Les scandales officiels, les scandales officieux, les scandales supposés, les scandales fabriqués, les menus scandales, les petits scandales et les grands scandales se succèdent, éclatent au grands jour. Les institutions et les administrations les consacrent et tranquillement la vie continue.
TRIBUNE – Dans la même semaine, la Cour des Comptes, une institution très honorable, livre son rapport sur la gestion des fonds de FORCE COVID et l’État prend la décision d’annuler les passeports de service délivrés entre le 1 er janvier 2021 et le 13 décembre 2022 pour raison de trafic démantelé de passeports de service.
Les résultats catastrophiques du rapport de la Cour des Comptes n’est pas une surprise. Ils viennent juste étayer les craintes et suspicions des Sénégalais lorsqu’un ministre en sueur avait dit qu’il n’avait pas de compte à rendre à l’autorité désignée à cet effet.
Cette fois-ci, contrairement aux habitudes, ce sont les Directions de l’Administrations générales et de l’Équipement (DAGE) que la presse met en épingle.
En fait, l’administration des ministères est dénoncée, leur tutelle administrative et morale est épargnée. Est-ce une nouvelle stratégie de communication ou la réalité exacte des faits exposés par l’auguste Cours.
Dans tous les cas, après les tiraillements entre la Pharmacie nationale d’approvisionnement et son ministère de tutelle, les soupçons de marchés attribués à des sportifs, de collusions présumés avec des commerçants libanais, le rapport met au grand jour l’état de corruption avancée qui prévaut dans notre administration.
Seulement, cette fois-ci encore, les vrais commanditaires, les vrais bénéficiaires observeront tranquilles le lynchage médiatique des lampistes et tout se terminera comme tout se termine, sans aucune conséquence.
Ainsi va le Sénégal !
Le scandale des passeports de service vient après le scandale des passeports diplomatiques.
Nous commencions à oublier l’affaire des passeports diplomatiques que tombe brutal la décision exceptionnelle d’annuler les documents émis sur une période de presque deux années.
La question essentielle est : peut-on désormais faire confiance à un document émis par un démembrent de l’État du Sénégal ?
Qui sont les responsables effectifs de ce nouveau scandale? Qui en sont les commanditaires? Qui en sont les bénéficiaires ? Ce sont les mêmes questions qui se posent toujours. Comme toutes les fois antérieures, elles ne seront pas éludées.
Au Sénégal, la corruption est partout présente, de la petite corruption à la grande corruption, dans la famille jusqu’au sommet de l’État.
Des 15 000 FCA que l’on donne pour avoir très rapidement sa visite technique, aux 1 000 francs du transporteur pour circuler tranquillement dans la journée, aux 5 000 francs pour acheter un vote, aux 10 000 francs à la tante pour faciliter l’accord de sa fille pour le mariage, rares sont les documents, les délibérations, les faveurs que l’on obtient, dans les délais, sans passer par un intermédiaire ou sans un payement anormal.
L’emploi, les financements tout est de plus en plus une affaire de corruption, de bras long, d’appartenance politique, familiale, religieuse et même ethnique.
Le danger de la corruption est qu’elle devient la norme. Dans certains pays voisins, on vous demande ouvertement le thé, le café, le pourboire. La corruption atteint alors le seuil de non retour car elle n’est plus cachée, elle se fait avec ostentation.
Lorsqu’on parle de corruption, deux fléaux surgissent: les paris et la drogue. Ces deux calamités sont maintenant bien ancrées dans notre pays jusque dans les villages. Les immeubles de la drogue que dénoncent la presse étrangère poussent tranquillement, les paris pullulent. La multiplication des prises de drogue n’est que la face émergée du fléau.
La corruption est destructrice des valeurs, de l’éthique et soumet la religion à ses impératifs.
Les autorités actuelles sont incapables d’éradiquer la corruption car elle contribue à leur maintien.
Comme en Italie il y a quelques décennies, il faudra organiser avec la partie saine de l’administration une opération mains propres pour éradiquer définitivement la petite et la grande corruption.
Car libérer le pays de la corruption, c’est disposer de ressources supplémentaires pour le développement, c’est valoriser le travail et le mérite indispensables au développement.
Ne soyons pas indifférent à la corruption, elle tue à petit feu la dignité, notre dignité donc notre humanité.
Je vous souhaite une excellente journée sous la protection divine.
Dakar, jeudi 15 décembre 2022
Mary Teuw Niane
Maderpost