Sans le dire, Ousmane Sonko tête de liste de Pastef et Premier ministre a donné les indications d’un retour inespéré du régime parlementaire cher à Mamadou Dia et la fin de celui présidentiel lors d’une interview accordée à Walf TV, diffusée le 15 novembre 2024 à deux jours des législatives anticipées.
POLITIQUE – Voilà ce qui nous ramène à une époque que nous pensions révolue, définitivement enterrée par ce que Sonko appelle certainement le Système sur lequel a surfé la corruption et sûrement de pseudos partenaires étrangers dont l’objectif était de se sucrer sur le dos d’un pays et ses matières premières.
Les coopératives de paysans pour atteindre des seuils de production nationale élevée du coton (Kolda, Tambacounda, Kédougou, Kaffrine, Fatick, Kaolack) et de la monoculture mono arachidière instaurée par les Français qui décrètent à partir de 1860 l’éclipse de la production du coton, ainsi que leur transformation (la Sodefitex pour le coton et les huileries pour l’arachide) vers lesquelles tendait le président du Conseil ne fait pas l’affaire du secteur des affaires étrangères, particulièrement parisiennes.
Il fallait alors en finir avec ce régime parlementaire centré sur le Sénégal d’abord, les bonnes relations avec les voisins ensuite, et des enfin les relations bilatérales ou multilatérales win-win.
Venant d’pays tout juste indépendant, cela faisait désordre, passant non seulement mal aux yeux des colons toujours présents dans les ministères à titres de coopérant ou de conseiller, mais encore faisait tâche d’huile et risquait d’entraîner les nouveaux pays indépendants dans une dynamique patriotique.
Soixante-deux ans après sa mise à mort politique, son incarcération loin de sa famille, la fin du régime parlementaire sacralisant le présidentialisme sous un Léopold Sedar Senghor devenu seul maître à bord, Ousmane Sonko, grand vainqueur des Législatives anticipées du dimanche 17 novembre dernier, ressuscite Mamadou Dia et son vœu pieux aux premières heures de l’indépendance, à savoir refaire du Sénégal un régime parlementaire.
Nous n’en sommes pas loin si nous nous fions aux déclarations d’Ousmane Sonko sur Walf Tv.
En effet, il faut revenir à cette partie de l’interview où il sort le livre de la Constitution de sa poche, un grand moment de communication d’ailleurs, pour savoir où il va et à quel quai il veut accoster Sénégal. Pour nous, il ne fait aucun doute que c’est le vers le régime parlementaire qu’il veut amener le pays, autrement dit vers le régime qu’avait choisi le Sénégal.
« Les Sénégalais vont découvrir une autre Assemblée nationale. (…) Je suis venu avec ma Constitution pour éclairer mes propos. Si vous prenez l’article 67 de la Constitution qui régit les rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, vous verrez qu’en réalité tout retourne au pouvoir législatif. Parce que c’est le pouvoir législatif qui contrôle le pouvoir exécutif et non le contraire », commence par dire Ousmane Sonko, continuant sur un rythme quasiment dogmatique fondant une doctrine parlementaire.
« Le pouvoir législatif est fait de telle manière que tous dépendent de lui alors que lui ne dépend d’aucun. C’est lui qui vote les lois (…) La Justice ne vote pas des lois, elle les applique. L’Exécutif ne vote pas des lois, il les applique. L’Assemblée nationale est la seule à voter des lois, maintenant, elle peut partager l’initiative de la loi avec le pouvoir exécutif ».
Qui douterait encore de la migration du même Ousmane Sonko vers une autre station, celle qui lui permettrait de donner corps à tout ce qui précède et à sa vision ? Qui de mieux placé que lui-même pour le faire, lui le concepteur du Projet, faiseur de maires, de députés, de président, enfin porté par son peuple pour qu’il examine, évalue, contrôle les actions gouvernementales et politiques publiques ?
Il est à sa place et nous ne doutons pas un seul instant qu’il se donnera les moyens pour que les organes de régulation et de contrôle aient suffisamment de ressources humaines, de moyens techniques et digitaux pour stopper en amonts les « gabegies », « tripatouillage de chiffres » et « carnage organisé ».
Il n’y a pas de doute, les réformes viendront, les poursuites pleuvront. Que certains se le tiennent pour dit et ce n’est le régime présidentiel qui va les tirer d’affaire. Il sera mort et enterré avec la mise en place la prochaine et quinzième législature.
L’Assemblée nationale qui vote les lois et celle aussi qui dit que « ce sont ces mêmes lois qui fixent un certain nombre de règles, notamment les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques, les suggestions imposées par la défense nationale aux citoyens en leur personne et en leur bien », dit le même Sonko qui sait qu’il prendra effectivement le pouvoir le jour de son installation au perchoir.
Si ce n’est une nouvelle ère ou plus précisément le retour vers le régime parlementaire qu’est-ce que c’est ?
Dans une telle configuration, le prochain chef du gouvernement qui sera bien entendu nommé par le Président Bassirou Diomaye Faye, si ce n’est le même Sonko, sera le détenteur effectif du pouvoir et responsable collectivement avec ses ministres devant la même Assemblée nationale.
Quant au Président Bassirou Diomaye Faye, désigné au peuple sénégalais par le même Ousmane Sonko pour siéger à Léopold Sédar Senghor (ex-Roume), il aura un rôle essentiellement représentatif, le pouvoir exécutif étant du ressort de la primature. Et ce n’est certainement pas ce qui va le déranger. Le Projet étant la seule constante, si on ne se trompe. Voilà comment Sonko va prendre enfin le pouvoir, à moins que nous soyons passé à côté.
Maderpost / Charles FAYE