Au regard de la complexité des enjeux politico-stratégiques qui redessinent les rapports entre l’Afrique et l’Europe en particulier la France, un pur professionnel africain de l’information s’essaye à décrypter mieux les matériaux de son environnement en mutation. Confidentiel Afrique publie l’excellente Chronique sous la plume de son auteur Mame Ngor NGOM (MGN). TRIBUNE – Elle s’appelle Rama et se nomme Yade. Elle s’appelle Sibeth et se nomme Ndiaye. Il s’appelle Pap et se nomme Ndiaye. Il est le frère de Marie Ndiaye brillante écrivaine, Prix Goncourt en 2009 avec son œuvre « trois femmes puissantes ». Il est le tout nouveau ministre de l’Education et de la Jeunesse de la France. Macron a « fait du Sarkozy » sans Sarkozy qui avait nommé Rama, en choisissant Sibeth puis Pap. Leurs dénominateurs communs : ils sont issus de la « minorité noire ». On les appelle Franco-Sénégalais. Des Français et des Sénégalais. Ils sont des Français tout court. Comme Barack Obama l’ex-président des États-Unis d’Amérique, ils sont au service de leur pays. Avant tout. Ils ont été les produits d’un système. Le système français qui les a formés, moulés, produits. Pap sans le « e » n’est pas Papa Ndiaye… Thiopet. Il pense français et agit en Français. D’ailleurs, il se décrit comme « un pur produit de la méritocratie républicaine » lui qui succède à Jean Michel Blanquer un ministre qui n’était pas en odeur de sainteté avec des pans entiers du secteur de l’éducation français. Lui Pap est au cœur de la tempête, comme on pouvait s’y attendre. Sa nomination met en exergue ce « racisme structurel » propre à la France, la France de la droite surtout. L’Extrême droite ! Les anathèmes et les mots si bas ont commencé à pleuvoir dès les premières minutes après ce choix d’Emmanuel Macron. Marine Le Pen du Rassemblement national (RN) qui parle d’ « indigéniste assumé », son bras droit Jordan Bardella « militant racialiste et anti-flics artisan futur de la dislocation de la nation » au même moment, leur porte-parole Julien Odoul insiste sur un « militant immigrationniste ». Éric Zemmour candidat malheureux de «Reconquête », prédit que l’historien va « déconstruire l’Histoire de France ». Pire, une partie de la droite à l’image du député Les Républicains (LR) Éric Ciotti ose, dans un tweet, qualifier Ndiaye « l’islamogauchiste et militant anti-flics ! Terrifiant ! ». Son collègue Julien Aubert a préféré le désigner comme le « cheval de Troie du gauchisme US », porteur du « wokisme » et du « racialisme ». En pensant à Gana… Que de qualificatifs, d’inquisition, de jugements hâtifs, de mauvais procès. Il n’est question que de ça dans l’espace politico-médiatique français. C’était la même clameur en 2017 avec la nomination de Nicolas Hulot en 2017, puis Éric Dupond-Moretti en 2020. Pap Ndiaye est une personnalité reconnue comme ces deux figures mais la grande différence c’est son « statut » de noir. Cet état de fait va cacher les qualités du directeur du musée de l’Histoire de l’immigration, un des meilleurs spécialistes en France de la condition noire dans le sillage d’Aimé Césaire et de Frantz Fanon de véritables combattants pour la cause noire contre les révisionnistes. Il est certainement bien préparé pour faire face à des attaques les plus enfouies. Ceux qui n’ont pas épargné Christiane Taubira l’élue guyanaise ou Rama Yade, Rachida Dati ne vont pas rater Pap Ndiaye. Ceux-là qu’on appelle les Afro-descendants seraient donc des Français « entièrement à part », des « anomalies». Pourtant, le Français Pap Ndiaye pourrait bien apporter une touche personnelle, rigoureuse et clairvoyante lui l’historien passé de la banlieue parisienne à l’École normale supérieure et à l’École des hautes études en sciences sociales. Docteur en sciences sociales, il maîtrise parfaitement les enjeux. Il sait sans doute que, vu d’Afrique, ce qu’on pense de lui. Nous pouvons être fiers de son « sacre » et de son parcours tout en étant conscients qu’il ne pense ni à nous ni à notre affection. Il est là-bas pour sa patrie et pour lui. Il est conscient sans nul doute qu’il sera toujours considéré comme un demi-Français par une frange importante d’une société ancrée dans ses contradictions. Pour le moment, nous nous réjouissons de l’élan de solidarité en faveur d’Idrissa Gana Gueye Sénégalais « à part entière » qui a montré toute sa sénégalité, toute son identité en refusant poliment de porter le maillot floqué des couleurs Lgbt. Une manière de prendre le contre-pied d’une vision simpliste, d’une logique bien française qui voudrait que l’universalisme même soit français, pour reprendre l’expression de Léopold Sédar Senghor. Une curieuse conception de « l’ouverture » à l’origine de beaucoup de fléaux actuels de l’Hexagone. Mame Ngor Ngom]]>
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