Du Liban à l’Égypte en passant par Gaza, avec le redémarrage du conflit israélo-palestinien, Fadi Assaf, ancien conseiller du Président libanais, explique au Désordre mondial que «le niveau de violence atteint aujourd’hui reflète une volonté politique».
PROCHE-ORIENT – Les drames se multiplient au Moyen-Orient et l’escalade semble incontrôlable. Qui sont les responsables? Peut-on trouver une issue à cette crise? La France est-elle en mesure d’y contribuer?
Tandis que le Hamas et Israël échangent des tirs de roquettes et s’affrontent sur la politique d’annexion par Israël de terres sur lesquelles vivent des Palestiniens, Emmanuel Macron a tweeté: «La spirale de la violence doit cesser au Proche-Orient. J’appelle avec force au cessez-le-feu et au dialogue. J’appelle au calme et à la paix.»
N’est-ce pas un peu naïf? Qu’est-ce qui pourrait réellement forcer Israël et le Hamas à négocier?
L’armée israélienne a déclaré qu’au moins trois roquettes qui ont visé Israël –mais ont atterri en mer– avaient été tirées depuis le Sud-Liban. Or, la déclaration du Président de la République intervient quelques jours à peine après la visite de son ministre des Affaires étrangères à Beyrouth.
Jean-Yves Le Drian était venu pour faire pression sur les responsables politiques libanais qui traînent des pieds depuis des mois pour former un nouveau gouvernement. Quels sont les résultats de la stratégie de Macron?
Par ailleurs, la France a confirmé au début du mois la vente de 30 avions de combat Rafale à l’Égypte, voisine d’Israël, augmentant ainsi les chances que les armes tricolores soient utilisées un jour dans un conflit au Moyen-Orient, qui fera l’objet d’appels à un cessez-le-feu du Président français.
Pour Fadi Assaf, ancien conseiller du Président du Liban et consultant en relations internationales, les nouveaux embrasements entre Israël et la Palestine n’ont pas été déclenchés dans le vide:
«On ne peut pas penser à tout cela sans voir tout le schéma géopolitique de la région, y compris les négociations en cours entre l’Iran et les États-Unis via Vienne, ou l’Iran et l’Arabie saoudite, ou la réhabilitation imminente de Bachar al-Assad. L’offensive turque, c’est de l’opportunisme.»
Mais pourquoi un redémarrage de la guerre cinétique maintenant? Fadi Assaf considère que c’est un concours de circonstances:
«Le conflit israélo-palestinien date depuis de longues années, il est devenu cyclique. Pourquoi les violences redémarrent maintenant? Il y a eu une injustice qui a été exploitée de part et d’autre, et le cycle des violences s’est accéléré. Les familles arabes ont été expulsées de leurs maisons à Jérusalem. À ce moment-là, le peuple palestinien gagnait en sympathie et pour un coût assez faible en échange. Puis il y a eu des tensions supplémentaires, les Arabes se sont invités dans la partie et le Hamas est rentré dans le jeu à partir de Gaza, attisant la violence, avec des représailles démesurées de la part des Israéliens.»
Pourquoi le Hamas comme Israël auraient-ils intérêt à suivre le cessez-le-feu appelé par Macron? L’ancien conseiller du Président libanais considère que c’est parce qu’ils ne sont pas seuls:
«Le Hamas n’est pas seul dans cette histoire. Il dispose de milliers de missiles, d’une autonomie financière qui ne descend pas du ciel. Des soutiens, relais, sponsors commencent à intervenir à l’instar du Qatar et de la Turquie… Je ne pense pas que les décisions viennent à 100% du Hamas. Les Israéliens, eux, ont des alliés arabes, internationaux et ne peuvent pas mener des guerres comme bon leur semble.»
Les armes françaises vendues dans la région pourraient-elles alimenter des conflits ultérieurs?
«Les avions Rafale vendus à l’Égypte sont déjà utilisés dans les conflits. Ils ont été utilisés contre le terrorisme et en Libye. Ceux qui viennent d’être vendus vont être surtout employés pour asseoir le nouveau statut de puissance régionale que le Président Sissi veut donner à son pays», explique Fadi Assaf.
Maderpost / Sputnik