Le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne recommande que dans l’analyse du discours négationniste portant sur le Covid-19, distinction soit faite entre la simple irrationalité et les points de vue relevant de “formes de réticences”, par exemple à l’égard de la vaccination. COVID-19 – Il faut selon lui “sérier les choses et voir dans quels cas l’irrationalité est telle qu’on se demande quel discours pourrait lui être opposé et d’autres cas, au contraire, où l’on a des formes de réticences, par exemple devant la vaccination. Ce sont, malgré tout, des formes rationnelles”. “Je peux comprendre que quelqu’un dise que le vaccin a été vraiment trouvé très vite. En un an, on s’est donné un vaccin. Cela n’a jamais été le cas jusqu’à présent”, argumente-t-il dans un entretien paru dans l’édition de mercredi du quotidien sénégalais Enquête. “Les recherches duraient effectivement plusieurs années. Cette personne-là, on peut discuter rationnellement avec elle. On peut lui dire que la raison pour laquelle c’est allé aussi vite, c’est que jamais comme auparavant, la force scientifique de l’humanité entière n’avait ainsi mobilisé dans un seul but“, dit-il. Dans un deuxième argumentaire, il faut expliquer à cette personne sceptique que “les découvertes qui ont permis les nouveaux types de vaccins mis en place, avaient déjà été mises en place depuis un certain nombre d’années ; c’est-à-dire, on n’est pas parti de zéro pour arriver là”. “Troisième et dernière chose, souligne Souleymane Bachir Diagne, c’est que le monde a parié sur ces vaccins. Des milliards et des milliards de dollars ont été dépensés en disant : si nous trouvons le vaccin, tant mieux ; si nous nous ne trouvons pas, nous allons perdre de l’argent, mais l’argent n’est rien par rapport à la vie humaine”. “Au bout de ce raisonnement calme, tranquille, rationnel et argumenté, vous pouvez convaincre des gens dont l’hésitation vient d’une réflexion rationnelle“, assure l’universitaire sénégalais, enseignant à l’Université de Columbia, aux Etats-Unis. Il note que par contre, “si quelqu’un se met à croire que Bill Gates a décidé de mettre des puces dans les vaccins et que ce qu’on met dans nos bras, va au service du contrôle sur l’humanité que Bill Gates veut organiser, que peut-on répondre à cela, si ce n’est essayer autant que faire se peut de faire fonctionner une bonne communication contre ce scepticisme et ce côté irrationnel des choses”. A ce sujet, il prône un changement de pédagogie dans l’approche de la communication, pour passer des chiffres à leur représentation en courbes pour mieux matérialiser l’évolution de la pandémie. “On prend n’importe quel mathématicien qui a fait une terminale, il peut vous transformer les chiffres en courbes. Les gens, même les moins instruits, suivent le dessin. Ils savent quand ça monte très vite ou lentement. Cela est bien mieux que d’asséner des chiffres et il faut se rappeler du chiffre antérieur de la veille pour savoir si ça monte au descend”, ajoute Souleymane Bachir Diagne. “Quand on constate ce que les gens peuvent croire, le genre de discours complotistes qui circulent, on se dit comment des êtres rationnels peuvent croire des choses pareilles ?”, s’interroge l’épistémologue et spécialiste de la philosophie des sciences. “C’est insensé, mais on se dit que si ça continue à circuler, c’est que ça marche. Il y a des gens qui peuvent se mettre à penser ainsi“, constate le philosophe sénégalais. Maderpost / Aps ]]>
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