Les performances économiques pour le deuxième trimestre ont commencé à être publiées. Les chutes de PIB de nombreux pays sont à des niveaux inédits. La France a ainsi accusé un plongeon de 13,8% de son Produit intérieur brut. C’est encore pire pour les États-Unis, qui connaissent une récession sans précédent.
INTERNATIONAL – La catastrophe économique annoncée se confirme. Alors que la crainte d’une deuxième vague de Covid-19 se profile, les récentes statistiques économiques de nombreux pays sont alarmantes. Le poids des confinements et des mesures sanitaires prises par les gouvernements à travers la planète a fait que le deuxième trimestre a été bien pire que le premier.
La France n’échappe pas au «massacre». L’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a annoncé ce 31 juillet que la France enregistrait un plongeon de 13,8% de son Produit intérieur brut (PIB) au deuxième trimestre. Il s’agit tout simplement de la pire performance jamais enregistrée par l’organisme depuis son apparition. Le précédent record datait de 1968, quand le pays avait été quasiment mis à l’arrêt par la grève générale du fameux mois de mai.
Malgré la chute du PIB, l’INSEE optimiste pour la suite
L’INSEE a également révisé à la baisse sa mesure de l’activité au premier trimestre. Le PIB français a chuté de 5,9% au lieu des 5,3% annoncé précédemment. La pointe d’optimisme est à chercher du côté des anticipations des analystes, qui estimaient que la France allait faire face à une chute de 17% de son PIB au deuxième trimestre. Paris aurait donc limité la casse.
Dans le détail, la consommation des ménages, moteur principal de la croissance, a reculé de 11%. C’est encore pire pour les investissements des entreprises, qui ont chuté de 17,8%. La France, à l’instar de ses concurrents, paie également cher le ralentissement du commerce international. Ses exportations ont plongé de 25,5%.
«L’évolution négative du PIB au premier semestre 2020 est liée à l’arrêt des activités “non essentielles” dans le contexte du confinement mis en place entre mi-mars et début mai», a précisé l’INSEE dans un communiqué.
L’organisme note cependant une reprise: «La levée progressive des restrictions conduit à une reprise graduelle de l’activité économique aux mois de mai puis de juin, après le point bas atteint en avril.»
Le troisième trimestre devrait voir une forte remontée de l’activité, avec une hausse de 19% du PIB, estime l’organisme de statistiques. Natixis ainsi que la Banque de France sont un peu moins optimistes, avec des prévisions à +16% et +14%.
L’économie de la zone euro en chute libre
Les voisins de la France font également la moue. «Les principales économies enregistrent des réductions d’une portée analogue en raison de la propagation de la pandémie», rappelle l’Insat, équivalent transalpin de l’INSEE.
Ainsi l’Italie est-elle officiellement entrée en récession, selon l’Istat. La péninsule a enregistré une chute de 12,4% de son PIB au deuxième trimestre. À l’instar de la France, la dégringolade est «sans précédent». Pour ne rien arranger, elle fait suite à un recul de 5,4% au premier trimestre. Le PIB italien «enregistre sa valeur la plus basse depuis le premier trimestre 1995», selon l’organisme italien de statistiques.
La situation est telle que l’Italie devrait subir en 2020 la pire récession depuis… la Seconde Guerre mondiale. Les avis divergent sur l’ampleur de la chute du PIB, mais celle-ci devrait se situer entre 8 et 14%.
Restons dans le sud de l’Europe pour aller faire un tour du côté de l’Espagne où le ciel économique est encore plus sombre qu’en Italie. Madrid est aussi entré en récession au deuxième trimestre. Le PIB s’est écroulé de 18,5% par rapport au trimestre précédent, d’après les données publiées par l’Institut national de la statistique (INE).
Quatrième économie de la zone euro, l’Espagne a également enchaîné deux trimestres de baisse du PIB consécutif. Au premier trimestre, l’activité avait chuté de 5,2%. Comme en France, Madrid peut se consoler en se disant que le pays a limité la casse. La Banque d’Espagne prévoyait une récession encore plus importante au deuxième trimestre: de -16 à -22%.
L’Espagne a beaucoup souffert des mesures sanitaires visant à lutter contre la propagation du Covid-19. Le secteur du commerce, des transports et de l’hôtellerie a été très fortement impacté. La production de richesse pour l’ensemble de ces secteurs a ainsi baissé de 40% par rapport au trimestre précédent. Même sombre tableau du côté de la construction ou de l’industrie, avec des chutes de 24 et 18,5%.
Le tourisme pèse 12% du PIB des Ibères et ses revenus se sont écroulés de 60% par rapport au deuxième trimestre 2019. à l’instar de la France, la consommation des ménages s’est effondrée: -21% par rapport au premier trimestre. Les investissements des entreprises ont eux chuté de 22%. Quant aux exportations, elles ont reculé de plus d’un tiers sur le trimestre.
L’Espagne va faire face à une récession historique en 2020. Sur les chiffres, il y a débat. Quand le gouvernement avance un recul du PIB de 9,2%, la Banque d’Espagne est plus pessimiste et anticipe un PIB à -15%.
Pour faire face, le pays pourra compter sur les 140 milliards d’euros dont il bénéficiera au titre du plan d’aide européen de 750 milliards d’euros récemment signé entre les 27.
D’après Nadia Calviño, ministre de l’Économie, la situation aurait pu être bien pire sans les mesures du gouvernement, notamment l’extension du chômage partiel, les crédits garantis par l’État ou encore les aides pour les indépendants. Sans cela, l’Espagne aurait pu connaître, selon la ministre, «une chute du PIB de plus de 25%».
Les États-Unis en souffrance
Reste que les Ibères sont en difficulté. Fin juin, le taux de chômage atteignait les 15,3%. Il devrait monter à 19% à la fin de l’année, d’après les chiffres du gouvernement. Le Fonds monétaire international (FMI) anticipe une situation encore plus grave, prévoyant 20,8% de chômage fin 2020.
Même la toute-puissante Allemagne est KO. Le PIB y a chuté de 10,1% au deuxième trimestre. Il s’agit pour le pays de la pire récession depuis l’après-guerre. Florian Hense, économiste chez Berenberg, a eu des mots très forts pour qualifier la catastrophe. D’après lui, la pandémie a «mis en cendre presque dix ans de croissance».
Afin de mesurer le caractère absolument historique de la crise actuelle, il est intéressant de comparer avec la période 2008-2009. Au premier trimestre 2009, au plus fort de la crise économique, le PIB allemand ne s’était contracté «que» de 4,7%. L’Allemagne fait désormais face à la peur de la déflation. Outre-Rhin, les prix ont baissé de 0,1% en juillet, une première depuis 2016.
L’économie allemande, largement basée sur les exportations, a fortement souffert de la chute du commerce international. La production manufacturière y a baissé de 17,9% en avril. Le même mois, les commandes à l’industrie ont fléchi de 25,8% et les exportations se sont, elles, effondrées de 31,1%.
Au niveau européen, la zone euro a enregistré une chute historique de son PIB: -12,1%, a annoncé ce 31 juillet Eurostat. C’est «de loin» la baisse la plus importante «depuis le début des séries temporelles en 1995.»
Outre-Atlantique, le climat économique n’est pas meilleur, bien au contraire. Les États-Unis sont entrés en récession. La chute du PIB au deuxième trimestre a de quoi effrayer: -32,9%. La fragile reprise a été mise en péril par une épidémie que le pays n’arrive pas à juguler. Le nombre de nouvelles contaminations quotidiennes dépasse toujours les 60.000. L’institut John Hopkins a compté 1.592 décès en 24h au 28 juillet. Il s’agit du plus lourd bilan depuis la mi-mai.
Résultat: les inscriptions au chômage repartent à la hausse pour la deuxième semaine d’affilée alors que la flexibilité du marché de l’emploi américain avait permis de faire reculer le taux de chômage depuis le mois d’avril. Rien que pour la période allant du 20 au 25 juillet, 1,43 million d’Américains ont pointé au chômage. Les dépenses de consommation ont chuté de 34,6% en rythme annualisé et les exportations se sont effondrées: -64,1%.
Le retour de mesures sanitaires drastiques prises par plusieurs États a sabré la reprise économique. Tout cela commence «à peser sur l’activité économique», a reconnu le 29 juillet Jerome Powell, président de la Réserve fédérale américaine (FED).
Seule la Chine s’en sort bien
Diane Swonk, économiste de Grant Thornton, souligne que tout dépend du virus: «Nos prévisions montrent un rebond modéré au troisième trimestre, mais qui est maintenant remis en question par une résurgence des infections au Covid-19. Changer le cours du Covid: changer le cours de l’économie.»
Cette dernière rappelle que les États-Unis font face à la «plus forte contraction trimestrielle depuis que le gouvernement a commencé à publier ces données» en 1947. «Le précédent record était une baisse de 10% au premier trimestre 1958», a-t-elle ajouté. Au cœur de la Grande Récession de 2009, la baisse avait été quatre fois moins importante.
🌍 FLASH – La Chine pourrait devenir la 1ère puissance #économique mondiale devant les États-Unis dès 2024. La #France passerait de la 6ème à la 10ème place. (Projection WEF) #IMF #WB pic.twitter.com/Uf4XQ75pJN
— Mediavenir (@Mediavenir) July 27, 2020
Dans l’obscurité économique qui frappe le globe, la lumière vient de Chine. Le Bureau national des statistiques a annoncé que le PIB avait augmenté de 3,2% entre avril et juin. Tout ceci va dans le sens des projections de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, qui voient Pékin ravir aux États-Unis la première place des plus importants PIB du monde dès 2024.
Maderpost / Sputnik