Plusieurs Kényans ont perdu la vie lors d’échauffourées provoquées par un projet de hausse d’impôts issue d’une réforme fiscale. Le gouvernement de William Ruto durcit le ton, rapporte Dw.
KENYA – Les manifestants, qui étaient mardi 25 juin 2024 dans les rues de Nairobi et d’autres villes du Kenya comptent leurs morts à la fin d’une journée de troubles.
Au moins cinq personnes ont perdu la vie lors d’affrontements avec la police. Les manifestatnts protestent contre une réforme fiscale. L’Etat veut en effet augmenter certains impôts pour renflouer les caisses publiques. Mais la réforme a du mal à passer.
Le Parlement en feu
La scène majeure ayant marqué la journée est celle où des centaines de personnes s’introduisent dans le siège du Parlement à Nairobi. Les députés s’y étaient réunis pour débattre du nouveau texte qui prévoit, entre autres, une hausse des impôts, dont une TVA de 16% sur le pain et une taxe annuelle de 2,5% sur les véhicules particuliers.
Les barrières de la police n’ont pas tenu face à la pression des manifestants en colère. Une partie des locaux du Parlement a pris feu. D’autres institutions ont aussi été attaquées, telles que le gouvernorat et le siège de la Cour suprême.
Cinq personnes ont perdu la vie et plus d’une trentaine d’autres sont blessées, d’après un bilan de la société civile. Plusieurs organisations soutiennent que la police kényane a tiré à balles réelles sur des manifestants.
L’organisation NetBlocks, qui surveille les réseaux de télécommunication, a également signalé d’importantes perturbations sur internet. Le gouvernement kényan a annoncé dans la soirée avoir déployé l’armée pour aider la police face aux manifestations.
Pression sur les caisses publiques
La mobilisation, menée également sur les réseaux sociaux, est organisée à l’appel du mouvement « Occupy Parliament » (Occuper le Parlement) qui proteste depuis le 13 juin, dès la première présentation de ce texte au Parlement.
C’est justement sous cette pression que plusieurs amendements ont été apportés au texte pour en amoindrir l’impact économique. Le débat de mardi au Parlement visait justement à apporter d’autres amendements encore à ce texte qui devrait passer au vote dimanche 30 juin 2024.
Pourtant, ses détracteurs réclament le retrait intégral de la mesure.
Une mesure que l’Etat juge nécessaire pour redonner des marges de manœuvre au pays, lourdement endetté. Le gouvernement espère en tirer près de trois milliards de dollars américains.
Dans une prise de parole dans la soirée, le président William Ruto promet de répondre aux événements de mardi qu’il compare à une trahison.
Pour la plupart des jeunes de 20 à 30 ans, les manifestants, issus de différentes couches de la société, ont reçu le soutien de religieux. L’Eglise catholique a estimé que la hausse des taxes pourrait pousser encore plus de Kényans dans la pauvreté.
Déjà, la protestation semble quitter le terrain fiscal pour viser le président William Ruto au pouvoir depuis deux ans. « Ruto doit partir » ont scandé les manifestants.
Réactions internationales
Plus d’une dizaine de pays occidentaux, dont la France et l’Allemagne, se sont déclarés « fortement préoccupés » par les violences réprimées par la police kényane.
Le secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres appelle à la retenue d’après une déclaration transmise par le porte-parole de l’organisation Stephane Dujarric.
Des policiers kényans en Haïti
Ces troubles éclatent alors qu’un premier contingent de policiers kenyans est arrivé ce mardi à Port-au-Prince, dans le cadre d’une mission internationale visant à rétablir la sécurité en Haïti, pays ravagé par la violence des gangs.
Le Kenya a proposé d’envoyer un millier de policiers en Haïti pour la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), prévue pour une durée initiale d’un an, et à laquelle doivent également contribuer le Bangladesh, le Bénin, le Tchad, les Bahamas et la Barbade.
Le déploiement de cette force, qui sera forte d’environ 2.500 personnes, a été approuvé par une résolution du Conseil de sécurité de l’Onu en octobre, mais il suscite de vives critiques au Kenya.
Maderpost / Dw / Fréjus Quenum