L’éditorialiste et chroniqueur sénégalais Babacar Justin Ndiaye s’est prononcé au micro d’Eric Topona sur l’affaire des soldats ivoiriens retenus par la junte malienne au moment où le Président Alassane Dramane Ouattara en route New-York a fait escale au Vatican, laissant entendre depuis en Afrique de l’Ouest que l’Eglise pourrait aussi s’impliquer dans les négociations.
MALI – Pour rappel, Ouattara était en compagnie du nonce apostolique, donc l’ambassadeur du pape à Abidjan, durant toute sa présence au Vatican. Il se dit aussi que l’évêque de Bamako, Monseigneur Jean Zerbo, et d’autres religieux de l’Église notamment, vont essayer de faire quelque chose du côté de Bamako.
Et sur le plan diplomatique, est ce que les lignes bougent également ? Est-ce que les différentes chancelleries sont également en alerte ?
Babacar Justin Ndiaye : Les chancelleries sont non seulement en alerte, mais en mobilisation. Car Ouattara, je crois qu’il mise maintenant sur la solution à l’échelle de la Cedeao.
Vous savez, Justin Babacar Ndiaye, beaucoup disent que la junte militaire au Mali a réussi son coup puisqu’elle se fait désirer. Elle est même devenue un interlocuteur. Pourtant, elle était vouée aux gémonies jusqu’à un passé récent.
Une chose est sûre, c’est que de facto, cette junte maintenant, elle est reconnue. Alors qu’hier, elle était non seulement marginalisée mais considérée comme une entité politique pestiférée. Mais aujourd’hui, on accepte d’entrer en contact avec elle, donc c’est déjà un gain politique pour la junte malienne. Même le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres reconnaît qu’il est en contact permanent avec Bamako.
Et la France dans tout ça ? Quel rôle joue-t-elle dans cette affaire ? On sait que les relations avec Bamako sont devenues très exécrables ces derniers temps.
Il faut dire aussi que la France, dans les coulisses aussi, manœuvre de façon frénétique parce que la position de l’ONU devient de plus en plus fluctuante sur cette affaire. Au départ, l’ONU s’était éloignée de l’affaire en disant que ce groupe de militaires n’avait rien à voir avec la Minusma.
Mais lorsque Guterres déclare que ces gens-là ne sont pas des mercenaires, ça ressemble à un certain revirement.
Quelle que soit l’issue, quel que soit le dénouement de cette affaire des 46 soldats détenus au Mali, es-ce que ce n’est pas le président Ouattara qui risque de perdre la face puisqu’il est acculé par l’opinion publique de son pays ?
En tout cas, c’est lui qui est sur la braise dans la mesure où il a à faire à son opinion publique, les familles des militaires, les partis politiques de Côte d’Ivoire dont les uns sont très réservés par rapport à cette affaire et les autres sont presque sur la même longueur d’onde que le Mali.
Donc c’est lui vraiment, qui est plus en difficulté que Goïta (Assim Goïta, chef de la junte au Mali NDLR)
Maderpost / DP / Eric Topona