La circulation de faux billets peut compromettre l’économie nationale, fragiliser le système financier du pays et mettre en péril sa sécurité par l’alimentation d’une économie souterraine, alerte l’économiste-chercheur Demba Moussa Dembélé. Eu égard à ces dangers, le gouvernement doit durcir l’arsenal répressif contre ce fléau, améliorer la communication pour mieux expliquer à l’opinion le danger que représente la fausse monnaie pour l’économie, la société et la sécurité du pays, conseille l’ancien agent du ministère de l’Economie et des finances du Sénégal.
TRAFIC DE FAUX BILLETS – Ces derniers temps, on a noté au Sénégal plusieurs cas de trafic de faux billets, se chiffrant à plusieurs milliards de francs CFA. Heureusement, « la Gendarmerie a pu déceler à temps ces activités criminelles et mettre hors d’état de nuire leurs auteurs », s’est réjoui l’économiste Demba Moussa Dembélé.
A l’en croire, le faux monnayage est une activité menée aussi bien par des réseaux criminels que par des hommes politiques ayant pignon sur rue. Pour s’en convaincre, l’économiste tient à rappeler l’arrestation rocambolesque d’un ancien député du parti de l’Alliance pour la République (Apr) qui avait par la suite bénéficié d’une ‘’liberté provisoire’’ « qui dure toujours », s’en désole-t-il. L’économiste-chercheur et non moins président de l’Africaine de recherche et de coopération pour l’appui au développement endogène (Arcade) poursuit : « l’inondation du marché par de faux billets comporte plusieurs dangers pour l’économie et la sécurité du pays ».
SOURCE D’INFLATION GALOPANTE
Le premier danger est le gonflement de la masse monétaire dans le pays supérieur à celle mise en circulation par la Banque centrale. Ce qui peut générer une « hausse artificielle des prix des biens et des services », allant jusqu’à une « inflation galopante », hors de contrôle dans certains secteurs. En outre, la circulation de faux billets peut entraîner de grandes « pertes pour l’économie en créant des pénuries artificielles de biens », sans rapport avec l’économie réelle. La combinaison de ces facteurs peut porter préjudice à la « valeur de la monnaie officielle sur les marchés des changes », alerte l’ancien agent du ministère de l’Economie et des finances du Sénégal, chercheur associé à l’Institut de Finance internationale, à Washington DC dans le passé.
CRISE DE CONFIANCE DANS LE SYSTEME FINANCIER
En dehors de la hausse artificielle des prix, le spécialiste en économie et en finance qui fut chercheur-associé à l’Institut de finance internationale, à Washington DC fait aussi savoir que la circulation de faux billets peut créer une « grave crise de confiance des agents économiques dans le système financier du pays ».
Notamment, « les entreprises de transfert d’argent » qui sont devenues les canaux privilégiés par lesquels d’importantes sommes sont échangées chaque jour. L’économiste laisse entendre que les agents économiques pourraient devenir de plus en plus « méfiants et prudents dans les transactions ».
Et cela pourrait entraîner le « ralentissement, voire le frein des investissements dans certains secteurs », prévient-il. En effet, la psychose d’une économie infestée de faux billets en circulation pourrait inciter les investisseurs à revoir à la baisse leurs plans d’investissements ou bien décider de les suspendre en attendant des jours meilleurs. Demba Moussa Dembélé de préciser que la circulation de faux billets tend à affecter surtout le secteur informel du fait du manque de moyens de détection de la fausse monnaie et de l’ampleur des transactions faites avec de l’argent liquide.
ALIMENTATION D’UNE ECONOMIE SOUTERRAINE
Convaincu de l’impact des faux billets, il dira aussi qu’« en plus de déstabiliser l’économie, ceux-ci (les faux billets) peuvent alimenter une « économie souterraine aux mains de réseaux criminels ». En effet, le faux monnayage sert à financer les activités des groupes criminels et terroristes. Ce qui pose un « problème de sécurité nationale du pays », prévient-il.
Pour lutter efficacement contre la circulation de la fausse monnaie, l’économiste-chercheur dira qu’en plus du renforcement des moyens pour les forces et organes luttant contre le faux monnayage, il faut infliger des « peines de prison très sévères pour servir d’effet dissuasif aux criminels tapis dans l’ombre ». A côté du renforcement de la législation répressive, il importe également d’« améliorer la communication pour mieux expliquer à l’opinion le danger que représente la fausse monnaie pour l’économie, la société et la sécurité du pays », conseille-t-il.
Maderpost / Sud quotidien