Éducation différenciée dès le plus jeune âge, interprétations conservatrices des religions, Code de la famille « scandaleusement » défavorable… Fatoumata Bernadette Sonko énonce les multiples racines du silence imposé aux femmes sénégalaises.
AUTONOMISATION DES FEMMES – C’est une véritable charge de force qu’a entraîné dimanche Fatoumata Bernadette Sonko, enseignante-chercheuse au Cesti, dans l’émission Objection de Sud FM animée par Baye Omar Gueye. Avec une franchise désarmante, elle a énoncé le silence assourdissant imposé aux femmes sénégalaises dans les médias comme dans la société toute entière.
Son diagnostic sans concession a mis à nu les racines séculaires de cette relégation des femmes. Une éducation différenciée selon le genre dès le plus jeune âge, qui conditionne les filles à l’effacement et à la soumission pendant que les garçons sont encouragés à bâtir leur réussite professionnelle. Des pesanteurs culturels tenaces qui confinent les femmes dans l’espace privé, loin des sphères de pouvoir et de décision. Une interprétation conservatrice des religions servant de prudence idéologique à cette discrimination systémique.
Mais le plus grand coup de butoir a été porté contre le Code de la famille sénégalais, qualifié de « scandaleux » par Mme Sonko. De la puissance conjugale à la déshérence en cas d’inceste, en passant par des discriminations flagrantes comme le refus d’allocations familiales aux femmes universitaires, les exemples se sont enchaînés, démontrant à quel point ce texte fondamental participe de l’infériorisation juridique des femmes.
Face à ce lourd constat, Fatoumata Bernadette Sonko lance un vibrant appel à la révolte, exhortant les Sénégalaises à rompre les chaînes de leur silence séculaire par les armes du savoir et de l’engagement politique. « L’acquisition du savoir est une arme que les femmes doivent s’approprier », a-t-elle martelé avec force. Seule une instruction égalitaire permettra aux filles de briser le plafond de verre qui les empêchera encore d’accéder aux mêmes postes que les hommes, y compris dans les rédactions.
Mais l’émancipation ne pourra être totale que par un engagement politique massif des femmes. « Il faut que les femmes s’approprient l’arène politique et en fassent un lieu de libération, sans plus servir d’escabeaux aux ambitions masculines », a tonné Mme Sonko, appelant à une « rupture radicale » avec l’ordre patriarcal.
« Sans les femmes, rien ne marche dans ce pays », conclut Fatoumata Bernadette Sonko en rendant un hommage appuyé au rôle primordial mais trop souvent occulté des « petites mains » qui construisent la nation féminine au quotidien. « Il est temps que ces petites mains prennent la parole et fassent entendre leur voix, dans les médias comme ailleurs. »
Maderpost / Sud quotidien