La chanteuse et comédienne Jane Birkin vient de mourir à l’âge de 76 ans. L’interprète de « Je t’aime moi non plus », éternelle muse de Gainsbourg, avait connu plusieurs soucis de santé ces dernières années.
NECROLOGIE – Elle était la plus Française des artistes britanniques. La chanteuse et comédienne Jane Birkin vient de mourir à l’âge de 76 ans, selon des informations de BFMTV. Elle a été retrouvée chez elle par son aide-soignante.
La chanteuse avait connu de nombreux problèmes de santé ces dernières années. Après avoir remporté son combat contre une leucémie, elle avait été victime d’une réforme légère d’accident vasculaire cérébral en septembre 2021 qui l’avait contrainte à annuler plusieurs concerts cette année-là.
Jane Birkin a de nouveau annulé des shows en mars dernier après s’être cassé l’omoplate. Son retour scénique, prévu pour mai, avait une encore un fois été repoussé : « Il me faut encore un peu de temps », avait-elle alors déclaré dans un communiqué, promettant un rendez-vous en automne à son public.
Fille d’un commandant de la Royal Navy et de l’actrice Judy Campbell, Jane Birkin naît le 14 décembre 1946 à Londres. Elle se lance d’abord dans le théâtre à l’âge de 17 ans, puis dans le cinéma à la fin des années 1960, où elle se fait remarquer grâce à Blow Up de Michelangelo Antonioni.
Sa nudité dans ce film sacré Palme d’or à Cannes en 1967 fait scandale. Celle qui est alors une jeune actrice transforme ensuite l’essai dans Slogan, de Pierre Grimblat, où elle joue face à Serge Gainsbourg, en 1969.
Serge Gainsbourg, la rencontre de sa vie
Déjà mère d’une fille prénommée Kate, née de ses amours avec le musicien John Barry, Jane Birkin tombe sous le charme du chanteur français. Même si, comme elle le racontera plus tard, entre eux, ce n’est pas vraiment un coup de foudre. « Je l’ai trouvé compliqué, arrogant, pendant le tournage. Il n’avait aucune gentillesse envers moi, il me mettait très mal à l’aise », évoquait-elle ainsi en 2017 dans Le Monde.
Un dîner chez Régine suffira à briser la glace entre eux : « J’ai entraîné Serge, qui protestait, sur la piste de danse, pour un slow, et il m’a marché sur les pieds. Divin ! Tout d’un coup, j’ai compris que cette arrogance était de la timidité, j’ai saisi la complexité de son caractère. Finalement, c’était un chou. Drôle, charmant, prévenant ». Ils s’installent ensemble, rue de Verneuil à Paris. Charlotte, leur fille naît en 1971.
Avec Serge Gainsbourg, elle chante Je t’aime moi non plus, une chanson qu’il avait écrite à l’origine dans l’optique d’un duo avec Brigitte Bardot, et qui deviendra un tube mondial, ainsi qu’un objet de scandale.
En 1971 sort Histoire de Melody Nelson, album-concept dessiné par Gainsbourg autour de Jane. Cet échec commercial deviendra ensuite un classique. En tout, Serge Gainsbourg a écrit six albums pour Jane Birkin, jusqu’à Amour des feintes, en 1990.
Le couple s’était séparé dix ans plus tôt, quand la chanteuse a claqué la porte de sa relation avec ce compagnon noyé dans l’alcool. « Elle m’a jeté et c’était bien fait pour ma gueule, moi qui lui cassais la sienne », a-t-il lâché dans les Inrock en 1987.
« Pour moi, c’est plus difficile de quitter. Parce que vous êtes remplie de remords, même si vous trouvez que vous avez eu cent fois raison de décider ainsi », livrait-elle sur cette rupture, dans un documentaire intitulé « Jane Birkin… et nous » diffusé en 2022 sur France 3.
Elle devient la compagne du cinéaste Jacques Doillon après sa séparation d’avec Gainsbourg. Leur relation de 13 ans donnera naissance à une fille, Lou Doillon, aujourd’hui actrice et chanteuse.
Carrière dans le cinéma
Avec lui, celle qui a souvent été cantonnée à des rôles de nunuches entame une reconversion dans le cinéma d’auteur : « Malgré les apparences, j’ai quelque chose d’infiniment triste en moi, un terrible sens de la culpabilité qui ne me quitte pas depuis l’enfance. Jacques a deviné ça en moi », expliqua-t-elle.
Jacques Doillon la fera tourner dans trois de ses longs-métrages : La Fille prodigue (1980), La Pirate (1984) et Comédie ! (1987).
Au générique de quelque 70 films, elle a été choisie par des signatures comme Jacques Rivette, Bertrand Tavernier, Jean-Luc Godard, Alain Resnais, James Ivory ou Agnès Varda. Sans jamais se départir de son humilité : elle assurait avoir un « instinct » d’actrice mais pas de « talent ».
Actrice, chanteuse, réalisatrice
Sa relation avec Jacques Doillon ne l’empêche pas de continuer à chanter Gainsbourg. Et lui de continuer à écrire pour elle. Elle enregistre notamment Baby Alone in Babylone (1983), qui sera disque d’or.
Mais ce n’est qu’à 40 ans passés, en 1987, qu’elle fait enfin ses débuts sur scène au Bataclan à Paris, enchaînant au Casino de Paris et à l’Olympia. Artiste interprète féminine de l’année aux Victoires de la musique 92 en France, (puis récompensée d’une Victoire d’honneur pour sa carrière en 2021), elle est sur tous les fronts : elle joue au théâtre, donne des concerts en France et ailleurs, réalise un premier film Oh ! Pardon tu dormais (sur un couple qui se déchire, inspiré par sa relation avec Barry).
Chanteuse jusqu’au bout
Jane Birkin a poursuivi toute sa vie sa carrière de chanteuse. En 1999 sort son premier disque sans Gainsbourg, avec des chansons écrites pour elle par des chanteurs-compositeurs français comme Françoise Hardy ou Alain Souchon. En 2008 paraît le premier album dont elle a écrit tous les textes, Enfants d’hiver.
Son dernier en date, Oh ! Pardon tu dormais… est sorti en 2020. Cet album, qui reprenait le titre de son film, a été conçu avec Étienne Daho. En outre, le chanteur l’accompagnait sur deux morceaux.
« Avec lui, il y a un vrai moteur. Il y a une essence de vie en lui, qui fait que ça donne une sensualité à tout ça », avait-elle confié à l’époque à BFMTV
Ce disque, son premier album de titres inédits depuis 2008, avait aussi été l’occasion pour elle d’évoquer ce qu’elle avait décrit comme « sa plus grande tragédie »: la mort de sa fille Kate, en 2013, à l’âge de 46 ans.
En 2021, Jane Birkin était apparue au Festival de Canne aux côtés de sa fille Charlotte, qui y présentait le documentaire Jane par Charlotte. Un long-métrage documentaire en forme d’hommage à sa mère.
Maderpost / Magali Rangin avec Afp