Participer ou pas au dialogue politique auquel nous avons été conviés par Monsieur le Président de la République, Macky Sall ? Voilà la question à laquelle nous avons demandé à nos militants et sympathisants de répondre, fidèle à l’approche « ascendante », consultative et démocratique, qui constitue un des piliers de la méthode de travail de la startup politique « Dundu ».
DIALOGUE – Comme on pouvait s’y attendre, les points de vue sont assez divergents. Les partisans à notre participation au dialogue invoquent le refus de la politique de la chaise vide, et la culture de paix qui doit prévaloir et qui émane forcément du dialogue. Pour leur part, les opposants à notre participation invoquent, entre autres, la nécessité de rester du côté du peuple qui n’a plus la patience d’un dialogue, considérant par ailleurs que le Président Macky Sall était devenu « infréquentable » !
Notre seule boussole pour prendre les meilleures décisions doit rester l’objectivité. Depuis son entrée en politique, Dundu s’est proclamé « VAR Politique », en d’autres termes la « Vérité qui Aide l’Arbitre », l’arbitre étant le peuple. Pour ce faire, nos choix doivent être guidés par l’objectivité, la cohérence et le réalisme.
A cet égard, il est utile, avant de nous prononcer sur notre participation ou non au dialogue des 26 et 27 février 2024, de rappeler les positions antérieures que nous avons exprimées dans nos communiqués publics et vidéos.
I. Rappel de nos positions antérieures
– Nous contestons la fiabilité du processus de parrainage qui a conduit le Conseil Constitutionnel à déclarer irrecevable notre candidature sans même que nos fichiers électroniques soient exploités. Nous réitérons que, ce faisant, le Conseil Constitutionnel a créé une rupture d’égalité entre les candidats, et de ce fait a violé les principes constitutionnels de non-discrimination et d’égal accès des citoyens à l’exercice du pouvoir.
– Autant nous contestons le bien-fondé de la décision du Conseil Constitutionnel, autant nous l’avons acceptée en tant que républicains et légalistes, du moment que la même constitution que nous invoquons pour réclamer nos droits confère aux décisions du Conseil Constitutionnel une portée définitive et inattaquable.
– Nous dénonçons la décision de reporter les élections car elle crée un précédent dangereux pour notre pays qui n’a jamais connu de report d’une élection présidentielle. Cette décision va à l’encontre de la volonté des populations qui tiennent majoritairement à aller aux urnes.
– Bien qu’une éventuelle reprise du processus électoral pourrait être à l’avantage de Dundu qui pourrait à nouveau avoir la chance de participer à l’élection, les intérêts du Sénégal doivent primer sur tout intérêt partisan. Ces intérêts tournent autour du respect du calendrier républicain, de la constitution et des lois de la république, lesquels sont les gages de la paix et de la stabilité de notre pays.
– Dans les situations de crise politique comme celle que nous vivons présentement, nous sommes d’avis qu’il faut privilégier les concertations à la violence qui peut engendrer des pertes en vies humaines. Toutefois, tout dialogue doit être basé sur des termes de références clairs et précis.
II. Notre lecture de l’appel au dialogue du Président de la République
Lors de son interview avec la presse, le Président de la République a indiqué que le dialogue porterait, pendant deux jours, exclusivement sur deux points à savoir : la fixation de la date de l’élection, d’une part, et les modalités de gestion du pouvoir après la fin de son mandat le 2 avril 2024 et en attendant la prise de fonction de son successeur, d’autre part.
Le Président n’a pas tranché la question de savoir s’il s’agissait de revenir sur la décision du Conseil constitutionnel fixant la liste des candidats, et si la reprise du processus électoral faisait partie des termes de référence du dialogue.
A la date d’aujourd’hui, il importe de se rendre à certaines évidences :
– Même si le processus électoral devait être repris là où il s’est arrêté le 3 février, et même si la date du scrutin devait être fixée à demain, il est malheureusement devenu impossible d’élire un nouveau président de la République d’ici le 2 avril 2024 et donc d’effectuer une passation de service avec le Président Macky Sall à cette date. En effet, entre l’organisation matérielle de l’élection et les contraintes de délais posées par le Code électoral, aucun processus ne peut être achevé avant. Cela a pour conséquence que, dans tous les cas de figure, nous ferons face, le 2 avril, à une situation inédite : fin de mandat du Président sortant et absence d’un successeur élu.
– Le Président de la République Macky Sall, lors de son interview avec la presse, a clairement annoncé qu’il ne démissionnera pas. Ce qui exclut la possibilité d’une gestion de la transition par le Président de l’Assemblée Nationale sur ce fondement.
– Il a par ailleurs annoncé, toujours au cours de cet interview, qu’il sollicitera le Conseil Constitutionnel pour avis sur la gestion de l’après 2 avril 2024, tout en n’excluant pas la possibilité d’assurer lui-même la transition.
Au regard de ce qui précède, il est évident que l’objectif principal de cet appel au dialogue, au-delà même de la fixation de la date du scrutin (qui est de toutes les manières irréversible même sans dialogue!), sera de trancher la question suivante: est-ce que, face à cette claire impasse dont l’origine est le décret présidentiel abrogeant la convocation du collège électoral, les acteurs politiques consentent à permettre au Président Macky Sall d’assurer la transition entre la date du scrutin (qui pourrait se tenir avant le 2 Avril sous réserve du respect des délais légaux) et la prise de fonction de son successeur (qui sera certainement après le 2 Avril)?
III. Notre réponse à l’appel au dialogue
Nous sommes d’avis que:
– Il n’appartient plus aux acteurs politiques de trancher la question de la gestion de la transition à partir du 2 avril ; car, peu importe le consensus qui pourrait se dégager au terme du dialogue politique, c’est l’avis du Conseil Constitutionnel, déjà annoncé par le Président de la République, qui pourra trancher définitivement la question.
– La fixation de la date de l’élection est une prérogative de l’exécutif qui doit la déterminer dans les « meilleurs délais » comme demandé par le Conseil Constitutionnel dans son avis du 15 février. Il est vrai que, en l’état actuel de la situation, toute date proposée par le Président de la République violera des dispositions constitutionnelles et légales. Mais il faut dire que ce sera également le cas si cette date émane des acteurs politiques au terme du dialogue politique ! Dès lors, l’appréciation du Conseil Constitutionnel, en tant que juge électoral, sera également nécessaire à notre avis pour constater la situation de force majeure qui oblige à tenir l’élection à une date qui contrevient aux dispositions constitutionnelles ou légales.
En conclusion, dès lors que l’avis du Conseil Constitutionnel est nécessaire aussi bien pour la fixation de la date de l’élection (qui incombe au Président de la République seul) que pour les modalités de gestion de la transition à partir du 2 avril 2024, le dialogue politique n’est à notre avis ni nécessaire ni décisif pour sortir le pays de la crise actuelle.
Pour cette raison, tout en réaffirmant la primauté que nous accordons au principe de dialogue sur toute manifestation de la violence, notre participation au dialogue politique des 26 et 27 février en tant que « candidat recalé » ne nous paraît pas utile et opportune, car elle n’a aucune chance d’influencer le dénouement de la crise qui, de notre point de vue, incombe strictement au Président de la République et au Conseil Constitutionnel.
Mouhamadou Madana Kane
Président de la Coalition Dundu
Docteur en Droit
Maderpost