France 24 sera-t-elle le bras armé de la France dans la guéguerre entre Macron et Macky Sall ? Rien ne va plus en tout cas entre France 24 et le gouvernement du Sénégal que la chaîne semble avoir pris en grippe dans ce qui ressort d’un bras de fer géopolitique qui ne dit pas son nom, que Maderpost avait pourtant prévenu.
POLITIQUE – Cette fois, c’est dans le cadre de la migration que se signale ce lundi 10 juillet 2023 la chaîne d’information de télévision française du groupe France Télévision appartenant à l’Etat français. « Au moins 300 personnes sont portées disparues en mer, par suite de la disparition de trois embarcations parties du Sénégal pour rejoindre les îles Canaries, selon un signal lancé dimanche par une association », renseigne-t-elle non sans évoquer les troubles politiques qui ont secoué le pays en juin.
Selon la présentatrice de la chaîne, des familles des migrants contactées par l’association ont affirmé que c’est à cause des « récents troubles politiques qui ont secoué le pays » que les migrants disparus « ont choisi de quitter le Sénégal ».
L’intérêt particulier des médias français pour le Sénégal a pris de la vitesse en 2022 avant de s’accélérer ces dernières semaines, après de brouilles, un tantinet plus poussé cette fois. Le Président Macky Sall, non-candidat à la présidentielle du 25 février 2024, a signifié son agacement vis-à-vis de son homologue français dans une interview accordée au quotidien français Le Monde.
Pour qui roule la France ?
Macky Sall a fait savoir qu’il n’avait pas apprécié que Macron ait pris la liberté de dépêcher une conseillère de l’Elysée auprès de son opposant le plus farouche, en l’occurrence Ousmane Sonko, sans l’en avertir. Cette visite d’un émissaire français n’est pas la première d’ailleurs, puisqu’il y en a deux autres, a précisé le chef de l’Etat sénégalais.
Macky Sall a beau vouloir relativiser la tension de plus en plus perceptible avec Macron que France 24 n’en rate plus une pour faire passer le Sénégal pour une destination à risque. Le moins que l’on puit dire est que la chaîne appartenant à l’Etat français ne lâche pas prise, exerçant une pression qui finit quand même par imposer plusieurs questions : que veut la France. Macron veut-il plus que la renonciation déjà actée du Président Macky Sall à la présidentielle de 2024 ? Macron insiste-t-il pour la participation d’Ousmane Sonko à la prochaine présidentielle après que son homologue sénégalais a clairement laissé entendre que le leader de Pastef n’est pas près d’y participer ? Quel intérêt de la France pour le même Sonko ? Le chef de l’Etat de la République française redouterait-il de nouvelles secousses qui porteront de lourds préjudices aux investisseurs et brands français établis à Dakar ?
Le 5 août 2022, dans un article titré « Le Sénégal, une vitrine en danger » le site Le Monde parlait d’une « polarisation politique dangereuse pour la stabilité du pays. « Dernier test avant l’élection présidentielle de 2024, les législatives du 31 juillet ont mis en lumière une polarisation politique dangereuse pour la stabilité du pays ».
« Les ingrédients d’une crise postélectorale semblent réunis au Sénégal, après la tenue des élections législatives, dimanche 31 juillet. Un pouvoir dont la majorité ne tient plus qu’au ralliement d’au moins un député, une opposition qui dénonce un hold-up et menace de ne pas se laisser « confisquer la victoire ». La question est désormais de savoir si la contestation se jouera devant la justice ou se déversera dans les rues. Depuis mars 2021, la vie politique a provoqué la mort d’au moins dix-sept Sénégalais », poursuivait Le Monde.
Le plus intéressant est suivre : « Déjà en souffrance au Mali, la France peut s’inquiéter de sa relation avec le Sénégal, pays avec lequel elle entretient une intimité complexe. Macky Sall, actuel président de l’Union africaine, est un partenaire privilégié, qui défend aussi les intérêts de son pays et de son continent. Après Vladimir Poutine, il devrait rencontrer Volodymyr Zelensky en août. Un an avant son entrée programmée dans le club des producteurs de pétrole et de gaz, le Sénégal attise aussi les convoitises.
Jusqu’où ira la France
Il y a moins d’une semaine, le même titre écrivait : « Le geste salutaire de Macky Sall constitue un double avertissement. Aux militaires qui étendent leur emprise sur l’Afrique de l’Ouest et aux puissances étrangères qui, de la Russie à la Chine, tentent de convaincre les Africains que la démocratie n’est pas faite pour eux. Il ancre le Sénégal dans le club des pays où l’Etat de droit garantit la stabilité et commande le respect de la communauté internationale. Mais l’hommage général rendu à un dirigeant qui n’a fait que respecter la Constitution de son pays donne la mesure de l’état général inquiétant de la démocratie en Afrique de l’Ouest. »
Le 7 août 2022, Charles Faye, directeur de publication de Maderpost signait : « L’édito du journal Le Monde dont les morceaux choisis renvoyant aux dernières élections indiquent que « si les législatives avaient valeur de referendum sur une éventuelle à un troisième mandat présidentiel en 2024, le message est là : plus de la moitié des votant se sont portés sur l’opposition. », permet au moins un constat. Les médias français qui se gardent d’exprimer un courant contraire à la France/Afrique battant le plein de ses intérêts au détriment des pays et peuples africains, sont toujours le bras de communication de la puissance de l’ancienne colonie dont les approches néocolonialistes reposent sur sa puissance d’information et de communication. »
Onze mois après, France 24 vient prouver les craintes du journaliste. Reste à voir si le Sénégal fera comme le Burkina Faso qui avait suspendu la chaîne française.
Maderpost

