Quarante jours après Pâques, place à la Solennité de l’Ascension, signe de la mission remplie du Christ-Rédempteur. Retour sur le sens de cette solennité du Seigneur, observée demain, jeudi 9 mai, avec l’Abbé Christophe Diaga Sène, de l’Archidiocèse de Dakar.
RELIGION – Depuis la Solennité de Pâques, mystère fondamental de notre foi chrétienne, quarante jours se sont écoulés. Pour ainsi dire, la mission du Christ-Rédempteur est vraiment remplie : les prédictions et prophéties sont réalisées ; la coupe amère de la trahison, des moqueries, de la mort ignominieuse, a été bue jusqu’à la lie; devant les injustices des hommes, la justice de Dieu est satisfaite, et de la haine, du péché et de la mort l’amour a triomphé.
A ses disciples, Jésus ressuscité se montre vivant après sa Passion, et, quarante jours durant, il leur apparaît les instruisant et entretenant du Royaume de Dieu (Cf. Ac1, 3). Aussi, le Christ lui-même leur confère une autorité d’origine divine, et dépose entre leurs mains les instruments de sa grâce. «Allez par le monde entier, proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création. Celui qui croira et se sera baptisé, sera sauvé ; celui qui ne croira pas, sera condamné», leur dit-il, en effet (Mc16, 15-16).
Précédemment, dans un discours d’adieu, le Seigneur Jésus rappelle aux siens le caractère spirituel de son Royaume, tout en leur promettant force, lumière et consolation dans l’Esprit Saint : «Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux confins de la terre» (Ac 1,8). Ainsi, l’Eglise est fondée, et l’œuvre du Christ se poursuivra.
Ayant alors achevé l’œuvre que le Père lui avait donné à faire (Cf. Jn 17,4), «levant les mains, [Jésus] les bénit et fut emporté au ciel» (Lc 24,50-51), dans la splendeur rayonnante de sa divinité et «parmi l’acclamation et aux éclats du cor» (Ps 46).
«JE T’AI GLORIFIE SUR LA TERRE ; J’AI ACHEVE L’ŒUVRE QUE TU M’AS DONNE A FAIRE…»
Si Donc le départ d’êtres chers nous plonge dans la tristesse et l’amertume, l’élévation et la glorification de Jésus Christ, Frère aîné de la fratrie que nous formons (Cf. Rm8, 29), nous honore et réjouit, en ce que ce jour glorieux pour le Christ est une fête de victoire pour nous. Car, entouré d’une multitude d’âmes qu’il a délivrées des limbes et qu’il emmène en sa montée triomphale, l’Ascension du Fils humilié et mis à mort est aussi gage de la gloire que nous partageons avec lui comme fils dans le Fils unique.
La Grande Prière dite sacerdotale le signifie sans ambages : «Père, […], je te prie pour eux […], pour ceux que tu m’as confiés, car ils t’appartiennent. Tout ce que j’ai est à toi et tout ce que tu as est à moi ; et ma gloire se manifeste en eux […] Et maintenant je vais à toi […] Je ne prie pas seulement pour eux, mais pour ceux qui croiront en moi grâce à leur message. Je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme toi et moi nous sommes un […] Père, tu me les as donnés, et je désire qu’ils soient avec moi là où je suis, afin qu’ils voient ma gloire, la gloire que tu m’as donnée, parce que tu m’as aimé avant la création du monde». (Jn 17, 9…10.13…20.22.24; Cf. aussi Jn 1,14.18 ; 3,16 ; Col 1,15.18 ; 12,13 ; He 1,5 ; Ps 2, 7).
D’autre part, l’Ecriture atteste que, de sa naissance à sa mort, par toutes ses paroles et ses actes, Jésus a visé un seul but : la glorification du Père : «Je t’ai glorifié sur la terre ; j’ai achevé l’œuvre que tu m’as donné à faire. Et maintenant toi, Père, glorifie-moi auprès de toimême de la gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde fût» (Jn17, 4-5).
Déjà, dans l’Ancien Testament, Dieu, qui donne sa parole et ne la reprend pas, parce que fidèle (Cf. Jr 1,12 ; Is 40, 1-50 : 8 ; 55,10-11), avait posé ce principe : «J’honore ceux qui m’honorent et ceux qui me méprisent sont traités comme rien» (1Sam 2,30). Jésus peut donc attendre avec raison que le Père le glorifie. En vérité, il s’est acquis, en tant qu’homme, un droit à la gloire, lui «qui avait renoncé au rang qui l’égalait à Dieu» (Ph2,6) en prenant notre nature humaine.
Oui, «l’heure est venue», le kairos. Et, le Christ, par et dans le mystère de l’Ascension, remonte vers le Père afin de siéger comme Homme-Dieu à la droite de Dieu ; pour avoir part comme Fils de l’homme glorifié à sa souveraineté sur le ciel et sur la terre.
Ainsi que nous l’enseignent respectivement Mathieu et l’auteur de la Lettre aux Hébreux, «Fils bien-aimé qui a toute la faveur du Père» (3,17), «il sera couronné de gloire et d’honneur, tout sera mis sous ses pieds» (2,7-8). N’est-il pas, du reste, l’œuvre de Dieu par excellence, la première et l’ultime communication de son amour, «l’Image du Dieu invisible, Premier-Né de toute créature» (Col 1,15) ? C’est bien de lui, Sagesse de Dieu, qu’il est écrit : «Toutes choses ont été créées par lui et pour lui, dans les cieux et sur la terre, les visibles et les invisibles, Trônes, Seigneuries, Principautés, Puissances ; tout a été créé par lui et pour lui. Il est avant toutes choses et tout subsiste en lui. Et il est aussi la Tête du Corps, c’est-à-dire de l’Eglise : Il est le Principe, Premier-Né d’entre les morts, il fallait qu’il obtînt en tout la primauté ; car Dieu s’est plu à faire habiter en lui toute la Plénitude» (1Col 1,16-19).Et, justement, à la mesure de la dignité de ce Fils couronné de gloire, Dieu a créé les anges et les hommes comme une garde d’honneur, une louange permanente pour lui.
«L’ASCENSION DU CHRIST EST NOTRE PROPRE ELEVATION…»
En ces temps difficiles à bien des égards, nous pouvons finalement l’honorer et le saluer comme le fruit désirable en vue duquel fut plantée la vigne de l’univers. «Prisonniers dans le Seigneur» (Eph 4,1), laissons saint Léon tourner nos cœurs inquiets et pourtant avides du Royaume vers le Christ exalté et glorifié : «l’Ascension du Christ est notre propre élévation et qu’il y a espoir pour le Corps d’être appelé où l’a précédé la gloire de sa Tête […]. Aujourd’hui, nous ne sommes pas seulement confirmés dans la possession du paradis, mais en la personne du Christ, nous avons pénétré au plus haut des cieux. Nous avons obtenu, par l’ineffable grâce du Christ, des biens meilleurs que ceux que nous avions perdus par la jalousie du diable. En effet, ceux que le venimeux ennemi a chassés de la félicité de leur premier habitat, le Fils de Dieu se les est incorporés et les a placés à la droite du Père» (Leçons de Matines).
Partageant la Passion et l’humiliation du Sauveur, et «nous prosternant devant Celui qui siège sur le trône et lançant nos couronnes devant le trône» (Ap, 4,10), dans un bruit semblable «au mugissement des grandes eaux et au grondement de violents orages» ( Ap 19, 6), nous clamons d’une voix puissante, en signe de jubilation , d’adoration et de louange : «Tu es digne, ô notre Seigneur et notre Dieu, de recevoir la gloire et l’honneur», toi, en qui notre salut et notre glorification trouvent leur origine et leur terme.»
Maderpost / Sud quotidien