Le Nobel de littérature 2022 est attribué à la romancière française Annie Ernaux. Un choix annoncé ce jeudi par l’Académie Nobel depuis Stockholm, en Suède, qui a salué “le courage et l’acuité clinique avec laquelle elle découvre les racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire personnelle”.
STOCKOLM – Elle est la 17ème femme qui remporte cette prestigieuse récompense depuis 1901. Mais c’est la première fois qu’elle est attribuée à une romancière française, les 15 précédents lauréats tricolores étant des hommes. Le dernier en date, c’était Patrick Modiano, en 2014. Interrogée par la télévision suédoise, elle a déclaré que le Nobel était “un très grand honneur” et une “responsabilité“.
Issue d’un milieu familiale modeste en Normandie, Annie Ernaux, née Annie Duchesne, est entrée en littérature en 1974 avec Les Armoires Vides, un roman autobiographique. Elle y décrit les deux mondes incompatibles dans lesquels elle évolue lors de son adolescence. D’un côté, l’ignorance, la crasse, la vulgarité des clients ivrognes, les petites habitudes minables de ses épiciers de parents. De l’autre “la facilité, la légèreté des filles de l’école libre” issues de la petite bourgeoisie.
Dix ans plus tard, elle remporte le Renaudot pour La Place. On lui doit également Les Années, L’autre fille ou encore Passion Simple adapté au cinéma par Danielle Arbid en 2020 et L’Événement, récit d’un avortement clandestin qui deviendra le film éponyme de Audrey Diwan, Lion d’or à Venise en 2021.
“Je me considère très peu comme un être singulier mais comme une somme d’expériences, de déterminations aussi, sociales, historiques, sexuelles, de langages et continuellement en dialogue avec le monde (passé et présent)“, analyse-t-elle dans L’écriture comme un couteau, paru en 2003.
Annie Ernaux a repris le récit de ses souvenirs avec des dizaines de films familiaux tournés par son ancien mari pour Les années super 8″, présenté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes. Tournés entre 1972 et 1981, ils racontent, en creux, comment elle s’est affranchie de la vie domestique pour devenir romancière.
“Je peux affirmer que ces dix années sont les années majeures dans ma vie parce qu’elles vont confirmer mon désir d’écrire“, disait-elle sur la Croisette. “Et puis aussi parce que je vais gagner ma liberté. Une liberté que je souffrais de ne pas avoir, même si je pense que j’ai fait, moi, un mariage d’amour“.
Maderpost