Les Indiens se perdent en conjectures à la suite de rumeurs selon lesquelles les autorités prévoient d’abandonner l’utilisation officielle du nom anglais de leur pays, « India ».
INDE – C’est une invitation adressée aux dirigeants du G20, qui désigne le pays par « Bharat », et non par « India », qui a mis le feu aux poudres.
« Président du Bharat »
Le gouvernement de Narendra Modi s’est attelé à supprimer un à un les symboles persistants de la colonisation britannique dans le paysage urbain, les institutions politiques et les livres d’histoire du pays, devenu cette année le plus peuplé du monde.
Narendra Modi lui-même recourt généralement, quand il parle de l’Inde, au mot « Bharat », dérivé du sanscrit « Bhārata » des anciens textes hindous. Bharat est déjà l’un des deux noms officiels du pays, en vertu de sa Constitution.
Les membres du BJP, le parti nationaliste hindou au pouvoir, font régulièrement campagne contre l’utilisation du nom d’« Inde », qui trouve ses racines dans l’Antiquité occidentale, et a été imposé par le Royaume-Uni à l’ère coloniale.
Le week-end prochain, New Delhi accueillera un sommet du G20 couronné par un dîner d’État offert, selon les cartons d’invitation officiels, par le « président du Bharat ». Pour la première fois, le nom « India » n’est même pas mentionné.
Le gouvernement a convoqué une session extraordinaire du Parlement pour plus tard dans le mois, tout en restant discret sur son programme législatif. Or, selon une télévision locale, les parlementaires du BJP présenteraient à cette occasion une résolution spéciale en vue de donner la prééminence au recours officiel au terme « Bharat ».
Les rumeurs concernant ce projet hypothétique ont suffi à susciter un mélange de réactions offusquées chez les adversaires de Narendra Modi, et de soutiens enthousiastes dans d’autres milieux.
« J’espère que le gouvernement ne sera pas assez stupide pour se passer complètement de ‘l’Inde », a ainsi commenté Shashi Tharoor, un responsable du parti du Congrès (opposition). « Nous devrions continuer à utiliser les deux mots » et ne pas renoncer à « un nom chargé d’histoire, un nom reconnu dans le monde entier », a-t-il ajouté.
Inversement, l’ancien joueur de cricket Virender Sehwag s’est félicité de la perspective d’un tel changement d’appellation et a exhorté le conseil de cricket indien à commencer à mettre « Bharat » sur les uniformes des équipes. « Inde est un nom donné par les Britanniques, et il est grand temps de retrouver notre nom d’origine ‘Bharat’ », a-t-il estimé.
Les deux noms sont dérivés du sanskrit
Le mot « India » (Inde, en français), a connu lui-même une trajectoire complexe avant de devenir le nom officiel du pays sous la domination britannique.
Il provient du sanskrit « Sindhu », qui désignait le fleuve Indus. Il a été transposé en « India » en grec, puis en latin, pour désigner la région à l’est de l’Indus, et c’est sous cette forme que les Britanniques se référaient au pays.
Le nom « Bharat » est dérivé quant à lui du sanskrit « Bhārata », et proviendrait du nom de l’empereur mythique Bhārata Chakravartin. Dans les anciens textes sanscrits, le terme désignait l’ensemble du sous-continent indien.
Depuis l’indépendance du pays en 1947, les gouvernements indiens de diverses obédiences ont cherché à effacer les traces de l’ère coloniale britannique en débaptisant des routes, et même des villes entières.
Le processus s’est intensifié sous la férule de Narendra Modi, au pouvoir depuis 2014, qui souligne régulièrement dans des discours publics la nécessité pour l’Inde d’abandonner les relents de la « mentalité coloniale ».
Maderpost / Tf1info