Homme de conviction, brillant chroniqueur de Maderpost, connu pour son engagement sans parasites, la qualité de ses analyses, la finesse de sa plume, sa loyauté à l’amitié, son sens profond du service, Aly Ba est décédé à l’âge de 58 ans, mardi à Cologne, en Allemagne, des suites d’une maladie déclarée en 2019.
HOMMAGE – A quelque 3 mois de la fin d’année, en septembre, Aly Ba ingénieur et spécialiste en aménagement, alors mis au fait du diagnostic lourd de sens, retourne au pays qui a “forgé l’adulte à la rigueur allemande” pour ne plus jamais revenir sur ses pieds. Malheureusement !
La maladie contre laquelle il “lutte jusqu’au bout”, finit par avoir raison de sa résistance et l’emporte, mardi à 18H00, après qu’il eut bu un dernier verre d’eau pour “étancher une dernière soif”.
“Avocat” autoproclamé de la banlieue, son Pikine, “ville de coeur et fief natal” où il nait le 25 décembre 1961, dont il se réclame et s’énorgueillit jusqu’à sa mort, Almamy comme on l’y appelle affectueusement, marque de son empreinte physique et digitale le département pour lequel il consacre sa vie et son bref mais retentissant engagement politique.
Sans jamais mener une lutte de positionnement personnelle à Pikine ni ailleurs, d’ailleurs, Aly Ba se contente d’être plutôt un cadre qui “apporte son savoir-faire” et porte le “faire savoir” afin que les objectifs de l’engagement politique et les fruits du travail collectif pour le bien des autres “soient positivement ressentis par les militants, par les Sénégalais, au-delà”.
BARC
C’est dans cette vaine, le 18 septembre 2011, alors de retour au Sénégal, suite à l’invite de Youssou Ndour qui lui demande de l’accompagner dans son nouveau combat politique et sa candidature à la présidentielle de 2012, que Aly Ba crée la Banlieue Action Renaissance Citoyenne, BARC.
Pour Aly Ba, “La BARC est une ambition pour la banlieue parce que les meilleurs spécialistes de la banlieue, ce sont les ressortissants de la banlieue eux-mêmes, la BARC est un cadre d’échanges et d’initiatives afin de relever les défis de la rénovation et du développement de la banlieue.”
“L’Objectif est de fédérer les expériences et les multiples projets, de faciliter la coopération et les échanges d’information, afin d’encadrer les mutations en cours au mieux pour les populations”, conceptualise alors Aly Ba.
Il s’agit alors pour lui de “réunir et mettre en contact tous les acteurs concernés et impliqués dans le devenir de cette localité, en vue de capitaliser les avoirs, les compétences et les expériences en prise directe avec les nouveaux savoirs et les idées innovantes”, de “comprendre les mutations urbaines et les phénomènes en émergence pour rester en phase avec les populations, afin d’innover au plus près de leurs besoins”.
Mais aussi, “D’agir, faire entendre sa voix par prise de position et propositions concrètes à porter au plus haut niveau par le développement des stratégies globales, de renforcement des capacités productives, en prenant en compte les dimensions culturelles, économiques et environnementales”.
C’est à cet effet selon Aly Ba, que “BARC nous permettra de mieux accompagner et de mieux soutenir les porteurs de projet, afin d’améliorer notre cadre de vie et de favoriser notre vivre ensemble”.
Pour Aly Ba, “chaque citoyen de la banlieue a sa place dans BARC”
L’engagement politique
Chez Aly Ba, la notion de service déterminante se décline en “mission concrète”. Rien de plus, rien de moins. Servir est un sacerdoce chez lui. Sa vie durant se résume à cette ligne de conduite qui découle de sa philosophie de vie.
C’est donc pour servir, qu’il quitte l’Allemagne en 2011, pour rejoindre les rangs de Fekkee Ma Ci Boolee (FMCB) en vue de “venir prêter main forte à Youssou Ndour alors candidat à la présidentielle de février 2012”.
La star planétaire, ami de longue date d’Aly Ba, a souvent écouté “l’Allemand” lui vendre l’idée d’un “engagement politique” à travers un concept né d’une “base solide construite brique après brique” qu’il appelle alors Génération You. “Profondément atteint” par la mort de son “frère”, Youssou Ndour en perd la voix. “Aly Ba est mon frère, j’ai perdu mon frère”.
“L’Allemand” quitte le mouvement politique (FMCB) plus tard, sans bruits, pour le Grand Parti de Malick Gackou un ami d’enfance avec qui il partage la banlieue et l’ambition pour Pikine. C’est la dernière formation politique dans laquelle il partage son militantisme politique. Il y a le bref soutien à Pierre Atepa Goudiaby, pour une candidature avortée à la présidentielle de 2019. Avec Atepa, il partage une vision commune des politiques d’aménagement de villes.
Tournant le dos aux formations politiques, il choisit le plus grand des partis, l’espace des réseaux sociaux, particulièrement Facebook dont il fait sa tribune pour “faire face aux politiques professionnels surtout à ceux-là qui font de la politique un gâteau qu’ils se partagent en méga morceaux en mode fast track”.
Ses analyses pointues et ses remarques de qualité font de lui l’un des “amis” les plus suivis sur Facebook. Cela se confirme peu après l’annonce de son décès. Des milliers, dizaines de milliers, voire centaines de milliers d’“amis” présentent “leurs condoléances attristées”. Beaucoup soutiennent “ne jamais avoir échangé avec lui sur Facebook comme ami”. Beaucoup disent ne “l’avoir jamais vu”. Tous soutiennent avoir été “marqués par la convergence des témoignages”.
Membre émérite du cercle restreint des personnes rares, Aly Ba s’est majestueusement donné à la vie, servant a tous, avec égale dignité et bonté, sa générosité et son empathie, jusqu’à son dernier souffle, jusqu’à m’arracher une promesse. “Sert, sert toujours te bul ragal daara”.
A sa famille, sa mère qui l’appelait tous les soirs à 20H00 et à qui il répondait avec tendresse Ly, à Sarata son épouse, ses enfants à Dakar, Paris et en Allemagne, à ses chaleureux et brillants frères les journalistes Barka Ba, Abou Abel Thiam, le professeur à l’UCAD Mamadou Ba, le magistrat Ba, tous les autres frères attristés, à ses soeurs éplorées et inconsolables, à ses alliés, ses proches, ses amis, dans la vie comme sur les réseaux sociaux, à la banlieue, à son fief Pikine où un autre Ba, son père, premier directeur de la première école primaire, décédé quelques mois plus tôt s’est décemment et socialement illustré, Maderpost présente avec peine et douleur ses condoléances les plus attristées.
Maderpost remettra en ligne ses principaux textes.
Maderpost / Charles FAYE
2 commentaires
Aly Bâ aimait les gens, et toujours inspiré par le resoect d’autrui.Rendre hommage à quelqu’un ,fût-il, un proche sans convoquer les événements factuels caractéristiques d’une vie bien remplie, c’est s’inscrire dans une illusion.De ce point de vue, j’ai été le témoin d’une discussion constructive et fécondante avec le célèbre architecte Atepa Goudiaby,aux cours desquelles, il énuméra toutes les facteurs bloquants qui freinent le développement. Celui-ci avait été conquis par cette vision du monde non structurée par la logique populiste qui pollue le démocratique.Aly fut un homme d’une grand générosité d’âme. Sidy Braham Dieng