Ce qui fait une des dimensions du métier politique, ce qui fonde la croyance en son utilité sociale tient à la capacité d’agir sur le monde et surtout à la capacité de faire croire et (et de croire soi-même a minima lorsqu’on est en charge politique) en cette promesse.
TRIBUNE – Cet enchantement du politique, si on tient qu’il est au principe de la domination qu’il exerce, repose ordinairement sur des processus collectifs producteurs d’amnésie des échecs antérieurs, sur des mécanismes tout autant collectifs de brouillage du suivi des effets de l’action, et des causalités des transformations engagées, et sur le fonctionnement de la compétition autour de rituels, de mots, de gestes, de promesses, de critiques et de combats qui disent sans cesse les perspectives de renouveau.
Cette présomption d’efficacité (ou cette magie si l’on veut) peut cependant fluctuer historiquement et c’est la piste que l’on va suivre ici, en dépliant en quelque sorte cette incise de Daniel Gaxie, à propos des croyances en l’efficacité politique : « Même si ces croyances se sont récemment affaiblies et si ceux qui pensent que la politique ne peut pas tout faire […] sont plus nombreux que par le passé, elles demeurent au fondement de la plupart des investissements politiques » (Gaxie, 2003, p. 34) Comment l’impuissance, c’est-à-dire ici l’impuissance diagnostiquée, dénoncée, vécue, peut-elle être prise en charge par la profession politique ?
Comment affecte-t-elle le métier de gouvernant et les investissements politiques qu’il engage ?
Brigitte Gaïti, professeure de science politique à Paris 1
Maderpost