Invité au panel organisé samedi dernier par l’Anps (Association nationale de la presse sportive du Sénégal) pour diagnostiquer les 15 participations du Sénégal à la Coupe d’Afrique de football, Papa Massata Diack a partagé son expérience.
FOOTBALL – Sur la base de son vécu avec l’Equipe nationale, celui qui a été l’agent marketing de la fédération et acteur clé de la réussite du football sénégalais en 2002 (finale de la Can et quart de finale du mondial) a formulé, à l’endroit de la fédération, des recommandations non négligeables pour une bonne participation à la Coupe d’Afrique.
Le vœu de Lamine Diack : «Quand la fédération est venue chez nous, nous présenter ses condoléances, mon grand frère Seydou qui fut un grand footballeur, leur a dit que tout ce que le Sénégal peut faire pour rendre hommage à Lamine Diack, c’est de gagner la Coupe d’Afrique. Il leur a dit que le souhait le plus ardant de Lamine Diack, c’était de voir le Sénégal remporter la Can. Il paraît même que père Lamine Diack appelait Aliou Cissé pour lui donner des conseils. Donc si le Sénégal veut lui rendre hommage, il faut gagner la Can.»
L’environnement de l’équipe : «Une Coupe d’Afrique, c’est une question de fierté nationale pour tous les pays du continent. Aujourd’hui, le Sénégal est un pays en voie de développement, donc on ne doit pas être des laissés-pour-compte. Pour réussir cette compétition, il y a des choses non négligeables comme l’environnement de l’équipe. On va au Cameroun, un pays qui est notre bête noire. Je recommande à la fédération de veiller à la sécurité de l’équipe sur tous les plans. La protection de l’environnement de l’équipe est importante. En 2002, on appelait ça dans nos réunions avec le Président Abdoulaye Wade, «l’environnement psychologique». Ça comprend aussi bien une protection rapprochée avec le Gign (Groupe d’intervention de la gendarmerie Nationale) où de la BIP (Brigade d’intervention polyvalente) que d’autres aspects.»
La motivation financière : «Quand j’ai pris le sponsoring de la Fédération sénégalaise de football en 2001, j’ai eu la chance de travailler avec Abdoul Wahab Bâ, dont je salue au passage la mémoire. Si j’ai réussi, c’est parce qu’il y avait ce doyen extraordinaire, cet homme fédérateur, Abdoul Wahab Bâ, qui était le Secrétaire général de la Confédération africaine d’athlétisme. J’allais à son bureau tous les matins pour lui dire ce que j’ai l’intention de faire avec les sponsors et il m’orientait. Il a vécu la campagne de Caire 1986, il avait donc l’expérience de la Can. Il m’a dit qu’il faut construire une dynamique de groupe. Et pour construire cette dynamique, il faut une motivation financière. C’est moi qui ai paraphé dans le bureau de l’ambassade du Sénégal à Paris en janvier 2002, sous la présence de Joseph Ndong et Adama Thiam, le contrat de performance entre l’Equipe nationale et les joueurs. Ce contrat, quand je l’ai montré à père Lamine Diack, il m’a dit où est-ce que vous allez trouver cet argent ? Je lui ai dit le sport de haut niveau, c’est la motivation. Pour que les joueurs mouillent le maillot, il faut une motivation financière derrière. Il faut les mettre dans les mêmes conditions qu’en club. On a dit à chaque joueur, un match amical, c’est 1 million, match qualification première tour, deuxième tour Can, c’est 4 millions et Mondial 12 millions de FCfa. On leur a dit tout ce que le sponsor va donner, on le leur verse intégralement, même moi je ne prends pas de commissions. C’est ça qui peut jouer sur le mental.»
Le conseil des sages : «La fédération ne doit pas être hautaine. Il faut écouter tout le monde. A l’époque, on avait un Conseil des sages. S’il y a des conflits entre les joueurs, ce sont les sages qui interviennent. En 2002, il y avait un conflit entre Henry Camara et El Hadji Diouf, lors de la CAN. Il a fallu l’intervention des sages pour régler le problème avant d’aller au Mondial. Entre la CAN et le Mondial, il nous a fallu 5 mois pour arrondir les angles. C’est au dernier match amical du Sénégal avant la Coupe du monde que le problème a été réglé. Henry Camara était dans la même chambre que Pape Bouba Diop et El Hadji Diouf partager la chambre avec Fadiga. On les (Diouf et Henry) a pris dans la chambre de Pape Thierno, le logisticien, pour arrondir les angles. Pour cette Can 2022, je propose des sages comme El Hadji Mansour Sy «Souris», Yatma Diop, Magib Sène, Adama Thiam, Abdoulaye Sakho, un très grand arbitre…»
Un slogan fédérateur : «La dynamique de groupe est très importante, mais pas seulement au sein du groupe. Elle se construit en fédérant les cœurs. Il faut trouver un slogan fédérateur qui réunit tous les Sénégalais autour de l’équipe. En 2002, on avait comme slogan : «Y croire, c’est gagner.» Ce serait bien d’organiser avec les sponsors, avant la Can, un dîner d’accompagnement au Musée des Civilisations Noires pour galvaniser les ‘’Lions’’. On aura aussi besoin des supporters. La fédération doit faire une contribution pour que les supporters partent parce que, sans eux, il n’y a pas de football. Il faut aussi penser aux familles des joueurs. À notre époque, toutes les familles des joueurs avaient un représentant. Les femmes ou les compagnes des joueurs étaient aussi de la partie. En 2002, c’est moi qui ai payé de ma poche 198 millions de FCfa pour les familles des joueurs et je ne me suis jamais fait rembourser par l’État du Sénégal.»
Maderpost / Igfm