PRESIDENTIELLE – Un candidat, Karim Wade, empêché de se présenter. Les premiers signes de désunion rendus publics dans la presse. On s’attendait à ce que le lancement de la récolte des parrainages en vue de la présidentielle, le 11 septembre, revête des airs de réunion de crise pour le PDS d’Abdoulaye Wade. Il n’en fut rien. Tout va bien au Parti démocratique sénégalais (PDS, opposition). C’est le message qu’entendaient faire passer, à grand renfort de militants surchauffés et de sourires de circonstance, les maîtres de cérémonie du lancement officiel de la course aux 52 000 signatures nécessaires au candidat du parti pour se présenter à la présidentielle, prévue en février 2019. Il est 18 heures passées, mardi 11 septembre, et sous l’immense banderole de campagne jaune et bleue à l’effigie de Karim Wade et de son père Abdoulaye Wade, des centaines de militants s’agitent, arborant les couleurs du parti ou des t-shirts à l’image de Karim Wade, candidat officiel du parti libéral. Aux slogans de soutien prononcés en wolof répondent les questions de la dizaine de journalistes qui attendent, eux aussi, les cadres du PDS. Quelle est l’atmosphère au sein du parti, au lendemain de la lettre incendiaire adressée par leur secrétaire général et fondateur, Abdoulaye Wade, à Madické Niang, chef de file du groupe parlementaire ? Après des mois d’un discours officiel martelant qu’il n’y aura « pas de plan B », même si la candidature de Karim Wade devait être invalidée, quel écho a provoqué parmi les cadres du parti la perspective, désormais exprimée sur la place publique, de trouver un candidat alternatif à Karim Wade, toujours en exil au Qatar, si les choses tournaient en sa défaveur ? Si le PDS se déchire entre ceux qui souhaiteraient un candidat de secours et les « loyalistes », adeptes du « Karim ou rien », ce sont ces derniers qui, ce soir, ont voix au chapitre. Soutien inébranlable Madické Niang – qui a finalement reçu une lettre d’Abdoulaye Wade mercredi matin l’absolvant pour partie des accusations de la veille – n’était pas présent pour lancer la campagne. « On ne sait pas s’il est à Dakar », balbutie l’un des ténors, interrogé par JA. « Il est le bienvenu s’il souhaite venir », élude un autre. Mais pas un mot pour justifier l’absence de ce taulier du PDS, dont le nom faisait pourtant la Une de la presse locale le matin même. Seules les pancartes des sympathisants du clan Wade font écho à l’actualité du jour, à coups de « Karim notre plan A à Z » ou « Karim est notre seul candidat ». S’ensuivent deux heures de discours énergiques sur les 300 000 parrainages visés, dont le premier a été symboliquement apposé par Abdoulaye Wade, sur la lutte contre « Macky Sall le dictateur » ou sur la « légitimité de Karim ». « Nous réitérons notre adhésion totale, notre soutien et notre loyauté à Karim Meïssa Wade », lance Saliou Dieng, coordonnateur des Mouvements de soutien karimistes. « Notre parti est debout malgré les trahisons, debout dans les combats pour les libertés et la démocratie, debout dans les combats pour le pain et l’eau », renchérit Oumar Sarr, secrétaire général national adjoint du PDS. Une page déjà tournée ? Un message subliminal lancé aux signataires de la lettre qui a rendu public les désaccords internes ? Absolument pas, se défend Oumar Sarr, qui va jusqu’à renvoyer les journalistes à leurs questions : « Y a-t-il vraiment un problème ? Madické Niang a dit que cette lettre ne l’engageait pas », lance-t-il. « Parmi les personnes qui ont signé ce qui semble être un acte de défiance, beaucoup se sont dédits », ajoute encore ce lieutenant fidèle à Abdoulaye Wade. Et peu importe si, officiellement, un seul des signataires s’est publiquement désolidarisé de la missive, le député Mor Kane. Quant à Madické Niang, qui a exprimé les mêmes inquiétudes sur l’éventualité d’une absence de candidat PDS à la présidentielle, « à la fin de sa réponse, il jure fidélité au président Wade, il n’y a donc pas de problème », balaie Oumar Sarr. Autant de réponses – et de silences – qui signifient une chose : au lendemain de la révélation des déchirements internes, la page est déjà tournée et l’éponge passée sur ces responsables du parti qui ont osé aller à contre-courant du discours officiel. Même inébranlable certitude concernant la candidature de Karim Wade, qui se lance dans la campagne alors qu’il n’a pas le droit de se présenter à l’élection, ayant été radié des listes électorales. « Ce n’est pas le sujet ce soir », estime Babacar Gaye, le porte-parole du PDS. TOUJOURS LA MÊME STRATÉGIE, CONTINUER À SE BATTRE Les parrainages : le leitmotiv Les parrainages, voilà l’unique leitmotiv. Même s’il s’agit d’un système « décidé par Macky Sall pour ajuster les candidatures, pour avoir les candidats qu’il aura choisi lui-même », même si le PDS continue de dire qu’il en rejette le principe, on brandit fièrement les formulaires jaune et bleu estampillés « PDS » destinés à recueillir les signatures, que les cadres du parti jettent par brassées aux militants rassemblés. Au pied du siège du PDS, les libéraux répètent leur stratégie comme un mantra : « Toujours la même, continuer à se battre. » Et s’ils disent disposer de recours juridiques à l’international pour faire valoir les droits à concourir de leur poulain, les cadres du PDS refusent d’en dire plus. Reste qu’à cinq mois d’une élection à laquelle Karim Wade n’a pas le droit de se présenter, le lancement en grande pompe de sa campagne garde des airs de vœu pieux. À croire que, jusqu’ici tout va bien… Auteur : Jeune Afrique ]]>
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