«Le gouvernement du Sénégal ne respecte pas pleinement les normes minimales pour l’élimination de la traite. Mais, il déploie des efforts considérables pour y parvenir.» Tel est l’un des constats majeurs effectué par le département d’Etat des Etats Unis d’Amérique. En effet, dans l’édition 2020 de leur rapport sur le trafic des personnes, «Traffikinng in persons», les services de Mike Pompéo n’ont pas fait dans la dentelle. Ils ont rétrogradé le Sénégal à la liste de surveillance de niveau 2. Une position peu reluisante.
TRAFIC – Bien qu’appréciant la récente campagne de retrait des enfants vivant de la rue, au début de la pandémie de la covid-19 au Sénégal, le département d’Etat américain déclare que «le gouvernement n’a pas démontré d’efforts globaux accrus durant la période de référence précédente.»
Dans son rapport, il indique que «le gouvernement a rarement enquêté ou poursuivi de manière proactive les trafiquants qui exploitent des enfants dans la mendicité forcée et n’a pris aucune mesure contre les responsables qui ont refusé d’enquêter sur de tels cas.» Pour lui, le Sénégal a maintenu des efforts répressifs insuffisants contre la traite.
Et pourtant, la loi 2005, sur la lutte contre la traite des personnes et les pratiques connexes, prévoit des sanctions suffisamment sévères, disent-ils. «Le gouvernement a indiqué avoir enquêté sur 12 cas de traite, poursuivi 17 suspects et condamné 5 trafiquants (…) L’un des 5 trafiquants condamnés s’était fait passer pour un maître coranique pour obliger les enfants à mendier; il a été reconnu coupable en vertu de la loi de 2005 et a été condamné à 2 ans avec sursis et une amende de 50 000 fCfa. ce qui n’était pas conforme aux sanctions prévues dans la loi de 2015», regrette l’institution américaine.
Peu ou presque pas de sanction exemplaire
Le rapport renseigne que le Sénégal a appliqué de manière persistante des sanctions incompatibles avec la loi de 2005 contre la traite des personnes condamnées. Elle déclare que les autorités n’ont pas systématiquement utilisé la loi anti-traite de 2005 pour poursuivre les trafiquants présumés. Et lorsque les responsables ont identifié un cas potentiel de mendicité forcée, ils ont souvent infligé des sanctions administratives aux auteurs présumés au lieu d’enquêter et de poursuivre pénalement l’affaire
«Au cours de la période considérée, sept cas présumés de mendicité forcée d’enfants ont été traités par voie administrative. En n’enquêtant ni en poursuivant pénalement ces affaires, le gouvernement n’a pas tenu suffisamment responsables les trafiquants», lit-on dans le rapport. Celui-ci souligne que le gouvernement sénégalais a aussi réduit ses efforts déjà insuffisants pour identifier et fournir des services aux victimes de la traite.
Des projets de loi qui dorment dans les tiroirs
Le projet de loi et ses décrets d’application destinés à moderniser les Daaras sont dans le pipeline. Mais, le département d’Etat n’est pas rassuré par leur contenu : «Pour la première fois, le gouvernement aurait la surveillance et le pouvoir d’approuver ou de refuser l’ouverture de nouveaux Daaras et de fermer ceux qui ne répondent pas aux exigences. Cependant, ni le projet de loi, ni aucun des décrets d’application n’interdisent explicitement la mendicité forcée des enfants.»
Le département d’Etat n’affiche pas non plus le satisfécit côté lutte contre le tourisme sexuel. Ils indiquent que «le gouvernement n’a fait aucun effort pour réduire la demande de rapports sexuels commerciaux». De plus, il n’a identifié aucune victime de la traite des adultes et la compréhension limitée de la problématique de la traite parmi les responsables gouvernementaux persiste», disent-ils.
ouest-africaines soumises au trafic sexuel au Sénégal
Si nos concitoyennes font l’objet de trafics à l’extérieur du pays, des filles non sénégalaises sont aussi exploités chez nous dans le commerce sexuel. Ce, «en particulier dans la région aurifère du sud-est de Kédougou où ils soumettent également nigérianes, guinéennes, maliennes et les Burkinabés au travail forcé et au trafic sexuel».
«Des femmes ouest-africaines sont soumises à la servitude domestique et au trafic sexuel au Sénégal, y compris pour le tourisme sexuel impliquant des enfants, par des touristes de France, de Belgique, d’Allemagne et d’autres pays», lit-ton dans le rapport. Celui-ci a aussi rappelé l’affaire des ukrainiennes et chinoises exploitées dans le trafic sexuel dans les bars et discothèques en 2018.
Maderpost / Igfm / Youssouf SANE