Angela Merkel a plaidé lundi pour davantage de “souveraineté” européenne pour la production de masques sanitaires contre le coronavirus, un équipement jugé crucial en vue d’un futur déconfinement, désormais évoqué avec prudence par plusieurs pays même si la lutte se poursuit d’arrache-pied contre la pandémie.
CORONAVIRUS – L’Europe, le continent le plus endeuillé, espérait une nouvelle baisse du nombre de décès après la lueur d’espoir apparue ces derniers jours. Mais lundi, le bilan des morts est reparti à la hausse en Italie, le pays le plus touché, avec 636 décès supplémentaires en 24 heures. La France a annoncé 833 décès.
La pandémie a fait plus de 70 000 morts dans le monde depuis son apparition en décembre en Chine, dont plus de 50 000 en Europe. Les États-Unis ont franchi lundi le seuil des 10 000 morts.
Au Royaume-Uni, où la barre des 5000 morts a été dépassée lundi, le premier ministre Boris Johnson a été hospitalisé dimanche dix jours après avoir été testé positif. Il a “bon moral” et reste “aux commandes du gouvernement, a assuré Downing Street.”
Assouplissement progressif
Dans ce sombre tableau, la Norvège a annoncé lundi avoir désormais la pandémie “sous contrôle“, l’Autriche a évoqué un assouplissement progressif de ses règles de confinement à partir du 14 avril et la Grèce, moins touchée, a indiqué espérer un retour “à la normalité” en mai.
“Notre but est une remise en marche par étapes“, a déclaré le chancelier autrichien Sebastian Kurz, appelant la population à conserver “la plus grande discipline”. La République tchèque a également annoncé un allègement des mesures à l’occasion de Pâques.
Mais l’UE est loin d’avoir tourné la page de la “plus grande mise à l’épreuve” de son histoire, a prévenu Angela Merkel, appelant à “plus d’Europe, une Europe plus forte et une Europe qui fonctionne bien”.
La chancelière allemande a notamment insisté sur la nécessité d’une “souveraineté” pour la production de masques, qui proviennent aujourd’hui majoritairement d’Asie et font l’objet d’une guerre commerciale sans pitié.
Les États-Unis ont rejeté lundi les accusations de Berlin selon lesquelles ils auraient détourné à leur profit quelque 200 000 masques, dénonçant “des campagnes de désinformation” pour susciter des divisions.
L’Espagne a par ailleurs annoncé l’arrestation d’un entrepreneur soupçonné d’avoir volé deux millions de masques et de les avoir revendus au Portugal.
Port systématique du masque
Un nombre croissant d’experts estiment qu’une future sortie du confinement devra s’accompagner d’un port systématique du masque pour éviter un retour de la pandémie, même si les masques seuls ne sont pas “la solution miracle”, selon l’OMS.
Près de 4 milliards de personnes, soit plus de la moitié de l’humanité, sont aujourd’hui contraintes ou appelées par leurs autorités à rester cher elles.
Dans ce contexte, les initiatives de production parfois artisanales se multiplient à travers le monde, comme à Paris, où des migrants sans-papiers ont improvisé un atelier de confection dans leur centre d’hébergement.
“Je me suis demandé ce que je pouvais faire pour aider, car j’ai vu que le coronavirus tue beaucoup. Comme je suis couturier de base, j’ai pensé que j’allais faire des masques et apporter de quoi sauver des vies”, explique Jonson, un Ivoirien de 32 ans à l’origine de l’initiative.
L’Espagne, qui a enregistré plus de 13 000 morts, envisage “très sérieusement” d’imposer le masque pour sortir de chez soi.
Ce pays a connu lundi son quatrième jour consécutif de baisse des décès quotidiens, avec 637 morts.
Récession record
La France a pour sa part renoncé à envoyer en République tchèque des malades qui devaient y être soignés pour soulager le système hospitalier très sollicité de l’est du pays, faisant état d’une “amélioration”.
Mais Paris a aussi prévenu que la deuxième économie de l’UE allait sans doute connaître en 2020 sa pire année de récession économique depuis la fin de la Seconde guerre mondiale.
Face à la menace d’un recul généralisé de l’activité, les 27 semblent proches de parvenir mardi à s’entendre sur de premières mesures économiques communes, sans aller toutefois jusqu’à la création d’un “fonds de relance” vivement réclamé par Rome, Madrid et Paris.
Les États-Unis se préparent de leur côté à “supporter le pic de cette terrible pandémie”, a indiqué dimanche soir le président Donald Trump.
Mais le directeur de l’Institut national des maladies infectieuses, Anthony Fauci, a évoqué une mortalité “en train de se stabiliser” dans le pays. À New York, principal foyer du pays, le confinement a été prolongé jusqu’au 29 avril.
État d’urgence au Japon
L’espoir de voir l’Europe et les États-Unis se diriger vers un possible pic de la pandémie a redonné de l’énergie aux investisseurs. À Wall Street, l’indice Dow Jones a ouvert en nette hausse (5,21 %), tandis que Francfort, Londres et Paris clôturaient en hausse de plus de 5 %, et 3 % et 4,6 % respectivement.
Confinée et en crise économique, l’Argentine a elle reporté à 2021 le paiement de 9,8 milliards de dollars de dette publique.
En Afrique, jusqu’à présent moins exposée à la pandémie, la République démocratique du Congo a commencé lundi matin l’isolement et le confinement total du centre politique, économique et diplomatique de sa capitale Kinshasa.
“J’ai mis plus de deux heures à attendre, mais je ne me plains pas parce que cette maladie est très mortelle”, a témoigné Jérôme Lumosi, 35 ans, après avoir finalement passé les check-points sécuritaires et sanitaires.
En Inde, où 1,3 milliard de personnes sont appelées à rester chez elles, le confinement menace de virer au cauchemar pour les habitants des bidonvilles surpeuplés comme celui de Dharavi, où la densité est estimée à 270 000 personnes par kilomètre carré.
“Que pouvons-nous faire ? Nous nettoyons nos maisons en restant enfermés à l’intérieur”, constate Abdul Kadir, un employé d’une épicerie, en regardant des employés municipaux désinfecter le bidonville par fumigation.
Jusqu’à présent salué pour sa capacité à contrôler l’épidémie, le Japon se prépare à déclarer mardi l’état d’urgence dans plusieurs régions du pays où les cas de COVID-19 sont en forte hausse, dont Tokyo et Osaka.
Maderpost / AFP/ Yannick Pasquet / Philippe Schwab