Pour la quatrième fois en moins de deux ans, les Israéliens doivent élire leurs députés. Personnalité très clivante, le Premier ministre actuel est encore une fois candidat à sa propre succession. Mais Benyamin Netanyahu, « Bibi », comme le surnomment les Israéliens, n’arrive plus à trouver de majorité pour gouverner.
ISRAEL -Le système israélien est fondé sur la proportionnelle intégrale. On vote en un tour pour élire 120 députés à la Knesset. Pour gouverner, il faut obtenir au moins 61 sièges. C’est mathématique. Sur le papier, c’est simple.
Mais dans la vraie vie, ce n’est pas aussi évident. Plus aucun parti n’arrive à obtenir cette majorité. Il y a des jeux d’alliances, mais ils sont trop fragiles pour tenir.
Philippe Velilla, universitaire franco-israélien, plaide pour un changement de modèle électoral. « Malheureusement, les Israéliens n’en sont pas toujours conscients, mais moi je fais partie de ceux qui pensent que ce système électoral est complètement dépassé », explique ce spécialiste, basé à Tel-Aviv. « Il faudrait changer de système et mettre en place un système majoritaire.
On pourrait prendre le système américain, le système anglais ou le système français, à deux tours. Parce que nous vivons une crise depuis deux ans et demi. Depuis moins de deux ans, nous en sommes aux quatrièmes élections », déplore-t-il. « Et les sondages nous laissent penser qu’on pourrait arriver à une égalité parfaite entre les pro-Bibi et les anti-Bibi, et donc aller vers des cinquièmes élections. C’est une possibilité qui n’est absolument pas à exclure », s’inquiète Philippe Velilla.
Le règne de Bibi
Benyamin Netanyahu est au pouvoir depuis douze ans. Sachant qu’il a également été Premier ministre à la fin des années 1990, en tout il cumule quinze années de règne en Israël. « Même David Ben Gurion, le père fondateur d’Israël, n’était pas resté aussi longtemps au pouvoir », remarque Stéphane Wahnich, chercheur à l’université de Tel-Aviv.
« On est en train de gérer la fin du grand homme [Benyamin Netnayhu], et c’est compliqué, parce que le grand homme souhaite encore garder le pouvoir. Et en même temps, une majorité, y compris au sein de la droite israélienne, ne veut plus de lui. En réalité, c’est ça qui constitue le problème, ce n’est pas le régime de la proportionnelle intégrale. C’est plutôt la problématique de la fin de Netanyahu », analyse l’ancien professeur associé de l’université Paris-Est-Créteil.
Bibi au pouvoir ou en prison ?
Le Premier ministre israélien est empêtré dans plusieurs affaires judiciaires. Il est inculpé pour des faits criminels : corruption, fraude et abus de confiance. Son procès s’est ouvert il y a près d’une année. Mais un chef du gouvernement est protégé par sa fonction, rappelle Stéphane Wahnich. « Tant qu’il est Premier ministre, il ne peut pas être jugé. Le pouvoir judiciaire ne peut pas empêcher un Premier ministre, élu légalement, de continuer son travail. C’est seulement s’il n’est plus à ce poste qu’il peut être jugé. De ce fait, il faut qu’il reste, d’une manière ou d’une autre, Premier ministre. Et il y a deux façons de rester Premier ministre : soit il trouve une nouvelle coalition, soit il n’y pas de majorité et il garde son poste de Premier ministre par intérim », conclut le politologue.
Mais pour Philippe Velilla, essayiste franco-israélien, les soucis judiciaires de Benyamin Netanyahu ne sont pas un enjeu de ce scrutin pour les Israéliens. « Benyamin Netanyahu connaît des ennuis judiciaires depuis plusieurs années, ça n’a jamais interféré dans le choix des électeurs », souligne-t-il. « Ceux qui le soutiennent sont complètement indifférents à cette question. Et ceux qui s’opposent à lui sont attentifs à ce problème. Mais il ne perd pas des voix à cause de cela. Benyamin Netanyahu domine de la tête et des épaules à la fois son camp, mais aussi la scène politique israélienne. Donc, à partir de là, il n’est pas étonnant que les Israéliens se prononcent pour ou contre lui. »
Ces élections législatives, les quatrièmes en moins de deux ans, prennent des allures de référendum. Les sondages donnent Bibi en tête des intentions de vote, sans toutefois qu’il obtienne de majorité claire pour le moment.
Maderpost/ RFI