L’heure de la « parole » de la raison doit sonner en prenant la place des armes qui tonnent. Le temps de la destruction n’est plus de mise car l’humanité a bien souffert des conflits guerriers qui, jusque-là, n’ont pas encore fait la preuve de leur efficacité, défend Pr Lamine Ndiaye, Professeur titulaire de Classe exceptionnelle.
TRIBUNE – Quel Développement pour nos Etats ?
Qu’est-ce que je dois dire ?
Qu’est-ce que j’ai à dire ?
Qu’est-ce que je peux dire ?
Comment dois-je le dire
Sur un développement durable, devons-nous nous pencher !
Ces notes cursives permettent de poser le débat et d’envisager l’esquisse d’une solution sur laquelle, tôt ou tard, il faudra s’intéresser pour venir au secours de l’Afrique.
Et j’ai très vite compris qu’il s’agit de cogiter sur l’essentiel, sur le sérieux pour la survie. Invite ne peut alors être plus grande, intéressante, pertinente et décente que de réfléchir sur notre humanité en souffrance, blessée par des « guerres » gangréneuses, dont on peine à trouver le sens ou à donner de la signifiance. La guerre ukrainienne, le génocide palestinien, ce dangereux conflit opposant Iran et Israël et qui souffle le vent pollué d’une possible hostilité mondiale, ne devraient pas avoir lieu car il s’agit de faits extrêmement graves et qui n’ont pas emprunté la voie qui mène vers une direction sensée…C’est, tout simplement, un non-sens, fruit de l’imprudence humaine, ayant échappé à notre vigilance.
Nous ne devons pas « faire comme si », « vivre avec » ou bien « faire avec », comme c’est le cas avec la COVID 19 dont on n’est pas absolument sûr qu’elle soit une œuvre humaine. Ne nous est-il pas permis de penser que c’est la Nature, voire les choses, qui se sont vengées contre nous pour nous mettre au pas parce que, par le mépris de l’environnement et de l’humain, nous ne les respectons pas ?
La guerre n’est pas dictée par la loi de la nature ; elle est l’œuvre des hommes au pouvoir. Ces derniers, insatiables, avides de pouvoir qu’ils ne souhaitent pas perdre, veulent, partout et chaque fois que de besoin, asseoir leur domination. Ainsi, oublient-ils qu’aucune créature humaine n’est un « éternel physiquement » et que notre éternité si, toutefois, elle est à rêver, peut être rêvée, est autorisée à s’offrir au rêve qui se dresse contre la rêverie, ne se mesure qu’à l’aune de nos réalisations. Souhaitons que celles-ci soient enviables, ne serait-ce que pour le bonheur et pour la paix de la postérité. « Nopa mag boroom », dit l’adage wolof (« L’âge de l’oreille est beaucoup plus avancé que celui de la personne », propos dont un bon enfant du Kajoor sait mesurer le sens et l’apprécier à sa juste valeur.
De ce point de vue, il est de notre responsabilité, à nous tous, de mobiliser nos énergies intelligentes afin que la guerre ne soit plus cette « solution » dramatique, c’est-à-dire que l’usage, quelquefois abusif, de la raison aveuglée, force du mal agissant, ne nous empêche pas de vivre chaque jour. L’heure de la « parole » de la raison doit sonner en prenant la place des armes qui tonnent. Le temps de la destruction n’est plus de mise car l’humanité a bien souffert des conflits guerriers qui, jusque-là, n’ont pas encore fait la preuve de leur efficacité.
La « parole-sauveur » ou « rédemptrice » semble s’offrir, aujourd’hui, au continent africain qui, s’il compte sur ses fils ayant la tête sur les épaules, peut raisonner le monde en phase de déliquescence en prenant humainement la violence dans la discussion pour la soumettre à l’action efficace de la toute-puissance du verbe qui ne défait pas, mais fait et unifie. C’est ce rapport à la parole toute puissante et créatrice qui a fondé la diplomatie sénégalaise et continue de la nourrir depuis Senghor, même si cette dernière a connu quelques blessures qui sont appelées à se cicatriser, avec le temps.
Nous n’aurons pas la prétention d’égrainer les actes de taille posés par les diplomates sénégalais, sous les auspices des différents Chefs d’État qui se sont succédé, des indépendances à nos jours. Quelques temps forts méritent un rappel mais, pour les besoins du moment, il nous semble plus opportun de nous focaliser davantage sur le rôle joué par le Sénégal et la place qu’il occupe dans l’échiquier politique international, pour promouvoir une paix mondiale durable et un développement partagé, legs des prédécesseurs dont il a su entretenir la continuité, preuve assurée d’une « diplomatie de consensus national ».
Pour la « petite » histoire
Grande est cette histoire !
Pouvons-nous douter de la qualité de la diplomatie sénégalaise si, toutefois, nous devons nous en tenir à la place privilégiée occupée par l’État sénégalais, grand pays à la petite superficie de 196 712 km2 et avec une population qui avoisine les 18 millions ? Nous n’en doutons pas. Et, pour preuve, nous devons nous souvenir de la réalité historique selon laquelle le Sénégal a compté parmi ses illustres fils :
– le premier député africain, Blaise Diagne (1872-1934), élu à la Chambre des députés française, en 1914 ;
– le premier juriste noir de l’Afrique française, Me Lamine Gueye (1891-1968), panafricaniste de première heure, député du Sénégal au Palais Bourbon (1945-1951), Sénateur de la Communauté (1958-1959) et défendeur de la cause des Noirs des colonies française donnant naissance à la loi du 7 mars 1946, portant sur l’étendue de la qualité de citoyen aux ressortissants des Territoires d’Outre-mer et aussi à la loi du 30 juin 1950 orientée vers l’égalité de traitements et d’avantages, sans distinction de race, de religion, de statut, aux fonctionnaires civile et militaires d’Outre-mer ;
– le premier agrégé noir en grammaire (1935), Léopold Sédar Senghor (1906-2001), député du Sénégal en 1946, ayant assuré diverses fonctions au Conseil de l’Europe, à l’UNESCO et à l’ONU, Secrétaire d’État français à la présidence du Conseil dans le cabinet d’Edgar Faure (1955-1956), ministre-conseiller du gouvernement de la République française (1959), élu à l’académie française (1983) et père fondateur de l’organisation de la francophonie ;
– le premier Africain, Directeur général de l’UNESCO, pendant 13 ans (1974-1987), Amadou Mahtar Mbow (1921) ;
– le premier africain, Directeur général de la FAO (1994-2011), pendant 18 ans, Jacques Diouf (1938-2019), pour l’éradication de la fin et l’amélioration d’une sécurité alimentaire et agricole durable, à travers le monde ;
– Ibrahima Fall (1942), sous-secrétaire général aux Droits de l’Homme de l’ONU et directeur général adjoint de l’Office des Nations Unies à Genève (1992-1997), sous-secrétaire général aux affaires politiques de l’ONU (New York) en charge des affaires politiques africaines (1997-2002), sous-secrétaire général et représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour la Région des Grands Lacs (2002-2007), envoyé spécial président de la Commission de l’Union Africaine pour la Guinée (2008-2010), Haut représentant de l’Union Africaine pour la transition au Tchad (2021) par décision du Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de l’Union Africaine lors de sa 996ème réunion présidée par S.E. Moussa Faki Mahamat, Président de la Commission de l’UA, le 14 mai 2021 ;
– etc.
C’est cet héritage diplomatique honorable, orienté vers la défense des idéaux de paix, de justice et de sécurité internationale, qui a valu au Sénégal son élection, pour la 3ème fois de son histoire, comme membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations Unies, de 2016 à 2017, par 187 voix sur 191, pour participer à la prise des grandes décisions qui engagent le monde. Ainsi, participe-t-il aux missions onusiennes de la paix en faisant partie des pays premiers contributeurs de troupes pour avoir occupé le 1er rang en Afrique de l’Ouest, le 3ème africain et le 7ème mondial.
Si le Sénégal s’octroie une place enviable au concert des Nations de grande diplomatie au point de devenir une « diplomatie d’influence », il faut bien reconnaître qu’il le doit à sa culture politique interne fondée sur le dialogue, sur l’ouverture, sur la « neutralité » et sur le « commun-vouloir-vivre-ensemble » qu’il faut entretenir, en toute rigueur.
Le « nouvel ordre international » n’est-il pas en passe d’être défini par l’Afrique ?
Le 2 mars 2022, l’Assemblée générale de l’ONU (AGNU) votait une résolution. Cette dernière, intitulée « Agression contre l’Ukraine » émanant d’une décision de l’UE en accord avec l’Ukraine, était écrite en ces termes : « Que la Russie cesse immédiatement de recourir à la force contre l’Ukraine et retire immédiatement complètement et sans conditiontoutes ses forces militaires » basées en terre ukrainienne. Avertissement, ultimatum ou menace ? Ce dont nous sommes sûr, c’est que sur les 193 pays participants, une large majorité a condamné la Russe au moment où 12 États africains n’ont pas voté et 17, parmi lesquels il faut compter le Sénégal, se sont abstenus.
Avec une tradition axée sur la neutralité et sur l’adoption du principe du non-alignement, la position du Sénégal n’est pas nouvelle, sur le plan diplomatique. Qu’on se souvienne de l’occupation russe de la Crimée, en 2014 et du conflit israélo-palestinien ! L’entretien téléphonique entre l’ancien président de la République du Sénégal et celui de la Russie, le 9 mars 2022 pour un arrêt de la guerre qui oppose la Russie et l’Ukraine, est révélateur. La rencontre des deux Chefs de l’État sénégalais et russe, du 3 juin 2022, au travers de laquelle il a été question d’évoquer la crise alimentaire qui menace l’Afrique et le fait que le mardi 20 septembre 2022, coïncidant avec l’ouverture de la 77ème Assemblée générale des Nations unies, réunissant des Chefs d’État et de gouvernement, à New York, l’Afrique, par la voix de ses dirigeants, ait eu droit à la parole, montrent, encore une fois de plus, que ce continent à son mot à dire dans le concert des Nations.
Durant cette réunion, d’obédience mondiale, le débat a porté, pendant près d’une semaine, sur la Guerre en Ukraine, le dérèglement climatique, la sécurité alimentaire, entre autres. Et ce qui est remarquable, c’est le fait que le Chef de l’État sénégalais soit le premier africain à communiquer sur l’avenir du monde, après le président brésilien, suivi des présidents des Seychelles, Wavel Ramkalawan, du Congo, Félix Tshisekedi, de la Centrafrique, Faustin-Archange Touadéra et du Chef du gouvernement marocain, Aziz Akhannouch. Cette réalité historique nous en dit beaucoup sur le rôle que le Sénégal peut jouer comme médiateur d’un monde en perte d’équilibre.
Une opportunité à saisir pour être premier
Pour paraphraser la Bible (Marc, X, 31), nous pouvons dire que le dernier peut devenir le premier s’il a conscience de ses possibilités concrètement et de ses virtualités absolument. Ce temps, que nous vivons, semble être celui de l’Afrique et des Africains. N’est pas « maître » du monde qui veut et ceux qui dirigent la planète sont issus de peuples unis. Nous devons nous unir et c’est là où nous interpellons l’UA. Un ensemble de propositions audacieuses mais réaliste s’impose alors. L’Union Africaine doit, maintenant, être un organe de conciliation et de réconciliation, l’outil efficace par l’intermédiaire duquel l’unité africaine, dans toute sa plénitude, devient une réalité concrète. En conséquence, la coopération Sud-Sud, un partenariat qui s’impose, par l’ordre et par la force des choses, ne se dit plus seulement mais se vit. Dans cette perspective, l’Union africaine nous servira de socle sur la base de laquelle nous nous appuierons pour :
– mettre en place un réseau des universités réunissant les institutions universitaires africaines anglophone, arabophone, francophone, germanophone, hispanophone, lusophone, etc. ;
– créer de grands ensembles de laboratoires spécialisés et mixtes, fondamentaux et appliqués, gage d’un développement durable, avec des critères objectifs qui organiseront les conditions de sélection des lieux choisis pour accueillir lesdits laboratoires sur la base de la qualité de l’enseignement et de la valorisation des activités de recherche en phase avec les besoins de la communauté, aussi bien dans les Sciences de l’Homme et de la Société que dans les Sciences dites « dures » ;
– octroyer des bourses africaines aux meilleures thèses et projets de thèse en rapport avec le développement du continent ;
– asseoir un système d’accompagnement en ligne en relation avec les pays, en travaillant avec les États-membres en vue de lutter contre la fracture numérique qui rend difficile, voire quasi impossible, le partage des connaissances, les échanges et la mutualisation des pratiques savantes des chercheurs africains africanistes, y compris ceux de la diaspora, du public et du privé (rapport de la Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement (CNUCED), 2019 : 27% de la population africaine connectée ; 90% en Amérique du Nord et en Europe ; 9 des 10 pays du monde les moins préparés aux activités commerciales en ligne sont africains). Ce dont nous sommes sûr, c’est que les TICs se développent de plus en plus en Afrique (Afrique du Sud, Nigeria, Maroc, Tunisie, Rwanda, etc.). Elles s’imposent partout pour être des facteurs incontournables de transmission rapide de savoirs, de « savoir-faire », de « savoir-être » et de « savoir-devenir », surtout quant à l’enseignement technologique et professionnelle. L’expertise de tous les États africains est nécessaire. Tous les pays africains doivent collaborer et mutualiser les moyens car le développement accéléré du continent est une urgence ;
– promouvoir la recherche orientée vers la valorisation de la « Médecine traditionnelle » dont l’Afrique regorge de spécialistes de haut niveau, héritiers de la pratique médicinale ou formés à travers les facultés de Médecine du monde (Afrique, Amérique, Chine, Europe). Sous ce rapport, nous pouvons nous appuyer sur le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la Guinée, le Niger et le Sénégal…
Il existe des rêves qui sont réalistes et réalisables. Nous devons croire que le développement de l’Afrique peut, en grande partie, passer par la volonté des États qui se donneront la vocation de rehausser les capacités scientifiques de leurs chercheurs devant prouver ce dont ils sont capables en vue de gagner l’adhésion de nos gouvernants qui, convaincus, mettront les moyens pour une « Recherche-développement » efficace et durable (Afrique :18% de la population mondiale, soit 1,4 milliard en 2022, 2% des résultats de la recherche et 1% de capacité au niveau mondial, WATHI, 2019).
Mais, Pouvons-nous sentir l’odeur du développement, nous ouvrir au développement, nous développer si la recherche n’est pas valorisée ? Tous les pays cités en référence se sont développés par la stimulation des enseignements et de la recherche « décomplexés et innovants » en privilégiant la formation universitaire, la recherche scientifique et l’innovation technologique et en étant au diapason avec celles-ci, éléments-clés de tout développement durable.
Les universités africaines sont classées parmi les moins performantes au monde, s’il faut en croire les résultats des systèmes de classements mondiaux. En 2014, Shanghai, en se fondant sur un ensemble de critères, si discutables soient-ils, a répertorié cinq cents (500) universités considérées comme étant les meilleures au monde parmi lesquelles cinq (05) sont africaines dont quatre (04) sud-africaines. Toutefois, nous précisons que même si, en terre africaine, la recherche est en souffrance, en mal de vie, la fatalité ne doit pas être de mise. Car l’aptitude ne manque pas, les compétences, non plus.
Reconnaissons aussi que, conscients de plus en plus de leurs responsabilités, les chercheurs africains, malgré le manque de moyen, s’engagent dans une « recherche-action » et dans une « recherche-développement », gages de l’essor du continent. Ainsi, doivent-ils orienter leur recherche vers les nouvelles connaissances portées, aujourd’hui, par des dynamiques de complexité et de pluralité.
Car, évidemment, la recherche doit tenir compte de l’économie de la connaissance et des plus-values de la recherche des pays et des universités africains par des politiques de structuration de la gouvernance de la recherche, d’amélioration de l’environnement de recherche, de financement de la recherche, des droits de propriété intellectuelle et de la valorisation des résultats de la recherche.
De la sorte, et par souci d’efficacité, les chercheurs africains sont appelés à encourager et à favoriser la « coopération Sud-Sud » qui se réalise par l’harmonisation des pratiques et le partage des expériences. À ce propos, l’UA doit s’organiser de manière à renforcer le partenariat et les collaborations scientifiques sous-régionales et régionales qui ont été victimes de l’influence des chercheurs étrangers sur les activités et sur la définition des thématiques de recherche en Afrique mais surtout de la dépendance des unités de recherches africaines en termes de moyens matériels et financiers, expliquant leur sous-équipement et leur sous- financement.
Nous ne doutons pas de la présence des enseignants-chercheurs et des chercheurs africains dans les appels d’offres internationaux et nationaux. Toutefois, nous devons préciser que ces fonds compétitifs ne financent pas les équipements scientifiques. Eu égard à cette situation, le financement de la recherche, aussi bien public que privé, doit être accru afin que nos institutions et nos laboratoires de recherche disposent suffisamment de moyens, aux bénéfices de nos talents affichés ou cachés, connus et/ou reconnus.
L’environnement matériel de travail du chercheur doit, de ce point de vue, être amélioré pour permettre aux institutions d’absorber les talents confirmés et de produire des connaissances de niveau international. Ce que nous remarquons, c’est que la recherche, quelle que soit la volonté annoncée pour son épanouissement, demeure le parent pauvre des politiques pour un développement assuré de nos États.
À cet égard, pour ce qui est du Sénégal, les ministères impliqués dans la formation et dans la recherche – tous les ministères d’ailleurs –, soucieux de l’avenir du pays, devront participer à ce projet en soutenant la recherche et la formation pour préparer notre jeunesse aux métiers d’aujourd’hui et de demain qui peuvent participer favorablement à notre développement. Ce faisant, les talents connus ou cachés, seniors et juniors, des mondes du « formel » et de l’« informel » doivent être mobilisés, encouragés et encadrés. Cette invite à l’union des forces, faudrait-il bien le savoir, ne peut se réaliser que si, et seulement si, elle est accompagnée d’une volonté politique réelle, consciente des priorités et des enjeux du moment. Ainsi, les ministères, les directions générales, les grandes entreprises du privé et du public et autres mécènes pourront octroyer une partie de leur budget ou bien de leurs épargnes à ce programme ; les fonds collectés étant logés à la présidence de la République ou à la primature qui en assurera la meilleure gestion. Surtout que l’actuel Chef de l’État du Sénégal, M. Diomaye Faye en appelle à la solidarité gouvernementale, sous le contrôle de son Premier ministre, M. Ousmane Sonko.
Le moment est alors venu de faire de l’Afrique occidentale un « Pôle Recherche-Innovation-Technologie » et, de ce point de vue, le Sénégal peut jouer un grand rôle, celui d’« État-orchestre », par sa diplomatie, son ouverture, sa capacité à dialoguer, son esprit de partage et la qualité reconnue, sur le plan international, de sa représentation diplomatique, du commerce facile qu’on lui reconnaît, de ses intellectuels, de ses chercheurs, de ses savants de tous bords, de l’intérieur et de l’extérieur, qui, s’ils sont bien guidés, ne demanderont, à leur Nation, qu’une seule chose, la servir avec loyauté et déférence.
La création de ce pôle est un défi majeur et constitue la véritable rupture qui va maintenir les acquis et replacer le centre de gravité de l’institution, axée sur la qualité de l’enseignement et de la formation, pour l’orienter résolument vers la recherche et l’innovation qui vont nourrir un enseignement de qualité et accélérer le développement. Cet appel à la collaboration des États de l’Afrique de l’Ouest, si, toutefois, elle est réussie, devrait pouvoir s’élargir et s’étendre au niveau africain.
Ce faisant, l’Afrique, avec son capital de matière grise à laquelle il faut rattacher celle de la diaspora, se fondera sur ses laboratoires, ses unités de recherche, ses groupes de recherche, ses équipes de recherche, etc. réunis en fonction des compétences et de leurs affinités disciplinaires pour répondre à « L’Agenda 2063 » de l’Union Africaine.
Ainsi, en mobilisant des ressources prévues par les États constitutifs de l’UA pour financer la « Recherche-développement », nos différents pays pourront, désormais, se consacrer à des activités de recherche qui répondront aux exigences pour leurs progrès. Et, certainement, en mobilisant nos ressources humaines et en décidant de prendre notre destin en main, nous ne dépendrons plus du blé ukrainien ; autrement dit, de l’importation massive et coûteuse des produits vitaux de premières nécessités dont la dépendance aux pays occidentaux et/ou asiatiques pèsent lourdement sur nos épaules déjà bien fragilisées par le paiement des dettes et les subventions servant à amortir la cherté de la vie sans qu’elles fassent la preuve de leur efficacité.
En guise de conclusion non conclusive, nous nous proposons de retrouver, pour terminer, John Stuart-Hase, en ces termes :
« Pour ceux qui croient, aucune preuve n’est suffisante.
Pour ceux qui ne croient pas, aucune preuve n’est nécessaire ».
*Professeur titulaire de Classe exceptionnelle
Ancien coordonnateur des Écoles doctorales
Université Cheikh Anta Diop de Dakar
Maderpost