Quand une bataille mortelle se joue dans la sphère politique entre frères-ennemis, il est à redouter les déchirures.
En effet, Sonko a dit à la surprise générale qu’un leader de la coalition était en train de trouver un accord secrètement avec le président de la République, Macky Sall. En riposte Barthélémy Toye Dias a informé le peuple sur le fait que Sonko était non seulement tenu informé, mais mieux, il faisait partie de ceux qui l’ont demandé.
Cette première étape d’attaque-contrattaque s’est soldée par une mise en garde du leader de Pastef. En effet, s’il ressortait alors Barthélémy Toye Dias reviendrait à la charge et cette fois-ci avec des preuves très compromettantes.
Connaissant les deux hommes, nous savions que l’histoire était loin d’être terminée. Une chose était sûre, Ousmane Sonk avait perdu un avantage de taille au niveau de la capitale sénégalaise. Par conséquent, il devait se reconstituer autrement. Le procès pour viol était une aubaine.
Il fallait faire croire à toute une région qu’un digne fils venait solliciter leur protection. Comme un seul homme, toute la Casamance s’est mobilisée pour sécuriser son domicile alors même qu’aucune ordonnance de prise de corps n’a été délivrée. Toute une communication a été orchestrée tout autour. Pastef et Ousmane Sonko en sont sortis plus forts. Dès lors, il fallait tenter le tout pour le tout afin d’amener les Sénégalais à venir lutter au niveau de Dakar.
Le 29 mai Ousmane Sonko est passé au deuxième round, en adressant une seconde attaque à Barthélémy Toye Dias. Des attaques dont lui seul a le secret. À l’image des bombes à retardement. Cette fois le complot ne désignait plus Macky mais bien une personne non identifiée. Un acteur politique hors de soupçon. Une cible qu’Ousmane Sonko voulait faire plier par le chantage. Il s’agissait bien de Barthélémy Toye Dias. Il est celui qui voulait aller au dialogue pour non seulement écarter la candidature du leader de Pastef, mais également faire passer la sienne. Autrement dit, tout était réglé jusqu’à la question du Conseil constitutionnel.
Mais voilà coup de théâtre, en ce 30 mai, veille de l’ouverture du fameux dialogue national, Barthélémy Toye Dias donne une interview phénoménale. Il commence par montrer ses réticences à venir à un dialogue alors que la question du troisième mandat n’est pas préalablement inscrite. Mieux, il parle de la libération des détenus politiques alors que ces derniers sont majoritairement des partisans de Pastef. Il fait plus fort, en exigeant que tout le monde puisse participer aux futures élections.
Ici il gagne encore des points en montrant qu’il est tout sauf un traitre, sinon il ne prendrait pas en compte les intérêts de Sonko. Au vu de son plaidoyer, il ne saurait être un vendu. Il va plus loin, en montrant que même s’il a des conditions avant de dialoguer, le dialogue est capital.
En cas d’anarchie le pouvoir sera récupéré par notre armée. Par ailleurs, le pouvoir ne saurait être affaibli que si les manifestants sont armés, chose qu’il refuse catégoriquement. Il dit aussi que la capitale ne saurait basculer dans la violence alors qu’il est à la tête de la mairie. Il menace de façon à peine voilée Ousmane Sonko et ceux qui voudraient revenir attaquer son domicile.
Il parle à demi-mots des versements « venus de l’é…..er » pour recruter des casseurs. Les preuves sont là mais ce n’est pas le moment de les sortir. Ce qui est sûr, un troisième round aura bel et bien lieu.
En tout état de cause, le temps est compté pour tous les deux. L’un verra les jours passer comme des minutes dès le prononcé du verdict du tribunal. Avant le 17 juin au plus tard, une porte de sortie devra être offerte à Ousmane Sonko où il sera obligé en cas de condamnation par contumace d’aller se constituer prisonnier. Dans cette optique, il devra tirer toutes ses dernières cartes avant de se voir placer en détention pour une durée qu’il ne saurait estimer légitiment.
En effet, en prison il n’aura plus une main sur sa communication et Barthélémy Toye Dias serait le seul roi de la rue. C’est pourquoi, il doit le faire tomber ça sera avant d’être mis aux arrêts.
Par contre, Barthélémy Toye Dias est acculé par le temps, mais cette fois pour d’autres questions : comment va-t-il à la fois légitimer aux yeux du peuple l’épouvantail de l’armée confisquant le pouvoir ; et épuiser tous les espoirs de voir la candidature effective de khalifa avant septembre.
Oui, impérativement il faudra trouver un motif valable pour verser une caution en septembre afin de pouvoir éventuellement présenter sa candidature en décembre au cas où. Sachant que d’ici là, la route vers le palais sera complètement dégagée. Le dialogue national aura rempli sa mission de faire diversion. Pourquoi débattre d’une question quand les principaux protagonistes sont déjà d’accord sur les réponses.
En définitive, même le peuple ne veut pas se lancer dans une bataille suicidaire. Les acteurs politiques savent jouer avec des éléments factuels pour mieux agiter le syndrome de la manipulation chez le frère-ennemi alors que tous les deux savent déjà l’issue de la guerre. Un audacieux et fougueux soldat ne saurait réinventer l’art de la guerre surtout quand sa culture dans le domaine est trop limitée.
Une chose devient évidente : on ne se relève jamais de certaines défaites. Aujourd’hui est né le futur président du Sénégal. À l’image de notre premier président Senghor, il n’était pas le plus intelligent, mais celui qui inspire le plus de garanties tant pour le pouvoir que pour cette paix qui nous semble si fragile.
Bassirou Turpin