Le « sulfureux » homme d’affaires et proche collaborateur de l’ancien Président guinéen Alpha Condé, Kabinet Sylla Alias Bill Gates, en détention depuis mi- septembre 2021, pour « détournements de deniers publics et enrichissement illicite » est passé devant la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF) de Conakry. D’un non-lieu d’abord délivré par la juridiction compétente, Kabinet Sylla vit son souffre-douleur, par suite du parquet qui lui a subitement opposé un niet catégorique en le gardant en prison. Dessous de cartes, nous dit Confidentiel Afrique.
GUINEE – Le sulfureux homme d’affaires et proche collaborateur de l’ancien Président guinéen Alpha Condé, Kabinet Sylla Alias Bill Gates, en détention depuis mi- septembre 2021, n’est pas sorti de l’auberge.
Sa fortune estimée à plus de 200 millions d’euros selon des enquêtes financières, à la suite d’acquisitions immobilières et d’opérations de placements bancaires dans des comptes off-shore, Kabinet Sylla Alias Bill Gates était frappé d’un mandat d’interdiction de quitter le territoire guinéen, décision prise par les autorités militaires au pouvoir à Conakry.
Après deux années de détention avec plusieurs dignitaires de l’ex-régime, Bill Gates, l’ex-super intendant du palais Sekoutouréya et proche d’Alpha Condé a été jugé mercredi 16 août 2023.
Au terme d’une plaidoirie bien menée par ses avocats, la juridiction lui a accordé un non-lieu. Puis, subitement, coup de théâtre ! Le parquet a fait appel à cette décision avec effet de le garder encore en prison. Alors que le Président de cette Cour s’est déclaré incompétent dans cette procédure et annule ainsi toutes les charges qui pesaient contre l’accusé.
Rebelote. Entrepreneur le plus fortuné de l’ancien régime d’Alpha Condé, Kabinet Sylla connu sous le sobriquet de Bill Gates, son emprisonnement faisait suite à une forte demande sociale qui exigeait une reddition des comptes des anciens dignitaires déchus.
Son dossier avait été déposé à la CRIEF en 2021. La chambre d’instruction de la CRIEF a émis quatre ordonnances. Il s’agit d’une ordonnance de non-lieu, confirmant l’abandon de toutes les accusations portées à son encontre et devant entraîner sa mise en liberté. De plus, une ordonnance de main levée sur ses comptes privés ainsi que sur les comptes de son entreprise. Une ordonnance de restitution de ses biens y compris les immeubles et les véhicules saisis et la levée de l’interdiction de sortie du territoire guinéen.
Deal souterrain avec des proches de Mamadi Doumbouya
Que s’est-il passé ? Pourquoi donc ce revirement au premier degré, après tout ce long feuilleton judiciaire qui tenait en haleine le pays ?
Selon des informations exclusives de Confidentiel Afrique, malgré son emprisonnement qui remonte à septembre 2021, Kabinet Sylla « Bill Gates » a pu établir des connexions à l’intérieur du nouveau système militaire.
Selon des indiscrétions, certains proches collaborateurs du Président, le Colonel Mamadi Doumbouya, ont manœuvré, sans relâche pour le sortir du bourbier judiciaire. Un deal souterrain serait entretenu par un cercle restreint du cabinet présidentiel avec le richissime homme d’affaires guinéen, moyennant en contrepartie de fortes sommes d’argent.
Des sources autorisées confidentielles soufflent à Confidentiel Afrique, que plusieurs entrepreneurs et hommes d’affaires nationaux et étrangers ont fait allégeance à la junte militaire et ont transigé nuitamment.
Sans bruits. Les autorités militaires guinéennes cachent bien ce grand malaise de « corruption à l’amiable » et sont dans une posture de ne point communiquer sur ces « deals souterrains » à coups de centaines de millions d’euros. L’affaire Kabinet Sylla se révèle comme un véritable fiasco de Dame justice.
Un revirement qui ne dit pas son nom, mais laisse apparaître des zones d’ombre dans ce dossier rendu public, il y a quelques années.
Me Almamay Samory Touré, l’avocat de Kabinet Sylla est revenu en détails sur la procédure dans une interview comme pour éclairer la lanterne de l’opinion publique et justifier la démarche adoptée par la justice guinéenne.
En effet, dit-il dans la première phase, le Président de la CRIEF « avait été saisi et s’était initialement déclaré incompétent. Cependant », la chambre d’instruction avait ensuite émis les ordonnances favorables à M. Sylla dans l’après-midi.
L’avocat a exprimé sa satisfaction face à la décision de non-lieu, soulignant que « toutes les charges avaient été abandonnées et que les saisies et les restrictions avaient été levées ». Et, soudain, l’avocat de Bil Gates tombe des nues avec cette décision du parquet de faire appel.
Cette affaire est loin de connaître son épilogue. Un rebondissement vient de chambouler toute la carte. L’homme d’affaire Kabinet Sylla doit encore prendre son mal en patience et refile droit dans sa cellule où il va retrouver d’autres dignitaires de l’ancien régime.
En effet, il n’est pas encore sorti d’affaire. Ainsi, l’homme qui lui empêche de tourner en rond, est bien le procureur spécial Aly Touré, lequel a interjeté appel devant la chambre spéciale de contrôle de l’instruction. Est-il dans les grands secrets du palais ? Qui joue au malin dans l’entourage immédiat du Président Mamadi Doumbouya ?
Une décision qui vient remettre en cause les chances de l’ex-puissant intendant d’Alpha Condé. Pour rappel, Kabinet Sylla est poursuivi pour des faits de présumés détournements de deniers publics juste après le coup d’état militaire du 05 septembre 2021, qui a permis l’arrivée au pouvoir en Guinée du Général Mamadi Doumbouya.
La junte militaire avait engagé la traque des biens mal acquis pour les plus fortunés et proches d’Alpha Condé, dont entre autres, Komelan, neveu d’Alpha Condé, Sinkou Kaba, l’ex- directeur du protocole d’État, Mohamed Diané, ministre de la Défense, Kridi Bangoura, le franco-tchadien Dénis Adoum, qui gérait les tables d’écoutes du palais présidentiel, Aminata Sylla DG LONAGUI.
La tournure judiciaire des événements avec l’affaire Bill Gates agace et intrigue le landerneau socio-politique du pays.
Maderpost / Confidentiel Afrique / Hippolyte Gourmantier / Safiatou Coly