Les échanges à fleurets mouchetés ces derniers jours entre des ténors de l’opposition et le président de la République renseignent sur leur état d’esprit, leur envie d’en découdre au besoin, pour marquer leur territoire, montrer et démontrer aux Sénégalais qu’ils ne sont pas près de céder du terrain à quelques encablures des locales, quelle que soit la tension. Au contraire ! « A bout de nerfs ! » « Nerfs à fleur de peau ! », quelle que soit la formule ou l’expression, il est clair que nous sommes dans le cœur d’une guerre des nerfs ouvertement assumée par l’opposition, qui a réussi à faire sortir de ses gonds le Président Macky Sall, en l’emmenant à se prononcer publiquement, depuis Paris, sur des attaques personnelles formulées par un Ousmane Sonko de chauffe ; à admettre qu’il n’est pas indifférent aux attaques ; qu’il donne du crédit aux propos de Sonko et Barthelemy Dias. De ce point de vue, « Barth » et Sonko ont fait mouche, touchant là où ça fait mal. La repartie présidentielle ne s’est pas fait prier. Elle a été du même cru que l’attaque frontale. A sa hauteur. Connaissant Macky Sall, il ne faut pas s’attendre à autre chose de lui que d’une réponse de la même trempe. Ne se faisant pas prier pour bander les muscles et croiser le fer avec ses adversaires, l’homme et sa tonalité ont donné ceci : « Personne ne peut m’intimider. C’était impossible avant que je ne sois chef d’Etat, à fortiori aujourd’hui que Dieu m’a mis au pouvoir. Il y a des gens qui, si vous les suivez dans leur logique, vous poussent à poser des actes regrettables. ». Du pur Macky, même s’il est plutôt attendu d’un président de la République qu’il décrispe la situation. Sauf que Macky Sall n’est pas du genre, surtout quand il mesure les enjeux, quand, mieux placé que quiconque pour lire le contexte, il tire les enseignements et agit du mieux qu’il peut, en fonction de ses intérêts. Sa réponse qui trahit son tempérament et acte le côté « guerrier » de l’homme, lui fait dire qu’il ne l’est pas moins que ses adversaires. Me Wade étant bien placé pour le savoir pendant qu’il était au pouvoir et l’avait comme opposant, peut en témoigner, veut faire entendre le président. Qu’ils se le disent donc une bonne fois pour toute, il faut aller chercher autre chose pour le déstabiliser. Cela ne souffre d’aucun doute, fait comprendre l’homme Macky Sall, non sans rappeler, quand même, sa fonction, dont celle de la première institution du pays qu’il incarne. Autrement dit, on ne s’attaque pas comme on veut au chef de l’Etat. Il y a des limites à ne pas franchir. Il est le Sénégalais le mieux protégé. La police, la gendarmerie veillent au grain, même s’il n’a pas envie de les lâcher sur eux parce qu’il ne veut pas regretter ses actes. Cela dit, les forces de l’ordre sont mises aussi devant leur responsabilité. L’allusion est subtile. Macky Sall met chacun devant ses responsabilités et tiendra chacun pour responsable de ses actes posés ou manqués, y compris l’opposition, surtout celle qui le défie ouvertement au point de laisser craindre pour son intégrité physique. Encore une fois, il y a une limite à tout, fait-il savoir. Pourquoi l’opposition durcit le ton Le durcissement du discours de l’opposition qui n’exclut pas un transfert de son « combat » dans la rue avec le pouvoir s’entend et s’explique depuis les émeutes de mars 2021. Facilitées par les manquements et failles de sécurisation des biens et des personnes, portées par un niveau de violence sans précédent, ces émeutes se sont installées dans l’imaginaire populaire, laissant peser une lourde charge cognitive sur le quotidien et la cohésion nationale. Telle une chape de plomb, le mois de mars 2021 est toujours agité dans les discours, tant de la société civile que ceux de l’opposition. Comme pour dire que le pouvoir sait ce qu’il ne doit pas faire pour que le pays n’implose pas et que l’opposition sait comment s’y prendre pour que tout soit sens dessus sens dessous. Dans une telle configuration, les deux parties aidées par la société civile ne peuvent que trouver un terrain d’entente pour que la paix règne. Et cette paix a un prix. L’amnistie, prix de la paix sociale Ayant très peu de place d’ici 2024 pour l’ouverture de nouveaux procès qui laveront l’honneur de l’ancien tout puissant ministre d’Etat et fils du Président Wade, Karim Wade en l’occurrence, et celui de l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, principalement, il va bien falloir trouver une parade qui mettra tout ce beau monde sur un pied d’égalité, même si la solution n’est pas faite pour effacer dans la mémoire des électeurs les accusations qui leur ont valu un séjour carcéral à Rebeuss. Mais du moment que l’idée de l’amnistie agitée par le President Macky Sall, lui-même en 2018, fait l’affaire de tous, elle devient nécessaire et beaucoup plus qu’on ne le croit et le dise. L’amnistie est une bouée de sauvetage électorale pour tous. Barthélémy Dias en jouirait définitivement, après sa condamnation à deux ans de prison dont six mois ferme, le 16 février 2017 par le tribunal de Dakar suite à l’attaque de sa mairie en décembre 2011 par des hommes du PDS dont l’un, Ndiaga Diouf, fut tué par balle. Pour rappel, Barthélémy Dias était sorti libre du tribunal, sa condamnation à six mois de prison ferme ayant déjà été couverte par sa détention préventive en 2012. Voulant postuler aux législatives de 2017, il faisait alors savoir dans la cour de la maison de son père à Sicap Baobab, qu’aucun citoyen sénégalais ne peut se présenter à une élection. « Nous sommes dans un combat politique face à une stratégie qui consiste à me rendre inéligible ». Ce qui était valable en 2017, l’est encore aujourd’hui. D’où le recours en appel. L’on peut s’étonner de la condamnation de M. Dias, dans cette triste fusillade qui a coûté la vie à un jeune homme. « Ce procès, c’est un procès politique. Personne n’arrive à comprendre qu’une personne condamnée pour un meurtre puisse écoper de deux ans de prison, dont six mois ferme, souligne-t-il. Et jusqu’à présent il n’y a aucune preuve. », disaient les avocats du maire.A ce jour, la justice n’a pas établi que la balle ayant entrainer la mort de Ndiaga Diouf provenait de l’arme de Barthélémy Dias. Toujours est-il qu’il a été condamné pour délits de coups mortels, coups et blessures volontaires et détention illégale d’arme sans autorisation administrative. En plus des deux ans de prison, dont six mois ferme, auxquels il avait été condamné, il devait également payer la somme de 25 millions de francs CFA à la famille de Ndiaga Diouf, pour dommages et intérêts. Une amnistie qu’il ne sollicite pas ou n’appelle pas de ces vœux règlerait définitivement la question. A charge pour l’Etat de se substituer et d’arrondir les angles avec la famille Diouf. Et pas que ça, l’autre bénéficiaire qui ne demande rien du genre, mais qui n’a peut-être pas envie de se retrouver au tribunal pour une sordide affaire de sexe, aggravée d’accusation de viol est Ousmane Sonko. Si le leader de Pastef/Les Patriotes est déterminé à laver son honneur, à démonter les terribles accusations de viol contre lui sur la masseuse Adji Sarr, l’est-il pour autant pour affronter les questions des avocats de l’accusation sur le contenu et les formes de leurs supposées relations sexuelles ? L’effacement de tout ce qui procède par amnistie d’une année a 2021 aurait bien entendu des conséquences sur toutes ces affaires judiciaires, la carrière politique et les ambitions des concernés et ceux que l’on retrouve aussi dans le camp majoritaire, notamment ceux-là qui doivent se retrouver devant les tribunaux pour répondre de corruption, de faux passeports diplomatiques, faux billets de banques, etc. On peut inscrire dans cette logique d’aministie, les perturbations notées en milieu de semaine lors de convocation de Barthélémy Dias au tribunal pour répondre au procès de son affaire. La détermination affichée le laisse croire, ce d’autant que rien ne nous dit que ses avocats n’étaient pas déjà au courant du renvoi de son procès au 1er décembre prochain et que tout ce qui en est suivi relève d’une démarche test et d’une démonstration de force pour, d’une part, apprécier la stratégie, et d’autre part, accentuer la pression sur l’Exécutif. On en saura certainement plus dans les prochaines semaines. Le troisième mandat, le monstre à abattre Enfin, il y a cette curiosité de troisième mandat sur lequel le Président Macky Sall garde le silence afin de ne pas gêner sa politique, de garder la cohésion de son gouvernement, la discipline de son parti et de ne pas faire imploser sa coalition, si l’on en croit certains de ses proches. Cela dit, il fait tout pour garder le mystère sur cette question qui dérange et que toute démocratie majeure a vite fait de dépasser. De ce point de vue, le Président Sall accuse un retard considérable et laisse croire qu’il n’était pas prêt avant la présidentielle de février 2019 pour affronter la question de sa succession, à moins qu’il n’ait trompé ses compatriotes, en leur glissant une peau de banane dans la révision de la Constitution soumise au référendum du 20 mars 2016. Aurait-il trompé les Sénégalais, d’abord en leur faisant croire qu’il ne souhaitait qu’un mandat de 5 ans en 2012 et non 7 ans, en sachant très bien que le Conseil constitutionnel appelé à la rescousse par ses soins, procèderait par avis et dirait que le peuple n’a aucune légitimité à en décider fut-il par référendum ? Serait-il venu ensuite leur faire accepter un principe du troisième consécutif en leur soumettant un projet l’actant à leur corps et raison défendant ? 2024 n’est pas loin. Par contre, il apparait de plus en plus des hommes frais qu’il semble propulser au-devant de la scène politique, reste à savoir dans quel but. La montée en puissance de l’une des plus grandes satisfactions de son magistère, Amadou Hott, ministre de l’Économie et de la Coopération, postulant à la municipalité de la mairie de Yeumbeul, n’est pas gratuite. Serait-il sur les tablettes de Macky Sall qu’il ne procèderait pas autrement. I l y a aussi l’ancien argentier que les mauvaises langues disent riche comme Crésus, Amadou Ba, dont l’ambition pour Dakar et sûrement la présidence ne sont pas une vue de l’esprit. C’est d’ailleurs pour vaporiser la tension intellectuelle qui gravitait autour de lui qu’il avait mis fin à la fonction de Premier ministre et défenestré plusieurs cadres de son gouvernement deux mois après la présidentielle de 2019. Le retour d’Idrissa Seck dans la majorité et la volonté de maintenir dans l’unité Bennoo Bokk Yakaar, sonnent également comme un consensus fort à consolider pour assurer ses arrières lors de son départ en 2024. Charles FAYE ]]>
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