La région Grand Est compte à elle seule un cinquième des cas de Covid-19 en France, parmi lesquels 60% dans le Haut-Rhin. Deux urgentistes de ce département ont témoigné auprès du Point de la situation dans leur service et ont tenu à avertir leurs confrères de la gravité de la maladie.
CORONAVIRUS – Dans le Haut-Rhin, l’épidémie de Covid-19 a quelques jours d’avance par rapport aux autres départements. Les services d’urgence affirment déjà être dépassés et manque cruellement de moyens face à la multiplication exponentielle du nombre de cas.
Deux médecins urgentistes, à Mulhouse et Colmar, ont livré leurs témoignages au magazine Le Point et tirent un bilan très alarmiste.
“La situation est totalement sous-estimée”, a affirmé celui qui est en poste à Mulhouse. Il fait déjà état d’un manque de lits dans son établissement, alors que le pic de l’épidémie n’est pas encore en vue. “Les lits de réanimation sont saturés et il est impossible de trouver des respirateurs pour ouvrir de nouveaux postes de réanimation”, a-t-il déploré.
“La mortalité dans les secteurs de gériatrie est majeure”, s’est-il inquiété, indiquant qu’un collège de spécialistes s’est réuni samedi pour décider des prochains critères d’admission à la réanimation, en particulier selon l’âge.
Alors que le nombre de patients augmente, le personnel soignant se réduit, certains ayant été déclarés positifs au virus. Le médecin a souligné l’importance de “se préparer rapidement pour anticiper les problèmes liés à cette crise sanitaire sans précédent”.
“Nos décisions sont obsolètes dans les 12 heures qui suivent”
Son collègue à Colmar se montre encore plus pessimiste. Lui aussi a évoqué un manque de lits, le personnel de plus en plus touché par le Covid-19. “Nous sommes dépassés par les événements. […] Toutes les décisions et aménagements pris sont obsolètes dans les 12 heures qui suivent, et pourtant, nous étions très prévoyants”, a-t-il affirmé au Point.
L’urgentiste explique qu’il s’est basé sur les mesures prises à Mulhouse, où l’épidémie s’est propagée deux à trois jours plus tôt. Malgré cela, 25 à 30 lits manquent en permanence, et les conditions des urgences empirent.
“Les urgences ont l’habitude de travailler dans ces conditions dégradées, mais, là, nous sommes dans le dégradé du dégradé du dégradé, et nous attendons encore une dégradation croissante, voire exponentielle pour les 15 jours à venir”, a-t-il confié.
Anticiper la propagation de l’épidémie
Là aussi, le médecin s’attend à devoir prendre des décisions très difficile dans les jours à venir: “Nous sommes au bout d’un système, il va falloir faire des choix sur nos critères d’admission, non seulement en réanimation, mais tout simplement dans une structure hospitalière”.
Il invite enfin ses collègues des autres départements, où le Covid-19 ne s’est pas encore autant propagé, à anticiper le plus possible l’avancée de la pandémie. “Préparez-vous, ainsi que vos personnels, à cette vague majeure. Il y avait un avant Covid-19, il y aura un après Covid-19 avec de très lourdes cicatrices”, a-t-il conclu.
Selon Santé Publique France, dimanche soir, le bilan s’élevait à 5.423 cas confirmés et 127 morts, soit 900 cas et 36 décès supplémentaires en 24 heures.
C’est la plus forte augmentation quotidienne jamais enregistrée dans le pays.
Maderpost / Sputnik