PRESIDENTIELLE – Reçue hier par les représentants de l’Union Européenne (UE), l’opposition a présenté huit (8) points qu’elle reproche au régime de Macky Sall.
L’opposition continue sa tournée d’alerte et de prévention contre les “dérives” de Macky Sall. Après des visites auprès de certains chefs religieux, ses leaders ont été reçus hier, par les représentants de l’Union européenne. Une occasion encore pour l’opposition de vilipender le Président Sall devant ces partenaires techniques et financiers du Sénégal.
“Nous avons rencontré les représentants de l’Union européenne et nous leur avons dit que Macky Sall est obnubilé par un deuxième mandat, mais sachant qu’il ne peut pas l’avoir par un scrutin sincère et transparent, il est en train de mettre en œuvre une stratégie, un plan et avec des phases qui, principalement, sont au nombre de huit”, confie Habib Sy, porte-parole du jour.
Et l’ancien ministre d’Etat ne tarde pas à lister ces huit points que l’opposition reproche à Macky Sall.
Il commence par la Constitution, en accusant Macky Sall de l’avoir modifiée avec l’aide de sa majorité “mécanique à l’Assemblée nationale et sans débat”. Autre modification que l’opposition dénonce, c’est celle du Code électoral. Ses leaders accusent Macky Sall d’avoir “unilatéralement” modifié le Code électoral, “pour empêcher certains leaders potentiels de se présenter contre lui”.
Toujours concernant le processus électoral, les opposants, non rassurés par l’actuel fichier électoral, l’ont bien signifié hier, aux représentants de l’Ue.
“Macky Sall est le seul à savoir ce qu’il y a à l’intérieur du fichier électoral. Il ne veut pas le partager avec l’opposition, de telle sorte que nous avons aujourd’hui au Sénégal un processus électoral opaque», souligne l’ancien maire de Linguère.
Le problème des cartes d’électeur a été aussi exposé par l’opposition aux représentants de l’Ue. “ll y a un blocage des cartes électeurs. Ils sont des milliers de Sénégalais à ne pas pouvoir obtenir la leur”, déclare M. Sy. Qui revient sur les dossiers judiciaires concernant certains candidats déclarés de l’opposition, notamment Khalifa Sall et Karim Wade. L’opposition accuse Macky Sall «d’instrumentaliser la Justice en condamnant des candidats à l’élection présidentielle».
La loi sur le parrainage a été aussi parmi les points listés par l’opposition. Habib Sy l’avoue : «Après la prison de Rebeuss, c’est la prison des signatures par le parrainage. C’est une sorte de prison, parce que quand vous dites que chaque électeur ne peut parrainer qu’un seul candidat et c’est celui qui aura déposé le premier la liste des parrains qui sera validé, les autres ne le seront pas, vous aurez encore des milliers de signatures à authentifier par le Conseil constitutionnel. C’est pratiquement impossible. Macky Sall le fait pour que cela soit à son avantage.»
«Notre message n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd»
L’avant-dernier point concerne le cas Aly Ngouille Ndiaye. L’opposition continue de récuser son maintien à la tête du ministère de l’Intérieur, organisateur des élections. Car, pour ses leaders, le ministre Aly Ngouille Ndiaye ne peut pas être juge et partie. “Contre vents et marées, il (Macky Sall) maintient son ministre de l’Intérieur, responsable déclaré et reconnu de l’Apr, pour organiser l’élection présidentielle.
Or, ce ministre a déclaré devant la face du monde que sa préoccupation première, c’est de faire réélire le Président Sall au premier tour, en faisant en sorte que tous les électeurs susceptibles de supporter la candidature de Macky Sall puissent disposer de leur carte pour voter. Tous les autres, passez moi l’expression, ce n’est pas son problème», lâche l’ancien ministre libéral. Qui, revenant sur le huitième point, accuse le régime en place d’avoir élaboré un budget de guerre 2018-2019.
Selon lui, le pouvoir dit que c’est un budget social, mais en réalité, affirme Habib Sy, c’est un budget pour la campagne électorale. «Avec la Délégation à l’entrepreneuriat rapide (Der), aujourd’hui, ils sont en train de recenser, à travers le Sénégal, des projets destinés à acheter des consciences d’électeurs», accuse-t-il. Non sans dire que le pouvoir, particulièrement, le Président Macky Sall, est en train de jouer avec le feu. «La marmite est en train de bouillir et on ne sait pas quand le couvercle sautera», avise-t-il.
De son côté, l’Ue a bien entendu le message de ses hôtes. Du moins, selon l’ancien ministre Habib Sy qui déclare : «On a été bien entendu et bien compris par l’Union européenne qui a joué un rôle déterminant dans la transparence du processus électoral en 2012. Il y avait un organe de veille dans lequel ont participé toutes les parties prenantes. Nous espérons que l’Ue jouera le même rôle, comme elle le fait actuellement au Mali, pour qu’il y ait des élections transparentes, un scrutin sincère et loyal. Nous ne demandons pas plus que cela. Ils nous ont compris et nous ont dit de noter que notre message n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Diplomatiquement, cela veut dire beaucoup de choses», dixit Habib Sy au bout du fil.
SOPHIE BARRO/L’OBSERVATEUR