Le gouvernement a encore annoncé des engagements «fermes» pour une sécurité routière, après l’accident de Sikilo, dans la région de Kaffrine, qui a fait officiellement 40 morts (un de plus déclaré hier, lundi) et une centaine de blessés. Toutefois, ces mesures donnent l’impression du déjà vu, car plusieurs autres actions ont été entreprises dans ce sens auparavant, sans que l’application ne soit définitive. Elles sont vites oubliées, quelques semaines après leur effectivité.
SECURITE ROUTIERE – Le drame de Sikilo a rappelé aux autorités qu’il est temps de mettre un terme à la saignée macabre sur les routes. Le président de la République, Macky Sall, qui s’est déplacé sur les lieux, est revenu sur la nécessité de mettre en œuvre un «Code de conduite» qui permettra de sauver les voyageurs de ces accidents récurrents. Son ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du désenclavement, Mansour Faye s’est engagé, lui aussi, dans une posture réactive, en annonçant «la prise immédiate de mesures à appliquer avec rigueur».
Seulement, cet engagement fort du gouvernement n’a rien de nouveau, si ce n’est une attitude connue et répétitive. Outre les 10 décisions que l’Etat avait prises au sortir du Conseil interministériel sur les accidents et la sécurité routière, tenu en février 2017, divers autres actes ont été posés sans que l’application ne soit rigoureuse. Pour rappel, en août 2014, afin d’organiser le transport à Dakar, la gare routière Les Baux Maraichers de Pikine avait été ouverte aux voyageurs. Tous les départs à destination de la sous-région et des villes de l’intérieur, devraient être enregistrés en ces lieux. Elle devait aussi être le point d’arrivée des véhicules de transport en commun interurbain et ceux en provenance de la sous-région.
Mais, le respect de l’injonction étatique de faire des Baux Maraichers, l’unique point de départ, n’a duré que le temps d’une rose. Moins d’une année, les transporteurs sont retournés à leurs vieilles habitudes. Les gares routières parallèles pullulent dans plusieurs quartiers. Chauffeurs, rabatteurs (coxeurs) et apprentis organisent les voyages à leur guise, sans aucun rappel à l’ordre. Baux Maraichers que l’on dit être une gare routière formelle est dans ce tohu-bohu. Le convoyage se fait sans grand contrôle. Les automobilistes n’ont aucune restriction sur la charge matérielle, surtout au niveau des portes bagages.
D’ailleurs, le ministre Mansour Faye l’a reconnu, dans sa déclaration après l’accident de Sikilo qui a causé une quarantaine de morts et une centaine de blessés. Pis, la visite technique dans les régions se fait à l’œil nue, sans donc le matériel nécessaire pour détecter les pannes et autres manquements sur les véhicules de transports de voyageurs dont bon nombre sont vétustes. Le Centre de visite technique de la capitale qui peut se targuer d’avoir les outils nécessaires pour un contrôle de qualité, est miné par des pratiques mafieuses. A plusieurs occasions, il y a été dénoncé une corruption ou des visites défectueuses. Ce qui fait que de vrais cercueils roulants continuent d’emprunter les routes de la capitale et des régions, sans que les propriétaires ne soient inquiétés. Même s’ils venaient à être immobilisés, conformément à la directive du président Macky Sall, en 2017 à Saint-Louis, suite à un accident ayant coûté la vie à 16 personnes, c’est pour juste le temps que l’émoi et l’indignation, suite à des drames, s’estompent.
Les mesures prises hier lundi, à l’issue du énième Conseil interministériel sur la sécurité routière et les accidents, peuvent aussi être influentes, étant donné que beaucoup de conducteurs ont été formés sur le tas et n’ont jamais été dans une école pour l’apprentissage des règles de conduite (Code de la route). Du coup, l’indiscipline se vit au quotidien dans le secteur des transports publics de voyageurs. L’Etat n’est pas aussi parvenu à instaurer un système «répressif très dissuasif», appuyé en amont par la prévention.
Pourtant, sur les routes, on note en permanence des actes qui favorisent le respect des Forces de l’ordre dédiées à remettre les conducteurs sur les rails. En atteste, avec la Covid-19, il a été instauré un manifeste dans toutes les gares routières et au niveau des nombreux points de départs des véhicules dits «horaires», avec les coordonnées de tous les voyageurs. La pratique n’existe plus. Les Sénégalais voyagent dans un flou total. L’instauration du permis à point, annoncé et salué par nombres d’acteurs, reste suspendue au bon vouloir des transporteurs qui retardent l’échéance.
Maderpost / Sud quotidien