AfricTivistes a interpellé le gouvernement suite à l’annonce de l’interruption d’Internet sur les mobiles après le placement en mandat de dépôt d’Ousmane Sonko et la dissolution de son parti Pastef – Les Patriotes.
DIGITAL – « Dans un communiqué publié ce lundi 31 juillet 2023, le ministère de la Communication, des Télécommunications et de l’Economie numérique a annoncé la suspension temporaire de l’internet (réseau internet via les données mobiles). Le motif avancé serait de stopper « la diffusion de messages haineux et subversifs relayés sur les réseaux sociaux ».
La coupure d’internet et les formes de restrictions en ligne constituent une violation de la liberté d’expression et de l’accès à l’information. Les autorités doivent s’abstenir de couper internet par respect aux droits fondamentaux notamment dans le contexte de manifestations et de tensions.
Nous, AfricTivistes, organisation pro-démocratie et de promotion de l’usage responsable des technologies numériques pour une participation citoyenne effective, dénonçons fermement les restrictions imposées par le gouvernement du Sénégal sur l’utilisation d’internet.
Cette mesure survient à la suite de la mise en garde à vue, le vendredi 28 juillet, de l’opposant M. Ousmane Sonko, leader du parti Patriotes du Sénégal pour l’Éthique, le Travail et la Fraternité (PASTEF) et figure de proue de l’opposition.
M. Sonko qui est placé sous mandat de dépôt ce lundi, fait face à sept chefs d’inculpation allant de « l’appel à l’insurrection au vol avec violence ». Ce nouvel épisode judiciaire contre M. Sonko, est perçu par des Sénégalais comme une tentative d’évincement politique, provoquant une importante mobilisation, surtout chez les jeunes.
En début juin, des manifestations violemment réprimées avaient entraîné plus de trente décès.
Les censures du cyberespace, quelles qu’elles soient, violent la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH), la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) et la Déclaration des principes sur la liberté d’expression et l’accès à l’information en Afrique qui a été élaborée conformément au paragraphe 1 de l’article 45 de la CADHP.
Dans cette même déclaration, il est clairement mentionné que les États ne peuvent restreindre le droit des individus à rechercher, recevoir et communiquer des informations via les moyens numériques, sauf si cela est justifiable selon le droit international des droits de l’homme.
Les restrictions violent aussi les engagements pris par le Sénégal dans le cadre du Partenariat pour un Gouvernement Ouvert (OGP) qui sont de garantir le droit d’accès à l’information pour ses citoyens.
Elles visent aussi à restreindre la liberté d’expression, l’accès à l’information et le droit de réunion pacifique, d’exercer une activité génératrice de revenus entre autres droits garantis par les institutions nationales, régionales et internationales.
Il est récurrent de constater des blocages d’internet en période électorale ou en période de manifestations dans beaucoup de pays africains. Il est dommage de voir le Sénégal, dont la tradition démocratique est reconnue partout dans le monde, rejoindre cette liste de pays censeurs.
En effet, en juin dernier sur annonce officielle du Ministre de l’Intérieur, le gouvernement sénégalais avait limite d’accès à Facebook, Twitter, WhatsApp, Instagram, YouTube, Tik tok, Telegram et d’autres plateformes de médias sociaux du 1er juin au 6 juin. Tandis que la coupure de l’internet mobile avait duré 3 jours. À cela, s’ajoutait l’interdiction d’émettre de la chaîne de télévision privée Walfadjri pendant un mois.
Nous rappelons que la censure ainsi que les coupures d’Internet perturbent la libre circulation de l’information, les activités économiques qui dépendent fortement d’internet et empêchent aux populations d’user de leur droit d’accès à un service universel.
Nous condamnons toute forme de censure et d’interruption du réseau internet, en particulier celles qui ont un impact disproportionné sur les droits fondamentaux, y compris la liberté d’expression, la liberté d’information et la liberté de réunion.
Nous encourageons le gouvernement du Sénégal à respecter les droits des citoyens, ses engagements régionaux et internationaux tout en déplorant le fait qu’il n’existe pas de mesures incitatives au niveau national ou régional qui poussent les autorités à respecter les droits.
Nous invitons le gouvernement du Sénégal à lever cette suspension et à éviter de recourir à des mesures de restriction d’internet pour contrôler les voix dissidentes et les protestations légitimes.
Nous invitons le gouvernement sénégalais en collaboration avec les différents fournisseurs d’accès à internet (FAI) à diligenter une politique de dédommagement à la hauteur des préjudices causés.
Nous rappelons au gouvernement que de telles actions restrictives soulèvent des questions majeures sur la liberté d’expression et de manifestation, sur le droit à l’information et l’accès au cyberespace ainsi que sur l’état de la démocratie sénégalaise. »
Maderpost