Le procureur de Manhattan va demander à la Cour Suprême de New York d’annuler les condamnations de Muhammad Aziz et Khalil Islam pour l’assassinat en 1965 du célèbre militant radical de la cause noire aux États-Unis.
JUSTICE – C’un rebondissement judiciaire majeur qui ravive une cicatrice de l’histoire américaine. Plus de 50 ans après l’assassinat à New York du militant de la cause noire Malcolm X, le procureur de Manhattan veut innocenter deux hommes condamnés pour son meurtre.
“Ces hommes n’ont pas eu droit à la justice qu’ils méritaient“, a déclaré le procureur Cyrus Vance dans le New York Times, qui a révélé, mercredi 17 novembre, l’information.
De son côté, The Innocence Project, une organisation qui lutte contre les erreurs judiciaires, a annoncé qu’elle déposerait jeudi devant la Cour suprême de New York un “dossier conjoint” avec le procureur et les avocats des deux hommes pour obtenir l’annulation des condamnations en 1966 de Muhammad Aziz et Khalil Islam.
Selon une source proche du dossier, il appartient à la Cour suprême de valider cette demande.
Le bureau du procureur a confirmé, sans aucun autre commentaire, qu’une conférence de presse aurait lieu jeudi sur l'”annulation des condamnations injustifiées de deux personnes pour le meurtre de Malcolm X”.
Selon le New York Times, Muhammad Aziz, 83 ans, était sorti de prison en 1985, et Khalil Islam, libéré après avoir purgé sa peine en 1987, est mort en 2009. Tous deux membres à l’époque de “Nation of Islam“, le mouvement dont Malcolm X était une figure et qu’il venait de quitter sur fond de tensions de plus en plus fortes, ils avaient été condamnés avec un troisième militant.
Malcolm X (également connu sous son nom musulman, El-Hajj Malik El-Shabazz) était tombé sous les balles de plusieurs tireurs le 21 février 1965, lors d’un discours à l’Audubon Ballroom, une salle de spectacle de Harlem.
Même s’il était un personnage controversé et radical, son meurtre avait secoué les États-Unis, symbolisant les tensions politiques et sociales du pays dans les années 60, également marquées par l’assassinat du président Kennedy, en 1963, et celui d’une autre figure de la défense des droits civiques, Martin Luther King, en 1968.
Dissimulation de preuves
“L’enquête de 22 mois menée de manière conjointe par le bureau du procureur et les avocats des deux hommes révèle que les procureurs”, le FBI et la police de New York (NYPD) “ont dissimulé des preuves cruciales qui, si elles avaient été connues, auraient probablement conduit à l’acquittement des deux hommes“, écrit le New York Times.
Dans le détail, le quotidien new-yorkais fait état d'”un grand nombre de documents du FBI impliquant d’autres suspects” et “des notes des procureurs montrant qu’ils ont omis de divulguer la présence d’agents infiltrés dans la salle au moment de la fusillade“. Selon le New York Times, un témoin toujours vivant a aussi confirmé aux enquêteurs de l’équipe Vance l’alibi de Muhammad Aziz, qui assurait être chez lui au moment du meurtre
En février 2020, après la diffusion d’un documentaire sur Netflix (“Who Killed Malcolm X?”), soulevant à nouveau des doutes sur la culpabilité de Muhammad Aziz et Khalil Islam, Cyrus Vance avait demandé à ses équipes un réexamen du dossier.
“Ce que nous pouvons faire, c’est reconnaître cette erreur, la gravité de cette erreur”, a ajouté Cyrus Vance dans le New York Times. Ce rebondissement judiciaire risque de renforcer la thèse du rôle trouble joué par le FBI et la police de New York à l’époque. En février 2021, une lettre posthume et accusatrice d’un policier avait été dévoilée et les filles de Malcolm X avaient déjà demandé la réouverture de l’enquête.
Le policier affirmait s’être rapproché, à la demande de sa hiérarchie, de l’entourage de Malcolm X et avoir piégé deux de ses gardes du corps, arrêtés quelques jours seulement avant l’assassinat, pour affaiblir la sécurité autour du leader noir.
Maderpost / France 24