Le problème générique qui condamne les nouveaux gouvernements à l’échec se noue en termes conceptuels.
TRIBUNE – Une illustration en est l’absence criarde de stratégies intégrées de développement économique et social inclusif, bâties sur des forces endogènes et qui servent de boussoles pour déterminer les interventions les plus granulaires.
Il faut donc commencer par se donner une vision paradigmatique (modèle de pensée). Cette vision doit ensuite se traduire par une stratégie qui à son tour, produit des programmes. Ces programmes se déclinent ensuite en projets et ces projets en interventions.
Gouverner étant une entreprise de développement, on serait tenté de faire le parallélisme avec une stratégie d’entreprise qui définit sa culture d’entreprise, ses buts, ses objectifs, la manière de poursuivre ses objectifs intermédiaires, sa hiérarchie des urgences, son modèle d’identification et de mitigation des risques, son plan d’affaires, ses moyens d’actions, la nature et les compétences de ses dirigeants et exécutants, le tout faisant partie d’un système intégré et solidaire.
Or trop souvent, on entend parler de programmes de gouvernement ou de plans, sans pouvoir les rattacher à des stratégies bien articulées, ce qui empêche de faire des jugements de cohérence et de pertinence des actions posées et, rend leur suivi et évaluation difficiles.
Cette situation ubuesque relève de la primauté de l’administratif sur le productif et de la bureaucratisation des gouvernements, depuis l’avènement du Consensus de Washington, avec les programmes de stabilisation et d’ajustement structurel qui ont détruit toutes les bases conceptuelles des stratégies de développement économique et social et, anéanti les moyens de les mettre en œuvre.
Cette dramatique institutionnalisation d’une fabrique de pauvreté structurelle qui jure avec l’abondance de sources de croissance en Afrique a été rendue possible par le piège enfantin d’un endettement public non maîtrisé, devenant de plus en plus insoutenable et non-orienté par des objectifs clairs d’un développement assez intraverti.
Cette prise d’otage par de l’endettement public absurde parce qu’aussi par addiction a trop souvent restreint les marges de manœuvre des nouveaux gouvernements qui doivent rembourser les dettes qu’ils trouvent, sous peine de se voir couper les appuis budgétaires qui leur permettent de faire fonctionner leur administration et payer les forces de défense et de sécurité pour maintenir leur ordre.
Donc se soumettre à la même logique de financement fait que de nouveaux gouvernements ne peuvent absolument pas apporter quelque changement que ce soit et n’arrivent surtout pas à tenir leurs promesses vis à vis des populations qui les voient comme des sauveurs.
C’est ainsi qu’un ministre des finances se réduit à un agent comptable principal, un ministre de l’économie à ne signer que des conventions d’assistance.
Opérer des ruptures c’est donc casser cette chaîne de fabrique de pauvreté.
Maderpost