TABASKI -Installée en plein cœur de l’Avenue Cheikh Sidaty Aïdara de Grand Dakar, Aïcha Diop, la trentaine, est gérante depuis plusieurs années, d’un point de transfert d’argent.
Selon cette diplômée en commerce et marketing, la période de la tabaski vient comme “une accalmie’’ pour le secteur, fortement touché par la pandémie de la Covid-19.
’’Depuis que la maladie est entrée dans ce pays, c’est à peine si je parviens à assurer en même temps, le paiement de la location et celles des factures d’électricité et d’internet. Mais depuis un mois et surtout en cette période de tabaski, je rends grâce à Dieu car les clients viennent de plus en plus’’, confie-t-elle.
Toutefois, comparativement aux années précédentes, ’’les chiffres d’affaires sont largement à la baisse’’, s’empresse-t-elle de préciser.
Les raisons de cette baisse sont multiples, mais elles sont principalement dues à la réduction du volume des transferts des Sénégalais de l’étranger, a fait savoir Daouda Cissé, lui aussi gérant d’un point de transfert, sur une rue adjacente.
Au cours des dernières années, les montants de transfert de la diaspora sénégalaise ont pris une ampleur considérable. Selon une étude menée par l’Agence nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), rendue publique en 2018, leur volume est passé d’un milliard 116 millions 500 francs CFA, en 2000, à 1110 milliard de franc CFA, en 2017, soit une contribution de 13% sur le PIB national.
’’Aujourd’hui, c’est au compte-goutte que je réalise ce type transfert, alors qu’il constituait plus du tiers de mes opérations journalières’’, a indiqué M. Cissé.
Et chose peu fréquente : ’’il arrive fréquemment, depuis quelques temps, que des parents d’ici envoient de l’argent à leurs proches, dans le besoin à l’étranger, notamment en France, en Italie et en Espagne’‘, renseigne-t-il.
Selon Abdoulaye Ndiaye, un informaticien de formation, également gérant d’un bureau de transfert d’argent à Niary Tally, même s’il est évident que le secteur des transferts a subi les contrecoups de la pandémie, il était déjà à l’agonie depuis plusieurs années, en raison de la concurrence déloyale que se mènent les opérateurs sur les frais de commissions, de plus en plus revus à la baisse.
’’Si dans les années 2000-2015, le secteur faisait rêver, au point que tout le monde voulait avoir sa propre enseigne de transfert d’argent, maintenant, c’est à peine si on gagne quelque chose’’, dit-il.
A l’en croire, ’’les opérateurs de plus en plus nombreux font régulièrement du dumping, sur les frais de commissions pour appâter le plus de clients possible, au détriment des prestataires obligés de s’adonner à d’autres activités parallèles telles que le multiservices, ou encore la vente de matériel et consommable électronique, entre autres, pour s’en sortir’’.
’’Si l’on n’y prend pas garde, plus de trois mille emplois directs et soixante mille emplois indirects seront perdus, dans les années à venir, avec la faillite inéluctable des petits prestataires qui constituent plus de 90% du réseau national, si cette même tendance se poursuit’’, craint de son côté Mor Bèye, établi au cœur du marché des HLM.
Pour ce membre du réseau national des prestataires de transfert d’argent (Renapta), la seule solution qui incombe à l’Etat est d’exiger le respect de la réglementation, notamment l’instruction 13 de la BCEAO, relative aux modalités d’exercice de l’activité de transfert rapide d’argent en qualité de sous-jacent, au sein de l’Union monétaire ouest africaine.
Ce texte communautaire adopté en 2015 par la Banque centrale, exige des opérateurs, la création d’une plateforme sécurisée et fonctionnelle, confiée aux banques, seules habilitées à donner des agréments à des partenaires formés, sous la supervision de la BCEAO.
Selon Mor Bèye, l’effectivité de cette règle, contribuerait pleinement à assainir le secteur du transfert d’argent et à donner aux prestataires, le rang qu’ils méritent, proportionnellement à l’investissement et au travail fourni par ces derniers.
Maderpost / APS
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