L’Afrique subsaharienne (Afss) fait face à une grande pénurie de financement liée au tarissement de l’aide au développement et à l’accès de plus en plus restreint aux financements privés. Ce n’est pas sans conséquence sur la croissance économique de la région qui devrait descendre à 3,6 %.
CROISSANCE – La conjoncture mondiale caractérisée par le ralentissement économique mondial, la croissance en Afrique subsaharienne (Afss) devrait descendre à 3,6 % avant de rebondir à 4,2 % en 2024, parallèlement au redressement de l’activité au niveau mondial, à la baisse de l’inflation et à l’assouplissement progressif de la politique monétaire, renseignent les dernières Perspectives économiques régionales du Fonds monétaire international (Fmi) pour l’Afrique subsaharienne. Pour la deuxième année consécutive, l’Afrique subsaharienne enregistre un taux de croissance inférieur à celui de l’année précédente.
Toutefois, le directeur du département de l’Afrique du Fmi, Abebe Aemro Selassie, renseigne que « la croissance dans la région varie d’un pays à l’autre. Certains pays, en particulier ceux de la Communauté d’Afrique de l’Est et les pays riches en ressources non pétrolières, devraient mieux s’en sortir que d’autres, mais certains des pays les plus importants d’Afss sur le plan économique tirent le taux de croissance moyen de la région vers le bas : c’est le cas de l’Afrique du Sud, où la croissance devrait fortement ralentir pour s’établir à seulement 0,1 % en 2023 ».
Vers une inflation de plus de 10%
La dette publique et l’inflation sont à des niveaux jamais vus depuis des décennies. Pour s’en convaincre, « la moitié des pays de la région sont en proie à une inflation supérieure à 10 %, qui réduit le pouvoir d’achat des ménages et frappe de plein fouet les couches les plus fragiles de la population », mentionnent les spécialistes de la croissance. Selon le Fmi, le resserrement rapide de la politique monétaire au niveau mondial a fait augmenter les coûts d’emprunt des pays d’Afss sur les marchés intérieurs comme sur les marchés internationaux. L’ensemble des pays pré émergents d’Afrique subsaharienne sont privés d’accès aux marchés financiers depuis le printemps 2022. L’année dernière, le taux de change effectif du dollar a affiché un niveau jamais atteint en 20 ans, ce qui a eu pour effet de renchérir le remboursement des dettes libellées dans cette monnaie. Au cours de la décennie écoulée, « le ratio des paiements d’intérêts sur les recettes publiques a doublé dans le pays moyen d’Afss », indique le Fmi. Cette évolution, conjuguée à la réduction des budgets d’aide au développement et des entrées de capitaux en provenance des partenaires de la région, entraîne une grande pénurie de financement dans la région.
« Les habitants d’Afrique subsaharienne ressentent les effets de la crise de financement. Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le coût de la vie a augmenté, l’emprunt est devenu plus onéreux et l’accès à des financements à des conditions abordables s’est restreint », a dit M. Selassie.
Conjugués à la baisse de longue date de l’aide au développement et à la récente diminution des investissements effectués par les partenaires de la région, « ces facteurs entraînent la diminution des moyens consacrés aux services de base comme la santé, l’éducation et les infrastructures. Faute de mesures appropriées, cette pénurie de financement entravera les initiatives déployées par les dirigeants de la région pour favoriser l’émergence d’une population instruite et qualifiée et devenir la force motrice de l’économie mondiale dans les années à venir », rajoutera-t-il.
L’Afrique subsaharienne est loin d’être sans recours.
Selon M. Selassie, quatre pistes prioritaires pour remédier aux déséquilibres macroéconomiques s’offrent à la région : Premièrement, il s’agit de renforcer la gestion des finances publiques et de rééquilibrer les budgets, sur fond de durcissement des conditions financières. Deuxièmement, de juguler l’inflation. Les autorités monétaires devront s’armer de prudence tant que l’inflation n’aura pas emprunté une trajectoire clairement descendante et qu’elle ne se sera pas rapprochée de la fourchette visée par les banques centrales. Troisièmement, il faut laisser les taux de change s’ajuster, tout en atténuant les effets économiques néfastes des dépréciations, comme l’accélération de l’inflation et la hausse de l’endettement. Quatrièmement, il est question de veiller à ce que les nécessaires mesures de financement de l’action climatique ne soient pas prises au détriment des besoins élémentaires comme la santé et l’éducation.
Maderpost / Sud quotidien