Le Forum de la Société Civile de l’Afrique de l’Ouest (FOSCAO), a non seulement dit « non à toute intervention militaire au Niger et appelé la CEDEAO à privilégier une solution pacifique entre Nigériens », mais encore demandé à l’organisation sous-régionale de revoir sa copie et de se ranger du côté des peuples qui souffrent.
NIGER – Le Forum invite la CEDEAO ainsi que toutes les parties prenantes à « respecter les instruments légaux et cadres de prévention existants et à privilégier les modes de règlement pacifique des différends que sont les bons offices, la médiation, la conciliation et la facilitation basés sur le dialogue, la négociation et l’arbitrage ».
Non à toute intervention militaire
Par ailleurs, le FOSCAO dit « non » à « toute intervention militaire au Niger » et « en appelle à la CEDEAO à privilégier une solution pacifique entre Nigériens ».
Suivant « de près la crise politique au Niger », le FOSCAO rappelle la sagesse qui dit : « On sait quand une guerre commence et on ne sait pas quand cela se termine ». Aussi, en appelle-t-il à la CEDEAO à « concentrer ses ressources militaires à la lutte contre les terroristes dans tout l’espace communautaire », plutôt.
Mieux, il lance un appel à « privilégier des sanctions ciblées qui n’aggravent pas la situation socio-économique déjà précaire des citoyens », non sans rappeler aux gouvernants leur mission première qu’il traduit dans « un vibrant appel à la CEDEAO et aux Chefs d’États » à « œuvrer pour une amélioration immédiate, inclusive et durable de la gouvernance démocratique, de la lutte anti-corruption, de la protection des droits de l’homme, une meilleure ouverture de l’Espace civique et politique afin de contribuer de manière plus effective à la co-construction d’une véritable CEDEAO des Peuples, telle qu’exprimée dans sa Vision 2050 ».
LE FOSCAO de préciser que dans le Niger « déjà confronté à l’insécurité terroriste » souffrirait davantage d’« une quelconque intervention militaire le précipiterait dans un chaos indescriptible, avec le risque de prolifération des armes et d’effondrement des pays côtiers, sans oublier le risque de créer une seconde Lybie et celui d’exposer toute la région à une autre forme de colonisation par des forces extérieures qui n’attendent que cette opportunité ».
Pour le Forum, seules des élections libres inclusives et transparentes avec « des lois et listes électorales consensuelles », une indépendance de la justice sans instrumentalisation de la justice au service des pouvoirs et éviter des élections sans oppositions » doivent être priorisées.
Avec en outre, l’ouverture de l’espace civique, c’est-à-dire la « liberté d’association, liberté de réunion, liberté de presse et d’expression », la libération des prisonniers politiques et retour des exilés politiques, l’inclusion active de son Parlement, de la société civile, des leaders religieux et traditionnels à la construction et la mise en œuvre des solutions.
Le rôle attendu de la CEDEAO
Cela n’est pas sans demander à la CEDEAO de « finaliser » le « processus de révision du protocole additionnel de 2001 sur la démocratie et la bonne gouvernance », tel que décidé par le sommet extraordinaire des chefs d’états, le 16 Septembre 2021 à Accra, Ghana.
LE FOSCAO n’oublie pas l’Union Africaine (UA) à qui elle demande de « réellement mettre en pratique le thème faire taire les armes ». Selon le forum, cela passe par « l’accélération du développement économique et social inclusif et durable, un meilleur contrôle et une transformation locale des matières premières et des ressources naturelles de la région au profit des citoyens ainsi que la mobilisation de la CEDEAO avec davantage de dynamisme, pour le règlement des problèmes structurels de la région qui impactent très négativement la vie des citoyens ».
Concernant l’intérieur, le FOSCAO invite l’ensemble des organisations de la société civile à « contribuer activement au dialogue, la paix et la cohésion sociale » non sans affirmer son « entière disponibilité à contribuer, aux côtés de la CEDEAO, du peuple du Niger et de toutes les parties prenantes, à la paix, à un retour à l’ordre constitutionnel, au développement socioéconomique et à la cohésion sociale ».
Respect des instruments légaux internationaux
Pour autant, le FOSCAO « condamne tout coup d’état aussi bien militaire, constitutionnel ou électoral » et rappelle que l’article 58 du traité révisé de la CEDEAO a des provisions quant à la sécurité régionale et que la CEDEAO s’est dotée d’un cadre de prévention des conflits (CPCC, ECPF) depuis 2008, ainsi que l’article 13 du traité révisé de la CEDEAO a créé le parlement de La CEDEAO.
« Les États membres de la CEDEAO sont tenus de se conformer aux instruments légaux internationaux et régionaux, notamment le Protocole de la CEDEAO sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance » et la « Charte africaine de la démocratie, des élections et de la bonne gouvernance (ACDEG) ».
Le président de la Commission de l’Union Africaine a nommé, le 21 Janvier 2023, le Dr Mohamed Ibn Chambas comme haut représentant pour « faire taire les armes » (Silencing the Guns).
Les Nations Unies (ONU) dont tous les états de la CEDEAO sont membres, prévoit des outils et mécanismes de résolution des conflits. Les chapitres 6, 7 et 8 de La Charte des Nations Unies ont des dispositions respectivement sur le Règlement pacifique des différends.
L’action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d’acte d’agression ; et les Accords régionaux.
Réaffirmant ses plus profondes préoccupations face aux trop nombreux problèmes non encore résolus qui rongent la région et qui affectent négativement la vie des citoyens, le FOSCAO dénonce une « exploitation inéquitable des ressources naturelles qui ne sont ni transformés localement et qui profitent pas aux citoyens, ainsi que l’extrémisme terroriste et les conséquences des changements climatiques sans oublier les conditions discutables des femmes et des enfants ».
Un traitement inhumain et raciste des citoyens, femmes et enfants, dits migrants, dans plusieurs pays méditerranéens. Des problèmes de corruptions généralisées, notamment aux frontières terrestres, empêchant la libre circulation des personnes, des biens et services, freinant ainsi l’intégration régionale ».
« La répétition des coups d’États aussi bien militaires, constitutionnels, et électoraux, situation symptomatique d’un malaise profond, résultant d’une crise de gouvernance, de corruption endémique, de restriction de l’espace civique et politique, une instrumentalisation de la justice dans les États pour bloquer des adversaires politiques, ou pour emprisonner des journalistes et des citoyens ayant des opinions différentes des pouvoirs, avec des prisonniers et exilés politiques et d’une politisation extrême des armées nationales, ainsi que des administrations publiques qui devraient demeurer neutres et républicaines ».
Un coup d’État militaire survenu le 26 juillet 2023 a conduit au renversement du Président élu Mohamed Bazoum. A la suite de la réunion extraordinaire des chefs d’états du 29 Juillet 2023 à Abuja au Nigeria, la CEDEAO a, sans dialogue préalablement connu du public, immédiatement émis une série de sanctions contre le Niger, y compris la menace d’intervention militaire.
Le FOSCAO se définit comme « le canal de dialogue institutionnalisé entre les organisations de la société civile et la CEDEAO ». Il « renforce les capacités, fait des plaidoyers, mobilise la société civile, s’engage dans la formulation, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des politiques pour une Afrique prospère, stable et en paix ». Pour les partenaires institutionnels, il se définit comme « un excellent canal, un guichet unique pour un engagement systématique entre les institutions et les organisations de la société civile, pour des résultats percutants ».
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