à la ville qui vend la destination St-Louis et même Sénégal mérite plus de soutient et de considération.
Au moment où je vous parle les hôtels sont pleins à craquer, les hébergements sur l’habitat tout est pris alors qu’on ne sait même pas comment payer les gens qui ont travaillé.
Comment expliquez-vous ce manque de considération de la part de l’autorité surtout les ministères du tourisme et de la culture ?
Ils ont laissé entendre que le Trésor a fermé les comptes et ce jusqu’en début 2024. Toutefois, je pense qu’ils sont sur les pas de l’année dernière ; l’appui du ministre de la Culture était venu à dernière à la dernière minute. Il nous a envoyé 2 millions 500 F CFA pour nous permettre de payer la moitié du cout des 3 fanaux qui sortent chaque année alors qu’il (Ndlr : Abdoulaye Diop) venait juste d’être nommé.
Cette année, ledit ministère nous avait promis de programmer le Fanal de Saint-Louis dans le budget de l’année 2023, au regard de son importance et de ce qu’il représente pour le Sénégal. Mais jusque-là, nous n’avons reçu aucune réponse. Cette situation est pareille pour les autres ministères concernés. Il est plus judicieux de prendre en compte, dans le budget en début d’année, si vraiment ils accordent de l’importance au Fanal qui est un levier culturel de développement, à travers le tourisme.
Pour la mairie de Saint-Louis ?
Pour la commune, chaque année nous avons souvent des difficultés. Nous sommes conscients que la culture étant une compétence transférée, son budget est pour toutes les activités culturelles de l’année. Cependant, nous sommes persuadés que le Festival de Jazz, le Fanal de St-Louis et d’autres manifestations, les plus grandes de la ville, devraient bénéficier d’une part très importante de ce budget-là. Chaque année c’est presque la même chose. C’est à la dernière minute qu’ on nous donne 1 million de F CFA ; ce qui ne fait même pas le coût d’un fanal alors qu’on en a trois à sortir avec tous les moyens que cela nécessite. Il faut payer les femmes qui chantent, les batteurs de tam-tam, les animateurs qui précèdent la sortie du fanal avec les troupes pour montrer une autre vitrine culturelle… les prestations des acteurs culturels qui ont choisi, cette année, la place Faidherbe. Vous imaginez que c’est trop faible comme accompagnement au regard des besoins. Les acteurs sont motivés à étaler leurs prestations mais derrière c’est difficile, pour nous d’assurer les moyens que cela requiert tels la sono le podium…
En plus, on a supprimé les activités du Off alors qu’on a travaillé pendant 5 ou 6 ans pour en faire un festival. J’ai l’impression que la culture est traitée en parent pauvre et que les acteurs culturels, déjà qu’ils ne vivent pas presque tous de leurs arts, ont que cette manifestation pour se faire voir. C’est une vitrine parce que c’est évènement qui draine des touristes.
Le Fanal est l’expression culturelle qui rassemblent toutes les familles, les gens quittent Dakar pour retrouver leurs familles à St-Louis, les grand-mères qui viennent avec leurs petits-enfants ; c’est vraiment quelque chose de magnifique et j’ai l’impression qu’on veut tuer le festival sincèrement.
Comment comptez-vous faire face à cette situation précaire alors qu’on est à quelques jours de la fête ?
Non, il y aura la manifestation parce que les organisateurs du fanal ont essayé avec des volontaires et des bénévoles qui nous envoient des 150. 000, 100. 000, 500. 000 F CFA. On se débrouille avec ça, pour le moment et ce n’est pas du tout facile”. (propos recueillis par Bertin Aly Thiaw).
Le Fanal, jadis une fête typique des Quatre Communes de plein exercice du Sénégal, de Saint-Louis en particulier remonte au XVIII (18e siècle).
A l’époque, la veille de Noël, les Signares, richement parées se rendaient à la messe de minuit précédées par de jeunes domestiques porteuses de lanternes vénitiennes ; ce sont ces petites lanternes qu’on appelait Fanals.
Maderpost / Mamadou Ba