Au-delà de Farba Ngom, chercherait-on à faire tomber dans cette affaire supposée de blanchiments de capitaux portant sur un montant provisoire de 125 milliards FCFA l’homme d’affaires Tahirou Sarr dont le nom revient dans une vieille affaire de 94 milliards FCFA que l’actuel Premier ministre Ousmane Sonko avait dénoncée en tant que député de l’opposition non sans avoir été conseiller et des dénonciateurs selon une tribune publiée par Dakaractu le 9 octobre 2019 ?
DOSSIER JUDICIAIRE – Le député Mouhamadou Ngom dit Farba fera face, mardi 21 janvier 2025, à la commission ad hoc dont les 11 membres ont été installés vendredi dernier, à l’unanimité et sans débat, dans le cadre de la procédure enclenchée sur demande du ministre de la Justice, Ousmane Diagne, pour la levée de son immunité parlementaire à la suite de la demande du parquet financier issue d’un rapport de la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) l’incriminant dans une affaire de blanchiment de capitaux d’un montant provisoire de 125 milliards FCFA.
Farba Ngom aura la possibilité de répondre à la convocation pour se défendre ou désigner un de ses collègues pour le représenter face à la commission ad hoc qui produira dans la foulée un rapport qui sera examiné lors de la prochaine plénière.
L’affaire supposée de blanchiment de capitaux, commence avec la publication d’un communiqué du parquet financier, rendu public dimanche dernier, dans lequel il soutient : « Ainsi, l’analyse d’un des rapports a fait ressortir des faits impliquant plusieurs personnes. Les investigations révèlent des mécanismes sophistiqués de blanchiment de capitaux, par le truchement de sociétés écrans qui auraient été utilisés pour des transactions suspectes d’une valeur estimée provisoirement à plus de 125 milliards FCFA ».
En application de l’article 66 de la loi n* 2024-08 sur le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive, le parquet financier « envisage l’ouverture d’une information judiciaire sous les chefs d’inculpation d’association de malfaiteurs, blanchiment de capitaux, escroquerie portant sur les denier publics, corruption, trafic d’influence, abus de biens sociaux », poursuit le communiqué.
La connaissance et analyse du chapelet des inculpations qui brassent large pour ne pas dire ratissent large, bouclent la boucle, donnant une idée de l’étroitesse de marges de la partie défenderesse pointée du doigt par le rapport de la Cellule nationale de traitement des informations judiciaires (CENTIF).
Les autorités ont-elles saisi la CENTIF ?
Concernant l’organe de traitement des informations financières, il a pour mission de « recevoir, d’analyser et de traiter les renseignements propres à établir l’origine des transactions ou la nature des opérations faisant l’objet de déclarations de soupçon auxquelles sont astreintes les personnes physiques et morales assujetties ».
Pour rappel, la CENTIF a été créée par la loi uniforme n* 2004-09 du 6 février 2004 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux. Une réponse du Sénégal à la mobilisation internationale réaffirmée par la volonté clairement traduite au plan sous régional (UEMOA, CEDEAO) par le GIABA, de lutter contre la criminalité financière. La loi portant création de la CENTIF a trois objectifs : 1 – Prévenir le blanchiment de capitaux ; 2 – Détecter en vue de sa répression le blanchiment de capitaux ; 3 – Permettre la coopération internationale autour de la lutte contre le blanchiment de capitaux.
C’est dire la place qu’occupe la CENTIF dans le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT).
Ses missions étant à la fois opérationnelles et stratégiques, on comprend que sur le plan opérationnel, la Cellule exerce, entre autres, ses missions à travers les principales fonctions suivantes : la réception des déclarations de soupçon, des demandes d’informations émises par les cellules de renseignement financier (CRF) étrangères, des demandes d’informations transmises par des autorités nationales agissant dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
Sur le plan stratégique, la CENTIF participe à l’élaboration des politiques et stratégies nationales de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, réalisant ou faisant réaliser au besoin des études sur des tendances observées en matière de blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme ou d’activités délictueuses connexes.
Mais revenons au plan opérationnel, particulièrement dans la partie où « des demandes d’informations » sont « transmises par des autorités nationales agissant dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ».
Y a-t-il eu de la part des autorités nationales des demandes globales et/ou spécifiques ? A l’encontre de qui ? Ces questions sont légitimes, ce d’autant que la résurgence, ces dernières semaines, de l’affaire des 94 milliards FCFA sur un litige foncier lié au Titre foncier 1451/R mêlant héritage, accusation de spoliation et implication politiques, refait surface avant la saisine du parquet financier sur l’affaire des 125 milliards incriminant la SIFCO, une société de Tahirou Sarr que l’on retrouve dans le précédent dossier dans lequel il s’est retrouvé face à l’actuel Premier ministre, alors inspecteur des impôts et des domaines.
Le retour de l’affaire des 94 milliards CFA du TF 1451/R
Concernant ce dossier relatif à un terrain d’une superficie de 258 hectares situé dans la zone de Rufisque évalué à 94 milliards de francs CFA, le parquet financier a saisi la Division des investigations criminelles (DIC) .
Le 15 octobre dernier, soit sept mois après que le tribunal de grande instance hors classe de Dakar a ordonné la radiation de la pré-notation sur ledit titre foncier, les avocats des héritiers de Ousmane Mbengue ont saisi le parquet financier d’une plainte. Leur requête s’appuyant sur un rapport de l’OFNAC indiquant, selon les plaignants, « que d’importantes sommes ont été encaissées – dans le cadre de cette affaire – par des structures ou personnes tierces à leur insu et avec la complicité de hauts fonctionnaires de l’Etat du Sénégal ».
Au départ, il s’agissait d’un contentieux opposant les héritiers de Ousmane Mbengue à Djily Mbaye, richissime marabout et homme d’affaires décédé en 1991. Le dossier a pris une tournure politique lorsque Ousmane Sonko, alors député de l’opposition, s’en était mêlé, dénonçant la spoliation d’une famille démunie (les Mbengue) avec la complicités de hauts fonctionnaires, notamment Tahibou Ndiaye et Mamour Diallo, respectivement anciens directeurs du Cadastre et des Domaines, tous deux mis en cause dans cette affaire.
Ladite affaire des 94 milliards FCFA avait tenu en haleine le monde politico-judiciaire après qu’Ousmane Sonko la remit sur la table le mardi 16 octobre 2018, défrayant ensuite en 2019 la chronique quand on apprit que les héritiers de feu Djily Mbaye s’étaient rapprochés d’ATLAS, une société de l’ancien inspecteur des Impôts et domaines Ousmane Sonko, lui demandant de diligenter le dossier.
Une tribune signée Abdoulaye Ba Nguer publiée le 9 octobre 2019 par nos confrères de Dakaractu indiquait que l’affaire juteuse de la créance sur le TF 1451/R n’avait pas su attirer que la SOFICO et CFU, – deux Sociétés de Seydou Sarr dit Tahirou Sarr – mais aussi vu l’intervention d’autres structures telles que des cabinets opérant dans le domaine fiscal et foncier, notamment ATLAS, MERCALEX et AB PARTNERS.
Début 2018, au moment où toutes les procédures avaient été bouclées, Yéri Diakhaté et Djibril Dial, deux frères non héritiers des dames Fatoumata Ndoye et Oumy Ndoye, avaient pris contact avec Ousmane Sonko, président du parti PASTEF et député à l’Assemblée nationale, pour contester la cession de la créance sur le dit TF à SOFICO car ils estimaient que le montant de 2,5 milliards FCFA déjà reçu par les cédants n’étaient pas assez consistant, renseigne la tribune.
Voilà comment nait par ce canal « l’affaire du présumé détournement de derniers publics d’un montant de 94 milliards FCFA », écrivait M. Nguer, revenant du reste sur les actes et faits prouvés suivants :
- « Le 10 avril 2018, Monsieur Ousmane Sonko adresse un courrier au Procureur de la République par le biais de son parti PASTEF eut égard à la forme administrative utilisée. Bien que reçu le vendredi 04 Mai 2018 par le bureau courrier du procureur, cette dite lettre fait mention en son objet « Plainte pour détournement présumé de derniers publics » et spécifie un montant de 94.783.159.000 FCFA (44.833.159.000 FCFA + 49.950.000.000 FCFA) qui serait spolié des caisses du trésor public.
Le mardi 08 Mai 2018, le même courrier est adressé au Vérificateur Général de l’Inspection Général d’Etat (IGE) avec comme objet cette fois-ci : « Lettre de dénonciation ».
2- Le lundi 06 Août 2018, Le Cabinet ATLAS, en présence de ses deux associés statutaires (Ousmane Sonko et Ismaila Ba), signe un protocole d’accord avec les héritiers du TF 1451/R. À préciser que Ce cabinet ATLAS est société enregistrée sous le RC SNDKR2017B27246 et créée le vendredi 03 novembre 2017 au rang des minutes du notaire Maître Mahmoudou Aly Touré avec 55 % des parts à M. Ousmane Sonko (via AFEX, un cabinet dont il associé unique) et 45 % à M. Ismaila Ba (gérant statutaire).
À souligner que les personnes mandataires qui ont signé ce dit protocole ATLAS sont pratiquement les mêmes que celles qui avaient signé l’acte de cession des droits et créance au profit de SOFICO et encaissé les paiements y afférents deux ans au paravent.
Dans ce protocole ATLAS, il est mentionné, en son article 03 intitulé « honoraires », ce qui suit : « Les héritiers s’engagent à rémunérer le cabinet ATLAS sur la base des sommes ou valeurs recouvrées sur le titre foncier 1451/R.
Cette rémunération est déterminée par une quote-part de 12 % hors taxe retenue à la source des sommes ou valeurs recouvrées directement ou indirectement par le cabinet ATLAS ».
« En faisant le rapport avec les sommes à recouvrir, on obtient précisément un honoraire d’environ 11.373.979.080 FCFA (94.783.159.000 *12% = ?). Ici, On peut tout de même, très clairement, constater une violation manifeste de l’article 30 de la loi n° 76-67 du 02 juillet 1976 en ce sens que ATLAS ne se pose pas en qualité de cessionnaire des droits et créances sur le TF 1451/R face aux héritiers comme le permet la loi mais plutôt en tant qu’intermédiaire pour un recouvrement de la créance moyennant rémunération. », lit-on sur l’article signé Abdoulaye Ba Nguer, « citoyen sénégalais, auditeur et contrôleur de gestion », publié le 9 octobre 2019 par Dakaractu.
Le 10 juin 2016, la société SOFICO ( Société Financière d’Intermédiaire et de Commerce), entreprise spécialisée dans l’achat et la vente de créances au Sénégal et dans la sous-région ouest africaine, consentit, moyennant un paiement de 2,5 milliards FCFA, un acte de cession dans lequel les héritiers, Ndiaga Ndoye et Consorts, cèdent l’ensemble de leurs droits, actions et créances portant sur le titre foncier 1451/R à la société requérante.
Dans le même sillage, La SOFICO a versé 300 millions de FCFA à Me Massata Mbaye qui a posé tous les actes de la procédure au nom des héritiers et 30 millions de FCFA au courtier. Cette vente des droits et créance sur le TF 1451 par les héritiers à SOFICO a été déposée au rang des minutes de l’office notarial de Maître Ndeye Lika Ba et enregistrée au bureau de recouvrement du centre des grandes entreprises de la Direction Générale des Impôts et Domaines le 02 novembre 2016 sous le bordereau numéro 466.
Ce qui constitue un acte sous seing privé authentique entre les deux parties concernées que sont SOFICO et les Héritiers du TF 1451/R.
« À souligner que le défaut d’homologation par le juge ne peut fondamentalement faire obstacle à cet acte purement privé dans la mesure où ce dit acte de cession ne fait pas entorse à l’article 30 de la loi 76-61 interdisant tout intermédiaire dans un dossier d’expropriation pour cause d’utilité publique. Il suffit juste de faire une lecture adéquate et complète de l’arrêt du 11 janvier 2018 de la cour d’appel dans sa chambre civil 2 suite à la demande de SOFICO.
Il convient aussi de souligner que chacun des mandataires des héritiers a signé l’acte de cession de droits et créances sur le TF 1451/R devant notaire et reçu les paiements dus en contrepartie d’une décharge personnelle dûment signée et dont nous détenons les copies.»
« Etant entendu que le cessionnaire est devenu créancier de plein droit sur le TF 1451/R aux lieu et place du cédant (Cf. articles 241 et 242 du COCC), la SOFICO a introduit pour son compte et pour celui de sa structure dénommée CFU SARL (Conciliation Financière de l’UEMOA) des demandes d’indemnisation sur les deux parties du dit TF en conformité aux décrets d’expropriation précités.
« À ce jour du Mercredi 09 Octobre 2019, aucun paiement n’a été effectué sur l’acte d’acquiescement de SOFICO (1.211.707 m2). Les paiements effectués d’un montant de 3.045.875.000 FCFA concernent l’acte d’acquiescement de CFU SARL sur la partie qui fut mutée au nom de l’Etat (1.350.000 m2) et non encore indemnisée.
En rapport avec la déontologie et les principes de notre profession, après plusieurs enquêtes de procédures et sous l’unique regard de la loi et des dispositions réglementaires, la bonne foi sur les actes de gestion posés dans cette affaire d’indemnisation suite à cette dite expropriation pour cause d’utilité publique ayant mené à cette créance de 94,783 milliards FCFA ne permet pas de souligner une quelconque irrégularité, à notre avis.
Tout de même, on peut bien affirmer que ce fut un business très juteux pour SOFICO (CFU inclue) mais un business tout à fait légal du point de vue de la loi.
Il faut aussi admettre que tout acte sous seing privé établi peut faire l’objet d’un recours en annulation devant les tribunaux par l’une des parties concernées (ici SOFICO et les Héritiers du TF 1451/R). Ce qui est différent de l’homologation qui ne peut faire obstacle à l’exécution d’un accord légal entre deux parties consentantes. »
Le meme Abdoulaye Ba Nguer faisait savoir que le « lien sur le communiqué du cabinet Ab Partners du 3/12/2018 me paraît être supprimé depuis 48H. Tout de même, les captures d’écran sont bien disponibles en archives à toute fin utile. Mes Respects. »
Maderpost / Charles Faye