PAIX – Le prolongement de l’accalmie notée en Casamance présage d’une paix définitive. Mais, dans les faits, des accalmies aussi longues ont été notées dans la région sans jamais déboucher sur un règlement définitif d’une longue crise qui a fait beaucoup de victimes et causé des dégâts collatéraux énormes. A chaque fois, le processus de paix est remis en cause par des évènements inattendus.
Au moment ou Dakar, Diamniadio plus précisément accueille le forum international sur la paix et la sécurité, le site seneplus revient sur le le prolongement de l’accalmie notée en Casamance qui présage d’une paix définitive mais qui dans les faits, ne sont que des accalmies aussi longues dans la région sans jamais déboucher sur un règlement définitif de ce conflit
Des moments d’accalmie, le conflit casamançais en a connu beaucoup. Mais jamais ils n’ont duré aussi longtemps que l’accalmie notée dans la crise opposant l’Etat du Sénégal au Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC). En dépit de quelques braquages isolés, parfois même meurtriers comme l’attaque de Boffa-Bayotes survenue le samedi 6 janvier 2018 et qui a fait 13 morts, le processus de paix est toujours de rigueur en Casamance. L’espoir d’une paix définitive gagne de plus en plus les populations qui saluent, à sa juste valeur, l’accalmie qui règne dans la région depuis bien avant même l’avènement du président Macky Sall au pouvoir.
Durant ces sept dernières années, militaires de l’armée sénégalaise et éléments du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance ne se sont pas affrontés dans le cadre du conflit casamançais.
Pourtant, des périodes similaires ont déjà été vécues en Casamance, même si elles ne sont pas aussi longues. En mars 1991, une trêve a été observée à l’issue des pourparlers de Toubacouta, suivis des accords de Bissau le 31 mai 1991 et le retrait de l’armée de certaines de ses positions dans la zone. Cette accalmie a d’ailleurs été consolidée par le premier appel à la paix émis à l’époque par Sidy Badji, le fondateur de la branche armée ‘’Atika’’ du MFDC, le 30 septembre 1992.
Cet appel faisait suite à la première marche pour la paix de la jeunesse de Ziguinchor suivie, quelques jours plus tard, du retour, à Ziguinchor, de l’abbé Augustin Diamacoune Senghor, après un séjour dans le maquis. Il s’y ajoute le témoignage de Jacques Charpy en 1993 qui avait contribué à refroidir les ardeurs des deux camps qui avaient convenu de fumer le calumet de la paix. Hélas, la violence va reprendre, avec notamment les disparitions de 4 touristes français en avril 1995.
Un net regain de tension rythmé aussi par la disparition du sous-préfet de Sindian en avril de la même année avec son escorte, la tragédie de Babonda en juillet 1995 (23 militaires tués) et celle de Mandina Mancagne en août 1997 (25 militaires tués) qui ont ravivé les hostilités.
A partir de 1999, l’on va assister à une autre embellie. Deux événements majeurs vont marquer cette époque. Le 22 janvier 1999, pour la première fois depuis le début de la crise, le président Abdou Diouf rencontre le leader charismatique du MFDC, abbé Diamacoune Senghor, à la gouvernance de Ziguinchor, en présence de l’ambassadeur de France d’alors, André Lewin. En juin 1999, le MFDC tient à Banjul (Gambie) des assises inter-MFDC pour ‘’laver le linge sale en famille’’ et resserrer ses rangs dans la perspective de négociations pour une paix définitive. Le 26 décembre 1999, le MFDC se retrouve à nouveau en Gambie pour arrondir, définitivement, les angles en vue de faire face au gouvernement du Sénégal.
Malheureusement, le processus de règlement définitif du conflit amorcé par l’ancien régime est stoppé net avec l’élection de Me Abdoulaye Wade à la présidence de la République. Wade décide de tourner la page de Banjul et engage la solution à lui.
Le 24 mars 2001, le MFDC et le gouvernement se retrouvent à l’évêché de Ziguinchor. Cependant, l’accord de principe le plus retentissant entre le gouvernement et le MFDC, mais qui, en définitive, se révéla plus tard comme une grosse farce, sera signé le 30 décembre 2004 suivi de l’accord de ‘’Foundiougne 1’’ en 2005.
Les préalables du MFCD…
Après ‘’Foundiougne 1’’, tout semblait bloqué jusqu’au 10 mars 2010, lorsque, contre toute attente, César Atoute Badiate, le chef d’état-major du Front Sud, déclara : ‘’Nous voulons des négociations maintenant.’’ Cet appel à la paix définitive trouve aussitôt écho favorable auprès des autorités sénégalaises.
Le Premier ministre d’alors, Souleymane Ndéné Ndiaye, abonde dans le même sens, mais précise : ‘’On est prêt à négocier en terre sénégalaise avec le MFDC, à Oussouye, à Ziguinchor ou à Foundiougne. La Casamance fait partie du Sénégal. Les négociations vont se tenir au Sénégal.’’ Mais cette condition posée par l’Etat du Sénégal de tenir les pourparlers en terre sénégalaise provoque des grincements de dents au sein du maquis où des voix discordantes vont se faire entendre pour poser des préalables, parmi lesquelles : le retrait de l’armée sénégalaise le long de la frontière avec la Guinée-Bissau et l’organisation d’assises inter-MFDC pour désigner les membres de leur délégation. Autre condition : que les négociations se tiennent dans un pays neutre. Tout comme Salif Sadio, Mamadou Nkrumah Sané va poser comme exigences la levée de son mandat d’arrêt ainsi que la remise de ses documents saisis.
Ces préalables semblent ne plus être de mise. Le président Macky Sall, dès son accession à la magistrature suprême, va lever toute équivoque en déclarant être prêt à négocier, même si c’est au Groenland. Au même moment, les différentes factions du MFDC œuvrent depuis lors dans le sens de la tenue d’assises inter-MFDC en vue des pourparlers. Cette dynamique explique l’annulation du mandat d’arrêt contre Salif Sadio et son ‘’engagement à imposer un cessez-le-feu total à ses combattants’’.
Auparavant, il avait affirmé vouloir respecter l’accord signé le 22 février 2014 à Sant’Egidio, relatif aux ‘’mesures de confiance réciproque’’. Un texte qui engage les parties prenantes à cette rencontre à ‘’garder un comportement qui puisse favoriser les négociations pour le retour de la paix en Casamance’’.
En outre, ces mesures prévoient la libre circulation des membres du MFDC, dans le cadre des négociations de paix. C’est également dans cette dynamique de résolution pacifique de la crise en Casamance qu’il faut inscrire la rencontre du 20 juillet 2018 de la diaspora casamançaise à Washington DC.
Une rencontre qui entre en droite ligne de celles tenues à Heidelberg en 2017 (Allemagne) et à Barcelone (2018). Sur le terrain, la société civile sénégalaise, le Groupe de réflexion pour la paix en Casamance (GRPC) et les partenaires travaillent, aussi, dans le sens de la consolidation de cette longue accalmie qui prévaut en Casamance, mais également du renforcement du processus de paix. Toutes choses qui donnent aujourd’hui bon espoir aux populations de la Casamance qui n’en demandent pas moins un retour définitif de la paix, peu importe les stigmates du passé.
Source : Seneplus.com