Alors qu’elle est la première source de CO2 du système énergétique mondial, le charbon voit sa consommation repartir à la hausse du fait de la pression sur les prix du gaz et l’électricité depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine.
ENERGIE – A plus de 8 milliards de tonnes estimées en 2022, elle devrait dépasser le précédent de record de 2013.
C’est une mauvaise nouvelle pour le climat : la consommation mondiale de charbon devrait atteindre un nouveau record en 2022, selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) publié ce vendredi.
Cette consommation mondiale devrait croître de 1,2% par rapport à l’an dernier, à plus de 8 milliards de tonnes, battant un record de 2013, selon le rapport annuel sur le charbon élaboré par l’institution.
Cette demande globale devrait ensuite se maintenir à peu près à ce niveau jusqu’à 2025, « en l’absence d’efforts supplémentaires pour accélérer la transition énergétique », estime l’AIE.
En effet, le charbon, énergie la plus nocive d’entre toutes est, de loin, la première source de CO2 du système énergétique mondial et va donc le rester, dans l’immédiat.
L’Allemagne remet en question son plan de sortie du charbon
Mais il reste également une énergie peu chère alors que les prix du gaz et de l’électricité ne cessent de grimper depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine.
L’arrêt de l’approvisionnement par la Russie a, également, fait planer sur l’Europe le risque d’une pénurie de gaz pour l’hiver. Certains pays ont donc fait le choix de se tourner, de nouveau, vers le charbon pour produire de l’électricité malgré qu’ils aient, en amont, décidé de s’en passer définitivement.
C’est le cas par exemple de l’Allemagne où la production avait déjà bondi de 40% de janvier à août. Deux ans plus tôt, le pays s’était pourtant lancé dans un plan de sortie du charbon en 2030 en se dotant d’un calendrier et en prévoyant des indemnités pour l’arrêt de ses centrales à charbon, étape importante vers l’abandon de cette énergie très polluante entre 2035 et 2038.
Cette année, l’une des usines alimentant le marché en Allemagne, basée dans le bassin rhénan, a d’ailleurs cessé sa production à la fin de l’année, réduisant l’offre.
De manière générale, c’est l’Europe toute entière, qui devrait, de son côté, voir sa consommation de charbon augmenter en 2022 pour la deuxième année consécutive.
Du côté de la Chine, qui représente 53% de la consommation mondiale, la demande a, à l’inverse, pâti, d’une part, des confinements liés au Covid, mais sécheresse et canicule ont aussi dopé les besoins de climatisation et réduit le recours possible à l’hydroélectricité.
L’AIEA prévoit néanmoins une demande toujours « robuste » en Asie.
Les prix du charbon ont pourtant crû à des niveaux jamais vus, en mars, puis en juin, dans la foulée des prix du gaz mais aussi de difficultés de production de l’Australie, un fournisseur clé.
Les trois principaux producteurs mondiaux – Chine, Inde et Indonésie – ont néanmoins tous battu cette année leurs records de production.
Vers « un plus haut historique » de la demande en charbon cette année
« Le monde est proche d’un pic dans son usage de l’énergie fossile, avec en premier le déclin attendu du charbon, mais nous n’y sommes pas encore », résume Keisuke Sadamori, directeur des Marchés et de la sécurité énergétiques à l’AIE : « la demande de charbon résiste et atteindra probablement son plus-haut historique cette année, poussant les émissions mondiales à la hausse ».
« En même temps, de nombreux signaux montrent que la crise actuelle accélère aussi le déploiement des renouvelables, l’efficacité énergétique, le recours aux pompes à chaleur », ajoute l’expert, pour qui « les mesures gouvernementales seront déterminantes » pour accélérer ce mouvement.
Autre signal positif, le rapport ne voit aucun mouvement d’investissements en faveur de projets destinés à l’export. « Cela reflète la prudence des investisseurs et des compagnies minières quant aux perspectives du charbon sur les moyen et long termes », souligne l’agence, créée en 1974 par l’OCDE pour conseiller les Etats dans leur politique énergétique.
Maderpost / La Tribune