En Irak, le Premier ministre annonce la mort d’Abou Yasser al Issaoui, présenté comme le chef du groupe État islamique dans le pays. Cette annonce intervient une semaine après un double attentat très meurtrier en plein cœur de la capitale Bagdad.
INTERNATIONAL –Pour Myriam Benraad, politologue et spécialiste de l’Irak, Abou Yasser al Issaoui était un émir du groupe, quelqu’un de très important dans la mesure où il a fait ses armes assez tôt au sein de l’insurrection irakienne contre l‘occupation étrangère dans les années 2000.
« Il réapparaît avec l’assaut de l’État islamique en 2014, puis tout au long de la bataille qui sera menée par le groupe jihadiste contre une large coalition d’acteurs, et qui a pris les rênes du mouvement après notamment la mort d’Abou Bakr al-Baghdadi en 2019. Donc, c’est une perte indéniable. »
En même temps, l’État islamique prépare systématiquement la succession de ses chefs rappelle Myriam Benraad: « Donc, cette élimination n’est pas la fin du combat, loin de là. Et on peut même suspecter que dans le sillage de cette mort d’un de ses chefs, le mouvement jihadiste cherchera à se venger de ses ennemis, notamment en Irak où au cours des derniers mois, il a multiplié des attaques terroristes. »
L’État irakien dans une logique de relégitimation
Pour la politologue et spécialiste de l’Irak, les autorités irakiennes ont à cœur de montrer qu’elles agissent. Tout cela s’inscrit dans un contexte où en face, le gouvernement irakien et un certain nombre de milices chiites, qui ont mené aussi une grosse partie des combats contre les jihadistes depuis 2014, sont dans une lutte à mort contre ce mouvement.
« Chaque élimination, chaque réponse est évidemment exploitée au premier plan par l’État irakien qui par ailleurs est lui dans une logique de relégitimation, dans un contexte de grande fragilité, dans un contexte où il a été très lourdement remis en cause lors des manifestations de 2019 et où il le reste du fait notamment d’une gestion de la crise sanitaire qui est catastrophique, de l’absence de réformes, de l’absence de reconstruction dans un certain nombre de territoires », explique Myriam Benraad.
La politique précise qu’il faut tout de même prendre du recul par rapport à cette annonce: « Il est vrai qu’un commandant a été tué, mais la seule réponse sécuritaire militaire ne suffira pas, comme on le dit depuis de longues années. Il faut que cet État irakien réponde aux attentes d’une population qui reste largement abandonnée et livrée à elle-même aujourd’hui. »
Maderpost/ RFI