La Covid-19 n’est pas la première pandémie que connaît l’humanité. C’est pourtant la seule maladie moderne qui a poussé les gouvernements du monde entier à confiner leur population. Mortalité, mode de transmission, capacité à muter…, qu’est-ce qui fait que ce virus est particulièrement redoutable ? CORONAVIRUS – Plus d’un an après l’émergence du SARS-CoV-2 en Chine, nous en sommes toujours réduits à confiner la population et le virus a déjà causé la mort de 2,2 millions de personnes. Si nous n’arrivons pas à nous en débarrasser, c’est parce que le SARS-CoV-2 combine une série de caractéristiques le rendant incontrôlable et particulièrement dangereux. Des super-propagateurs difficiles à détecter
Le R0, qui reflète le nombre moyen de personnes infectées par un porteur du virus, ne reflète en rien la réalité de la transmission. Car 70 % des malades ne transmettent le virus à aucune autre personne, et 10 % à 20 % des malades contribuent à 80 % des contaminations.
Le coronavirus se propage donc essentiellement via des « clusters », de façon soudaine et imprévisible.
En théorie, il suffirait donc de détecter ces superpropagateurs pour éviter d’imposer un confinement à tout le monde.
Sauf que les scientifiques ne disposent d’aucun indice pour les trouver. « Un individu peut brusquement devenir très infectieux pendant un jour ou deux, car le virus est souvent présent de façon intermittente dans les voies respiratoires pendant de nombreuses semaines », témoigne Joshua Schiffer dans une étude parue sur le site MedRxiv.
Ceci explique aussi pourquoi la prévention par les cas contacts est largement inefficace, puisque 70 % des gens ne contaminent personne.
Un virus qui se balade dans l’air
Les virus d’Ebola ou du Sida se transmettent par des sécrétions ou rapports sexuels, ce qui est bien plus facile à prévenir qu’une transmission par voie respiratoire tel que le SARS-CoV-2. Ce dernier est même pire que la grippe, qui se transmet via des gouttelettes contaminées. « Une personne infectée au SARS-CoV-2 va exposer davantage de personnes à une contamination qu’avec la grippe, probablement en raison de l’aérosolisation du virus », explique Joshua Schiffer.
« Les gouttelettes de moins de cinq microns peuvent rester en suspension dans l’air pendant de nombreuses minutes, voire pendant des heures », atteste Byron Erath, professeur en mécanique des fluides à l’université Clarkson. Non seulement ces minuscules particules perdurent plus longtemps, mais elles pénètrent aussi plus profondément et plus efficacement dans les poumons, ce qui augmente le risque d’infection. Selon une étude du MIT, parler pendant une heure dans une pièce relâche 460 fois la charge virale nécessaire à une transmission. De plus, même les masques chirurgicaux ne bloquent pas les particules de moins de trois microns. Des mutations qui favorisent la propagationCes dernières semaines, on a vu différents variants apparaître, qui accélèrent la dynamique de l’épidémie et remettent en cause l’efficacité des vaccins. Si tous les virus mutent fréquemment, le SARS-CoV-2 serait particulièrement exposé à ces mutations aléatoires.
Selon une étude de l’Institut Weizmann en Israël, le virus est capable d’augmenter par plus de 600 son affinité avec les récepteurs ACE-2, qui permettent au virus d’adhérer et de pénétrer dans la cellule.
Autrement dit, des variants possédant une telle mutation seraient 600 fois plus infectieux ! Par comparaison, chez les variants anglais et sud-africain, qui nous inquiètent déjà beaucoup, l’adhérence n’est augmentée que de quatre et douze fois.
Pire, les mesures de prévention ont parfois pour effet pervers de favoriser la diffusion des nouveaux variants.
« Le port d’un masque insuffisamment filtrant peut diminuer la densité des virus exhalés sous une valeur ne permettant plus l’infection par des virus standards, mais encore suffisante pour des variants plus contagieux. Ces derniers seront alors progressivement enrichis parmi les virus circulants », illustre le virologue Jean-Michel Claverie dans Les Échos. C’est aussi le cas de la vaccination : « Les virus standards étant freinés, cela ouvre un “coupe-file” aux variants de plus grande affinité pour le récepteur ACE-2 ».
Un taux de létalité… trop faible
Il existe des maladies bien plus graves que la Covid-19, comme Ebola où le virus tue jusqu’à 90 % des personnes infectées. De même, le taux de létalité du SRAS de 2003 a été estimé à 43 % chez les plus de 60 ans et 13 % chez les moins de 60 ans, contre 0,23 % à 1,15 % pour la Covid-19.
Du coup, il est beaucoup plus facile de détecter les porteurs de virus. « Le SRAS de 2003 n’était contagieux qu’après l’apparition des symptômes, ce qui laissait le temps d’isoler les patients avant qu’ils n’en contaminent d’autres. Et ils étaient d’autant plus repérables qu’ils faisaient toujours des formes graves », explique dans Libération l’épidémiologiste Arnaud Fontanet, de l’Institut Pasteur.
Avec la Covid, 59 % des infections proviennent de personnes asymptomatiques, soit en période d’incubation, soit des patients qui ne développent jamais de symptômes. « La létalité d’un virus ne donne pas vraiment d’indication sur sa dangerosité, confirme l’épidémiologiste Pascal Crépey. Avec une progression plus souterraine et plus silencieuse que le SRAS, la Covid-19 a fini par toucher beaucoup plus de monde et donc provoquer beaucoup plus de victimes. »À l’inverse, d’autres maladies hautement transmissibles comme le rhume ou la grippe ont des taux de létalité très faibles et personne n’a jamais songé à confiner tout le monde pour une grippe même lors des pires saisons épidémiques.
Des symptômes extrêmement variés
Si les symptômes de la grippe sont bien connus (fièvre, frisson, douleurs musculaires, fatigue, maux de tête…), certains symptômes de la Covid-19 laissent les médecins perplexes.
On a ainsi observé chez certains malades des troubles gastriques, des manifestations cutanées, des conjonctivites, une fantosmie (hallucinations olfactives), ou même des gonflements de la langue.
Le virus peut également induire des complications cardiovasculaires et cérébrales. La durée particulièrement longue des symptômes chez certains patients fait également partie des caractéristiques qui rendent cette maladie atypique.
Selon une étude publiée dans la revue Annals of internal medicine, plus de 30 % des malades de la Covid-19 auraient des symptômes persistants au moins six semaines après l’infection.
Impossible également de prédire quels malades sont les plus susceptibles de développer une forme sévère (8 à 15 % des cas). L’âge, le sexe, l’obésité et le diabète sont certes des facteurs de risque avérés, mais certains patients subissent une aggravation soudaine et inexplicable. Dans ce contexte, difficile de définir des priorités en matière de vaccination et de prévention.
Maderpost / Futura]]>