Après le coup de force médiatique relatif à l’annulation de la dette africaine lancée par le Président Macky Sall dans ce qu’il est peut-être considéré d’appeler la sphère du leadeship de type nouveau en Afrique depuis l’installation du Covid-19 sur pratiquement tout le continent, c’est au tour de son homologue malgache, Andry Rajoelina, de tenir la dragée haute avec le médicament à base de plantes “Covid Organics” conçu chez lui pour combattre le virus déclaré en 2019 à Wuhan et Hobei en Chine.
CORONAVIRUS – Réponse du berger à la bergère.
Cette triste crise de Covid-19 qui bouleverse les habitudes sociales et impose son dictat aux systèmes et tissus économiques n’empêche pas une lutte au sommet entre les chefs d’Etat africains qui entendent redessiner les contours diplomatiques de leur pays mais également les enjeux économiques dans ce qui se dessine comme le nouvel ordre mondial dont la Chine semble avoir pris une avance.
En cela, on peut considérer que le Malgache Andry Rajoelina prend Macky Sall à son jeu de leader assumé depuis quelques semaines. Saluée par une bonne partie des intellectuels et politiques africains, la proposition du chef d’Etat sénégalais relative à la suppression de la dette africaine le replace dans dans le cercle des décideurs importants et leaders incontournables du continent.
Cela est d’autant plus important pour lui et le Sénégal, qu’il a eut à souffrir des regards suspicieux de ses pairs.
En témoigne, l bouderie de l’ancien Président mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz, qui avait claqué la porte du Sommet de la Francophonie organisé à Dakar les 29 et 30 novembre 2014 après avoir préféré se taire suite à la décision des organisateurs de le programmer à la fin du cérémonial d’ouverture alors qu’il avait quand même la qualité de président en exercice de l’Union africaine. Sans oublier la question du Sahara occidental.
Macky Sall avait pesé de tout son poids pour un retour du Maroc au sein de l’Union africaine lors du 27ème sommet panafricain. Retour mal vu par la Mauritanie qui soutient faut-il le rappeler la République Arabe Sahraouie.
N’oublions pas également la fronde de la Guinée Conakry du président Alpha Condé, qui ne décolérait pas contre le Sénégal depuis l’affaire Ebola. Le Président guinéen, qui n’avait pas digéré la fermeture des frontières sénégalaises à son pays, avait menacé de boycotter le XVe Sommet de la Francophonie tenu au Sénégal.
A l’Est, c’est le Mali du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) qui en voulait au Sénégal d’avoir offert l’asile à l’ex-président malien Amadou Toumani Touré (ATT) en exil à Dakar depuis avril 2013, suite au coup d’Etat militaire du capitaine Amadou Haya Sanogo.
En 2014, le président IBK avait même envisagé de contourner le port de Dakar au profit de ceux de Nouakchott et d’Abidjan. Bamako demandait purement et simplement l’extradition du président ATT. (Walf 2 février 2017).
Plus près du Sénégal, se posait le quasi-totalitarisme règne de l’ex-président Yahya Jammeh qui imposait au Président Macky Sall de chasser Kukoï Samba Sanyang pour le Mali où il décède le mardi 18 avril 2013, et d’expulser le 14 janvier 2015, l’opposant gambien Cheikh Sidya Bayo.
Quant à la crise burkinabé, Macky Sall alors président en exercice de la Cedeao, avait raté sa médiation en voulant donner le beau rôle au putschiste Gilbert Diendéré. Pour finir l’énumération des impairs les plus connus du Président Macky Sall sur le continent, on peut convoquer la candidature du Pr Abdoulaye Bathily Sénégal à la présidence de la Commission de l’Union africaine. En dépit de tous les moyens mis à sa disposition par son mentor le Président Macky Sall, il fera chou blanc.
Seule embellie au tableau. le règlement avec tact mais non moins soutenu et inflexible de la question Jammeh sur laquelle le Président sénégalais n’a montré aucune faiblesse.
Parmi les chefs d’Etat africains les mieux élus pour son premier mandat, Macky Sall qui apprenait ses bases présidentielles depuis l’avenue Léopold Sedar Senghor, a certainement beaucoup appris pour ne pas renouveler les erreurs de débutant au cours de son second mandat remportée en février 2019. Et c’est sûrement les leçons apprises de échecs précédents qui l’ont amené à se positionner en défenseur du continent.
Andry Rajoelina semble le prendre à son jeu en le convoquant, à son tour, à respecter la vision africaine qu’il défend et aller donc au-delà des mots. Macky Sall devrait les transformer en acte. Une invite au premier des Sénégalais à l’action médicale qui consisterait à commander le fameux Covid-Organics. Un retour de boomerang s’il en est que le Sénégalais ne peut esquiver sous peine d’aller en contradiction avec ses fondements surtout après son appel téléphonique à ce même Rajoelina.
Conscient de sa parade et de ses conséquences, le Malgache ne perd pas du temps. Il enclenche la vitesse, prend non seulement son homologue au mot, mais met aussi les populations africaines dans son camp. Un coup de maître si l’on considère que les populations noires africaines évoquent les bienfaits du médicament malgache sur les réseaux sociaux.
Depuis, le Président malgache ne lâche pas le morceau. Ses twitts sont repris un peu partout, et ses pairs africains sont de plus en nombreux à passer commande chez lui.
BBC annonce que le Président tanzanien a déclaré qu’il allait envoyer un avion à Madagascar pour importer un “traitement à base de plantes”.
Le président tanzanien a déclaré qu'il allait envoyer un avion à Madagascar pour importer un "traitement à base de plantes" qui a été présenté comme un remède contre le coronavirus par le président du pays, Andry Rajoelina. https://t.co/LNIyrAAxkG
— BBC News Afrique (@bbcafrique) May 3, 2020
Rajoelina en profite pour glisser à ses pairs. “Notre impératif est le même : préserver et sauver les vies en danger. Coordonnons nos actions pour endiguer l’épidémie. C’est l’heure de la solidarité africaine.”
Confcall avec les chefs d’états africains 👉🏽
Notre impératif est le même: préserver & sauver les vies en danger. Coordonnons nos actions pour endiguer l’épidémie !
C’est l‘heure de la solidarité africaine. #Madagascar offrira le Tambavy CVO aux malades & hôpitaux du continent. pic.twitter.com/gAwzQFMgjo— Andry Rajoelina (@SE_Rajoelina) May 1, 2020
Le président de la Guinée Bissau dont le gouvernement enregistre pas moins de 5 ministres infectés par le virus a passé commande. Bissau qui sait ne pas avoir les moyens de faire face au Covid-19 fait une totale confiance à la médecine malgache. Rajoelina ne rate pas l’occasion de communiquer. L’occasion est trop belle.
Nous sommes honorés de transmettre ces remèdes à la délégation de #GuineeBissau pour les malades du #COVID19 des 15 pays de @ecowas_cedeao.
Merci Président @USEmbalo pour l’initiative de la distribution !
Agissons stratégiquement aujourd’hui pour changer le destin de l’Afrique. pic.twitter.com/XjKjsF39KG— Andry Rajoelina (@SE_Rajoelina) May 1, 2020
Au moment où beaucoup palabrent et estiment le temps de la propagation du Covid-19 inopportun à la recherche et aux essais cliniques de substances connues de la pharmacopée africaine ou non, Rajoelina qui juge l’action plus efficace que la parole même si le poids des mots a son importance, imprime au leadership africain une nouvelle dynamique. Celle de l’acte.
Kagame, jusqu’ici le plus présent des chefs d’Etat dans les chaumières africaines, se distinguait par une communication subtile de l’image faisant nourrir un engouement certain, voire même un complexe africain, vis-à-vis de ses politiques globales.
Il n’est pas à écarter qu’il ait provoqué chez Macky Sall l’envie du revenir sur la scène africaine.
Un Macky Sall qu’on ne manquera pas de croire “fan” de son homologue rwandais.
Mais, il faut croire que le Malgache qui connaît suffisamment la musique au sens propre et figuré pour avoir redoublé au sens présidentiel, n’entend pas se faire distancer sur ce terrain. Et lui, c’est par les soins qu’il semble prendre la rampe du leadership africain de type nouveau.
Maderpost (Archive Walf)