A moins de dix jours du début de la campagne électorale pour les Locales, Macky Sall, dont le parti est engagé dans le processus, a délivré pour cette fin d’année, un discours-bilan clos par un appel à un scrutin apaisé.
DISCOURS A LA NATION – Pour la fin 2021, on prend les mêmes items et on recommence. Ce qui est fait, ce qui est en train d’être fait et ce qui est en cours. Le tout rehaussé d’un «nous » qui donne au téléspectateur-électeur le sentiment de participer au projet. Le traditionnel discours à la Nation n’est désormais plus qu’un exercice de discours-bilan parfaitement maîtrisé par le président de la République. Une allocution toujours articulée autour d’une pédagogie explicative qui permet de mieux s’attarder sur les réalisations, d’exposer les chantiers et d’effleurer les manquements. A ce jeu, Macky Sall est maintenant en total contrôle. Confiance et maîtrise de ses dossiers ont fini de conforter cette image. Il ne lui faut d’ailleurs jamais plus de 20 minutes pour boucler son exercice de charme, même si cette année, il a débordé. Deux minutes de plus qu’il a utilisées pour changer de registre et être dans un discours-appel. La raison est d’importance : le Sénégal qui vient de sortir d’une année politique violente, s’achemine vers des élections, alors que les esprits ne sont pas tout à fait calmés. « Nos convictions et nos choix peuvent être différents. Mais pour l’histoire et le destin qui nous unissent, nous sommes tenus de préserver la paix, la sécurité, l’unité et la stabilité de notre pays », dit le chef de parti, après avoir, en thèmes précis, assommé ses adversaires de ses “exploits” présidentiels.
Santé. Deux registres de communication permettent aux hommes politiques de convaincre les électeurs-téléspectateurs : le registre rationnel et celui émotionnel. Macky Sall qui utilise très peu le dernier a été obligé par les circonstances d’en faire usage l’année dernière. Le Sénégal sortait alors d’une année éprouvante, avec la crise sanitaire et ses conséquences dans tous les secteurs de l’économie. Dans son adresse de fin d’année, le Président s’est voulu rassembleur et au leadership politique, il a substitué l’empathie critique. Le but étant de rassurer ses administrés. Toute son allocution était alors centrée sur le Covid-19, les mesures barrières, les capacités de résilience de l’économie, de la société etc. Pour ce discours, à peine un paragraphe pour parler de la pandémie avec un rappel des bons gestes expédié en une phrase. Macky Sall a préféré s’attarder sur « les importants investissements consentis par l’État », entre autres, cinq hôpitaux dotés d’équipements de dernières génération, acquisition d’équipements pour le traitement du cancer. Attendu sur le recrutement dans le milieu hospitalier, il a aussi égrené une suite de chiffres : 500 médecins, 1000 personnels paramédicaux, 45 médecins, 400 infirmiers et 400 sages-femmes.
Pouvoir d’achat. C’était l’écueil. Avec 38 %, de pauvreté monétaire, 6 millions de pauvres en plus, 186 869 FCFA comme seuil annuel de l’extrême pauvreté et 97 000 FCFA comme salaire de base, il était difficile d’expliquer aux Sénégalais la flambée des prix sur les denrées de première nécessité. Et Macky Sall n’a pas vraiment essayé ou alors n’a t-il pas dit ce qui ne se savait pas déjà. Pour atténuer l’ampleur de la hausse, le Conseil national de la consommation réuni fin août dernier, avait proposé la suppression ou gel de plusieurs taxes pour une ardoise d’1 milliard 500 millions FCFA de pertes par mois de renonciation. Après avoir détaillé par le menu ces baisses, le Président a pris le parti de s’attarder sur les solutions apportées à cette inflation et basées sur l’agriculture, la pêche et l’élevage : 60 milliards FCFA d’investissements en matériels et intrants agricoles, 8, 5 milliards FCFA d’appui envers les femmes et jeunes entrepreneurs dans les filières de l’élevage, 2 257 moteurs en soutien à la pêche artisanale.
Infrastructures. Le budget de 298 milliards FCFA demandé en 2021 par le ministère des Infrastructures, des Transports et du Désenclavement a, en partie, permis au Président d’enfin inscrire la première phase de la ligne du TER dans son bilan 2021. La hausse de 8 milliards pour cette année devrait largement profiter à son autre projet phare : le Bus rapide transit. Dans la planification pluriannuelle, le Brt hérite d’un budget revalorisé de 27 milliards, soit 61 milliards au total. Une hausse qui devrait permettre au projet d’être livré cette année. Du reste, Macky Sall attend aussi la livraison de 29 autres chantiers dans les secteurs développement, gestion et entretien des infrastructures routières, dont la gare Petersen, les autoponts Keur Massar et Cambéréne, l’axe routier Sénoba-Ziguinchor-Mpack, la route Goudiry-Kidira-Bakel… «Conformément à notre politique d’équité territoriale, nous avons aussi démarré un Programme spécial de désenclavement portant sur plus de 2 500 Km de routes sur l’étendue du territoire national, pour une durée de trois ans ». Le rééquilibrage de la concession de l’Autoroute à péage, qui a fait l’œuvre d’un combat citoyen, a aussi été évoqué. La renégociation va permettre à l’État de toucher 13 milliards entre 2021 et 2044, en plus de la redevance domaniale annuelle d’au minimum 80 millions en lieu et place de 1000 FCFA. Dans le domaine portuaire, Macky Sall s’est enorgueilli du chantier de Ndayane, dont la première pierre est posés aujourd’hui.
Ressources gazières et pétrolières. Initialement prévus en 2021, les premiers barils des gisements de Sangomar et de GTA sont attendus l’année prochaine. Avec une estimation de 2, 5 milliards de barils de pétrole brut pour le premier et une capacité de production de gaz naturel liquéfié de plus de 10 millions de tonnes par an, le Sénégal devrait gagner, selon le Fmi, 6 à 7 % de point Pib sur 20 ans. Une manne que tente de préserver le chef de l’État, en tenant des concertations sur le projet de loi relatif à la répartition et à l’encadrement de la gestion des recettes issues de l’exploitation des hydrocarbures. «Nous traduirons ainsi en obligation légale, l’exigence morale de solidarité intergénérationnelle », a-t-il rappelé dans son adresse.
Jeunes. Les émeutes de mars dominées par la révolte de la jeunesse avaient poussé Macky Sall à mettre en place, en avril, le Programme d’urgence pour l’insertion socio-économique et l’emploi des jeunes. Doté d’un budget de 450 milliards FCFA sur la période 2021-2023, il doit servir à l’insertion socio-économique de la tranche d’âge majorité au Sénégal. A l’heure du bilan, Macky Sall a comptabilisé 5000 enseignants, 14 centres de formation de proximité et 130 000 bénéficiaires de la Der/Fj. Pour ce qui est du chantier dans ce thème, il s’est dit fier de livrer, en février, à la jeunesse sportive, le stade du Sénégal
Ode au calme. Passé le discours rationnel, le Président a fait un petit intermède émotionnel pour appeler à des élections apaisées. Cette année, le Sénégal fera face à deux échéances : les Locales en janvier et les Législatives en juin. En mi-novembre, des leaders religieux et de la société civile ont créé une charte de non-violence pour exhorter les acteurs politiques du pouvoir et de l’opposition à la retenue et à la responsabilité dans la préservation de la paix. Une charte que la principale coalition d’opposition a catégoriquement refusé de signer. Dans son discours de fin d’année, Macky Sall a alors choisi de les prendre par les sentiments. «Allons aux élections dans le calme et la sérénité, et continuons ensuite ce vivre ensemble qui fait la force et la cohésion de la nation sénégalaise. Souvenons-nous, surtout, que les générations antérieures nous ont laissé en héritage une nation qui nous rassemble sous son aile protectrice. Si nous voulons être dignes de nos anciens, notre responsabilité, ce qui fera notre mérite et notre honneur, c’est d’entretenir ce patrimoine commun, et de l’offrir en viatique à nos enfants, afin que, de génération en génération, cette nation reste toujours debout, plus unie et plus forte. », a-t-il lancé. Une main tendue après 20 minutes de précampagne où la question du “ce qui a fonctionné”, l’a remporté sur “comment cela a fonctionné”.
Maderpost / Igfm
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