C’est le rendez-vous bisannuel de la recherche contre le virus de l’immunodéficience humaine. La Société internationale contre le sida (IAS) se réunit du 18 au 21 juillet. Un congrès auquel s’est invité le Covid-19, qui impose d’ailleurs au rassemblement de se tenir de façon virtuelle, et non à Berlin comme prévu.
IAS – Des milliers de chercheurs, étudiants, politiques et militants réunis pendant trois jours pour présenter et commenter les dernières avancées de la recherche contre le VIH/Sida. Le congrès de l’IAS est toujours un moment fort dans le monde de la lutte contre la maladie.
Quarante ans après la découverte et la présentation du premier cas dans une revue scientifique, celle-ci est malheureusement toujours aussi présente. Selon le dernier rapport de l’Onusida, 40 millions de personnes étaient contaminées par le VIH en 2020. La même année, le virus en tuait près de 700 000.
Depuis quelques années, la lutte contre l’épidémie marquait déjà le pas et les progrès étaient plus lents qu’escomptés. Le Covid-19 est venu compliquer encore plus un combat qui n’était déjà pas simple au départ. Confinements, couvre-feux, restrictions de circulation… Les mesures mises en place pour contenir le SARS-CoV-2 ont eu de lourds effets collatéraux sur les malades du VIH. « Le Covid-19 a eu un impact sur les autres maladies chroniques », explique Yazdan Yazdanpanah, patron de l’ANRS maladies émergentes. « En termes de dépistage, en termes de prise en charge, il faut qu’on rattrape le temps perdu. Si les gens sont diagnostiqués plus tard, c’est moins bon pour eux-mêmes, car on met en place le traitement avec retard. Cela a également un impact sur la société. Quand on est dépisté plus tard, on transmet aussi la maladie aux autres. »
Par ailleurs, la pandémie de Covid-19 a mobilisé énormément de ressources, parfois « empruntées » à la lutte contre le VIH/Sida. Dans son rapport, l’Onusida prend l’exemple du KwaZulu Natal en Afrique du Sud : le dépistage du VIH y a diminué de 48% après le premier confinement d’avril 2020. Parallèlement, 28 000 soignantes et soignants liés à la communauté du VIH ont été réaffectés au dépistage du Covid-19. Ajoutez à cela un vaccin plus que jamais inéquitablement réparti entre pays riches et pauvres et le tableau s’assombrit encore plus.
Une situation qui a poussé Winnie Byanyima, la directrice exécutive de l’Onusida, à monter au front : « Les pays riches d’Europe se préparent à profiter de l’été, car leur population accède facilement aux vaccins contre le Covid-19, tandis que les pays du Sud traversent une crise partout dans le monde ». Elle poursuit : « Nous ne tirons aucun enseignement du VIH, lorsque des millions de personnes se sont vu refuser des médicaments vitaux et sont mortes à cause des inégalités d’accès. C’est totalement inacceptable. »
Un traitement pour guérir du VIH ?
C’est dans ce contexte difficile que s’ouvre donc ce nouveau congrès dédié à la recherche contre le VIH/Sida. Quelques éclaircies y sont à attendre en provenance des laboratoires. En effet, si on sait très bien traiter aujourd’hui le VIH/Sida – un malade qui contrôle sa charge virale ne pourra pas transmettre la maladie –, on n’en guérit pas. Si de très bons outils, comme la Prep, existent pour prévenir l’infection, il n’y a toujours pas de vaccin. Sur le front de la guérison, une étude qui apporte une approche novatrice sera présentée cette semaine.
À la manière de ce qui se fait contre le cancer, il s’agit d’immunothérapie et les résultats sont encourageants même si très préliminaires. « Cela a été réalisé avec un groupe de 28 singes », explique Steven Deecks, de l’université de San Francisco, en Californie. « Ce modèle est assez proche de ce qui se passe chez l’homme. Les auteurs ont infecté ces singes et ont attendu pour que l’infection devienne chronique. » Les primates ont ensuite reçu, dans un premier temps, une thérapie antirétrovirale classique avant de recevoir de l’immunothérapie. « Chez les singes qui ont reçu ce traitement, 80 % ont pu contrôler le virus de façon robuste. C’est une preuve de concept : dans une situation d’infection chronique, nous avons donc la capacité de manipuler le système immunitaire pour qu’il contrôle le virus. C’est le Graal dans la recherche d’une cure contre le VIH ». Cette nouvelle approche suscite ainsi beaucoup d’espoirs, même s’ils restent encore mesurés. Il faut en effet passer la barrière du singe à l’homme, et les premiers essais devraient commencer sous peu.
En attendant des avancées sur le sujet, l’autre angle mort de la lutte contre le VIH/Sida concerne le vaccin, toujours pas développé efficacement. Sur ce sujet, aucune avancée n’est attendue, mais Yazdan Yazdanpanah ne désespère pas : le remarquable succès des vaccins à ARNm développés contre le Covid-19 donne des idées aux chercheurs. « Même si des équipes travaillaient dessus, de plus en plus de personnes s’intéressent à ces plates-formes vaccinales. On n’y est pas encore, mais je pense que l’épidémie de Covid-19 permet de se réorienter vers des typologies de vaccins qu’on utilisait moins contre le VIH. Est-ce que ça va permettre d’y arriver ? Sincèrement, je ne peux pas vous le dire. Mais ce sont des pistes intéressantes. »
Améliorer l’existant
Guérison et vaccin mis à part, la communauté dispose tout de même de remarquables outils pour faire face à l’épidémie de VIH/Sida. En matière de prévention, la PrEP, la prophylaxie préexposition, n’en finit pas de démontrer son efficacité. Elle se heurte néanmoins à un problème d’adhérence : lourde à prendre, les patients finissent par la délaisser.
De nouveaux résultats d’une étude sud-africaine montrent cependant que la solution d’un anneau vaginal de six mois pour les jeunes femmes (la population la plus à risque en Afrique sub-saharienne) montre des taux d’acceptabilité bien plus élevés que les traditionnels comprimés.
Les recherches menées sur les traitements sont également toujours dans cette idée d’améliorer l’existant. Bien suivies, les trithérapies sont aujourd’hui redoutablement efficaces et permettent de rendre la charge virale d’une personne malade indétectable. Mais là aussi, il s’agit d’une solution lourde, contraignante et parfois coûteuse. Son implantation sur le terrain s’en trouve donc parfois compliquée. C’est pour cette raison que la piste de la bithérapie est également étudiée. Plus simple, il faut cependant s’assurer qu’elle conserve la même efficacité.
Maderpost / Rfi