Le comédien laisse derrière lui des films innombrables tournés avec les plus grands cinéastes et une immense carrière théâtrale. CINEMA – Il était apparu au cinéma dès 1945, avant de devenir l’un des plus grands acteurs français. Né le 27 décembre 1925, Michel Piccoli est mort à 94 ans, a annoncé sa famille lundi 18 mai. Acteur, réalisateur, producteur, metteur en scène, il a rencontré le succès sur le tard, à partir de 1963, avec Le Mépris de Jean-Luc Godard, aux côtés de Brigitte Bardot. Il était omniprésent depuis, sur scène et à l’écran, jusqu’à 2014, date de sa dernière apparition au cinéma. Un homme secret et engagé Discret, voué à son art, exigeant dans ses choix, Michel Piccoli ne défrayait pas la chronique. Seul un film, une pièce, une récompense le faisait sortir de son antre, rien de plus. Secret, il a toutefois toujours prôné ses valeurs socialistes, soutenant François Mitterrand à deux reprises, ainsi que Ségolène Royal, montant au créneau contre le Front national ou pour défendre Amnesty International et les droits d’auteur sur internet. Né à Paris d’un père violoniste et d’une mère pianiste, fille de famille fortunée, Michel Piccoli entre au cours Simon et apparaît dès 1945 à l’écran dans Sortilège de Christian-Jaque. Il a alors 20 ans. Si le cinéma fait tôt appel à lui, c’est le théâtre qui le passionne. Il intègre les compagnies Renaud-Barrault et Grenier-Hussenot, ou l’avant-gardiste Théâtre de Babylone. La vie privée de l’homme reste confidentielle. Si ses trois mariages sont connus, qui se le rappelle marié à Juliette Gréco de 1966 à 1977 ? Il est également le père d’une fille issue de son premier mariage et de deux filles adoptives polonaises. L’anti-jeune premier Dès ses débuts, le jeune Piccoli passe du cinéma au théâtre, avec une accélération prodigieuse à partir de 1950. Il enchaîne jusqu’à cinq pièces (Courteline, Pirandello, Strindberg) et quatre films la seule année 1952. Il tourne pour Jean Delannoy, Jean Renoir, René Clair, Alexandre Astruc… L’acteur participe aux balbutiements de la télévision dès 1954 dans un remake de Sylvie et le Fantôme, et y fera des apparitions régulières, même si le grand rôle n’est pas au rendez-vous. Il tourne en 1956 La Mort en ce jardin, son premier film avec Luis Buñuel, qui le dirigera cinq autres fois, dans Journal d’une femme de chambre (1963), Belle de jour (1966), La Voie lactée (1969), Le Charme discret de la bourgeoisie (1972) et Le Fantôme de la liberté (1974). Remarqué dans Le Doulos de Jean-Pierre Melville en 1962, Michel Piccoli se fait connaître du grand public l’année suivante, grâce au Mépris de Jean-Luc Godard, où, premier rôle masculin, il donne la réplique à Brigitte Bardot, en pleine “BBmania”. Il a 38 ans, l’âge de la retraite pour les jeunes premiers, rôle que ne tiendra jamais Piccoli, alors que sa vraie carrière vient de commencer. Buñuel, Sautet, Ferreri… et les autres Ce physique mature ne l’empêchera pas de tourner avec les plus belles actrices : Bardot, on l’a vu, Jeanne Moreau, Catherine Deneuve ou Romy Schneider. Les années 1960-1970 sont un boulevard pour Michel Piccoli qui va enchaîner les grands rôles. Comparable aux Gabin, Delon, Ventura de l’époque, il fait toutefois le choix de films moins commerciaux et s’il tâte du polar, c’est toujours à la marge. Après sa rencontre majeure avec Luis Buñuel, c’est Claude Sautet qui domine dans sa carrière. Le réalisateur fait appel à lui en 1970 dans Les Choses de la vie qui le place au premier plan et engendrera quatre autres collaborations : Max et les Ferrailleurs (1971), César et Rosalie (1972), Vincent, François, Paul… et les autres (1974), puis Mado (1978), tous aux côtés de Romy Schneider. Troisième réalisateur à lui être fidèle : Marco Ferreri avec lequel il tourne six films, dont le sulfureux La Grande Bouffe, qui fit un scandale mémorable en 1973 à Cannes. Frondeur, il y incarne, aux côtés de Marcello Mastroianni, Ugo Tognazzi, Philippe Noiret et Andréa Ferréol, un homosexuel qui meurt dans ses excréments. Il jouera aussi un homme amoureux de sa poupée gonflable (Grandeur nature), un locataire qui pète les plombs et détruit son immeuble (Themroc) ou un avocat bigame, escroc et assassin (Le Trio infernal). Eclectisme Michel Piccoli ne va pas dans le sens du vent, prend des risques et tourne à tour de bras. S’il est dirigé par un Claude Chabrol installé (Les Noces rouges) ou Louis Malle (Atlantic City, Milou en mai), il sert de jeunes auteurs comme Jacques Doillon, Francis Girod ou Leos Carax. Il est aussi un pilier de Manoel De Oliveira (Je rentre à la maison) ou Raoul Ruiz (Généalogie d’un crime). Au théâtre de Koltès au Roi Lear Mais, fidèle à ses origines et à la double carrière de ses débuts, Michel Piccoli n’a eu de cesse de monter sur les planches. En 1965, son interprétation de Dom Juan, d’après Molière, pour la dramatique télévisée de Marcel Bluwal, est très remarquée. Il est mis en scène par Peter Brook, Patrice Chéreau, Bob Wilson ou Luc Bondy, interprète Racine, Shakespeare, Marivaux, Ibsen, Koltès ou Duras. Des années 50 et 60, où il interprète des textes de Pirandello, de Strindberg et de Claudel, mais aussi “Phèdre” sous Jean Vilar, au “Roi Lear” de Shakespeare où il triomphe en 2006 et 2007 au Théâtre de l’Odéon, il n’a jamais vraiment quitté les planches. Avec Peter Brook et son théâtre des Bouffes du Nord, il joua dans “La cerisaie” de Tchekhov en 1981 et 1983. Il retrouvera le légendaire maître de théâtre britannique en 2003 avec la pièce “Ta main dans la mienne” de Carol Rocamora. Patrice Chéreau le dirigera dans trois textes: “Combat de nègre et de chiens” (1983) et “Le retour au désert” (1988) de Bernard-Marie Koltès, grand dramaturge français des années 80, et “La Fausse Suivante” de Marivaux (1985). “Les chemins de Koltès sont infinis, insondables”, disait-il. Il s’associa également à Luc Bondy dans “Terre étrangère” d’Arthur Schnitzler (1984), “Le Conte d’hiver” de Shakespeare (1988), ou encore “John Gabriel Borkman” d’Ibsen (1993). En 1997, il a été dirigé par Bob Wilson sur un texte de Marguerite Duras, “La maladie de la mort”. Son interprétation du “Roi Lear” de Shakespeare avec la mise en scène d’André Engel en 2006 au Théâtre de l’Odéon a été saluée. En 2009, devant les étudiants de l’École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre, il évoquait le trac d’acteur. “Pendant toutes les répétitions, j’ai un trac fou, au point quelques fois de vouloir lâcher et de dire à haute voix je n’y arriverai jamais; et dès que je suis devant le public (…) le trac s’en va”. Son conseil aux comédiens en herbe? “Je crois qu’il faut être un éternel débutant; un éternel curieux, un éternel étonné; il ne faut pas s’installer dans un confort de petites ou de grandes réussites”. Cet éclectisme dans ses rôles reflète celui de l’artiste. Dans son dernier grand film, Habemus Papam, de Nanni Moretti, présenté à Cannes, il interprète un pape pris par le doute. L’ambiguïté restera l’empreinte laissée par ses rôles et son génie pour les interpréter. Il mettra en scène pour le théâtre Une vie de théâtre de David Mamet en 1988 et réalisera plusieurs courts métrages avant trois longs, dont son dernier en 2005, C’est pas tout à fait la vie dont j’avais rêvé. Si ce titre sonne aujourd’hui comme une épitaphe, Michel Piccoli demeurera pour nous l’acteur rêvé. Maderpost / France Info]]>
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