Le Nigeria n’a toujours pas réduit sa production de pétrole, conformément à l’accord convenu entre les pays de l’OPEP et la Russie en décembre dernier afin de stabiliser les prix. Engagé dans une stratégie de hausse de sa production dans un contexte économique délicat, le premier producteur de pétrole du Continent va devoir faire un choix sous la pression des principaux membres de l’organisation, notamment l’Arabie saoudite.
PETROLE – C’est l’un des premiers dossiers sur lequel est attendu le président nigérian Muhammadu Buhari, tout juste réélu pour un second mandat de quatre ans, et qu’il va devoir trancher d’ici la réunion du cartel de l’OPEP d’avril prochain à Vienne.
Le Nigeria, premier producteur de pétrole du Continent, ne s’est toujours pas conformé à la décision prise en décembre dernier par les pays de l’OPEP et les non-membres comme la Russie, afin de réduire leur production pour faire remonter les prix et stabiliser les cours qui ont connu une chute drastique à la fin de l’année 2018.
Bien que le pays soit membre de l’OPEP, la décision est difficile à prendre à Abuja, d’autant que l’économie du pays, fortement dépendante de l’or noir, sort tout juste de deux années de récession et les autorités comptaient justement sur une hausse de la production pour accompagner la stratégie de relance de l’industrie pétrolière et soutenir la croissance de la première économie du Continent.
Plusieurs pays producteurs du Continent, notamment l’Angola et l’Algérie, se sont déjà conformés à cette baisse qui devrait durer dans un premier temps six (6) mois, mais le Nigeria n’a toujours pas baissé sa production. De quoi inquiéter les principaux membres de l’OPEP, notamment l’Arabie saoudite qui fait des pieds et des mains auprès des autorités nigérianes pour que respecter la décision de l’organisation. Le 20 février dernier, en pleine campagne électorale, le roi Salman Bin Abdulaziz de l’Arabie saoudite a envoyé un émissaire spécial, Ahmad Qattan, ministre saoudien des Affaires africaines, afin d’échanger sur la question avec le chef de l’Etat nigérian.
Forcing saoudien
Selon la présidence nigériane, l’émissaire saoudien était porteur d’un message du roi Salman adressé à Muhammadu Buhari afin que celui-ci veille à ce que le Nigeria respecte les quotas qui lui ont été attribués en janvier en supprimant l’exemption des réductions de production. Le ministre Ahmad Qattan a fait savoir que son pays avait réduit sa propre production de 1,4 million de barils par jour afin de garantir la hausse des prix, soulignant toutefois que l’Arabie saoudite ne pouvait à elle seule stabiliser le marché du pétrole et en relever les prix.
Le chef de l’Etat nigérian a rassuré son homologue nigérian que son pays, «en tant que membre responsable de l’OPEP, souhaitait adhérer à l’initiative saoudienne visant à limiter la production afin que les prix montent». Toutefois, le président nigérian a mis en avant le fait que les réductions de production sont toujours difficiles pour le Nigeria, «compte tenu de la situation particulière du pays, à savoir sa nombreuse population, son immense étendue de terres et son état de sous-développement».
Le président Buhari a d’ailleurs exprimé aux émissaires saoudiens son souhait que le Nigeria «puisse produire davantage», même s’il a indiqué avoir «écouté attentivement le message des autorités saoudiennes». «Je parlerai avec le ministre d’État du Pétrole pour avoir les derniers chiffres de notre production. Je sais qu’il est dans notre intérêt d’écouter, et nous allons coopérer», a fait savoir un Buhari vaguement pessimiste, bien qu’il a reconnu que la hausse des prix du pétrole profiterait aux pays producteurs et à leurs citoyens.L
Selon les estimations du ministère nigérian du Pétrole, le pays devrait réduire sa production de 40 000 barils par jour sur un total actuel de 1,7 million de barils/jour. L’accord est entré en vigueur en janvier dernier. Mais depuis, le Nigeria a même annoncé l’entrée en activité du champ offshore d’Egina, exploité par Total, avec une production de 200 000 barils par jour, soit 10% de la production pétrolière nationale du pays. Le cas nigérian sera certainement au cœur des discussions sur l’évaluation de l’accord avec la réunion des ministres de l’OPEP prévue à Vienne les 17 et 18 avril prochain.
Pour rappel, en décembre dernier, l’OPEP avait convenu avec des pays producteurs non-OPEP d’une baisse conjointe de leur production de 1,2 million de barils/jour à partir du 1er janvier 2019, avec une réduction de 800 000 barils/jour par ses membres et de 400 000 barils/jour par les pays producteurs non membres du cartel.