Les instructions du Président Bassirou Diomaye Faye au gouvernement de finaliser avant fin mars prochain la nouvelle politique maritime et portuaire du Sénégal sonne, telle la musique, d’une manière agréable à l’oreille des partenaires du Port autonome de Dakar.
PORT – Le port de Dakar et certainement les ports secondaires vont renaître et redonner espoir aux commerçants, BTP, industriels, investisseurs locaux et étrangers qui rêvent de voire le Sénégal devenir un véritable un hub portuaire pour le deepsea (transport en eau profonde) et le shortsea (transport en eau peu profonde et fluvio-maritime) qui fera le grand bonheur des armateurs et du business, le gros qui se chiffre à des milliers de milliards.
C’est en tout cas le parfum que dégage le communiqué du Conseil des ministres de mercredi dernier, dans lequel le Chef de l’Etat demande au Premier ministre Ousmane Sonko et au ministre des Infrastructures maritimes et portuaires « de finaliser, avant fin mars 2025, la nouvelle politique maritime et portuaire du Sénégal, en tenant compte de la vocation maritime de notre pays et des différents projets réceptionnés, en cours ou en perspective ».
On voit effectivement des opérateurs portuaires se frotter les mains, même s’il faut rappeler que le Président Bassirou Diomaye Faye a souligné la « nécessité, en termes de réformes d’actualiser et d’élargir le cadre de gouvernance des ports publics et privés du Sénégal mais également de renforcer l’Agence nationale des Affaires maritimes (ANAM), au regard des enjeux nouveaux liés à la navigation maritime ». Non sans oublier « la modernisation des ports et quais de pêche » « sur l’étendue du territoire national ».
S’y ajoute, « l’urgence de réviser le partenariat entre l’Etat et le Consortium sénégalais d’Activités maritimes (COSAMA), ainsi que la nécessité d’asseoir une souveraineté nationale intégrale sur la gestion et le développement des chantiers navals de Dakar, avec le repositionnement stratégique de la Société des Infrastructures de Réparation navale (SIRN), renforcée par la montée en puissance de la Marine nationale ».
Pour finir, l’invite faite au ministre des Pêches et des Infrastructures maritimes et portuaires à procéder avec le ministre des Finances et du Budget et le ministre de l’Industrie et du Commerce, à l’évaluation et à la réorientation des missions et activités du Conseil sénégalais des Chargeurs (COSEC).
Cette politique portuaire, pour ce qui concerne notre axe, s’invite comme une révolution doucereuse ,pour par exemple le sel de Kaolack concurrencé aujourd’hui par une autre offre ailleurs qui a su apporter des solutions à la logistique laissées en rade par le précédent régime de Macky Sall.
En effet Kaolack qui fournissait les pays de la sous-région, tel le Bénin, la Sierra Leone, la Côte d’Ivoire, voire le Nigeria et le Cameroun par voir maritime a non désormais un concurrent et souffre en plus de la réalisation du pont de Foundiougne.
Certes, le pont facilite l’accessibilité, mais il enlève aussi toute possibilité aux bateaux ayant des tirants d’air de plus de 25 mètres (espace à partir du pont du bateau et du ciel) de naviguer sous l’ouvrage. Il s’y ajoute la question sécuritaire du pont.
Voilà comment le port sec de Kaolack, le premier de l’Afrique de l’Ouest perd sa vocation de distributeur central d’excellence et comment le sel dont la production s’élevait à 300 000 tonnes en 2021 se retrouve en souffrance avec des prix excessifs.
Là où le transport maritime aurait dû charger depuis Kaolack grâce aux barges (du fait du tirant d’eau de 4,8 mètres) et dragage, le sel transporté par des camions se trouve confronté à la logistique et la manutention (chargement et déchargement) et autres frais. Et pourtant, 98 000 tonnes sont exportées. Certes, le sel n’est pas l’or blanc, encore que sa consommation a un spectre bien plus large que la table à manger.
Grâce à la nouvelle politique portuaire, la filière sel va enregistrer un boom considérable, puisque les opérateurs n’auront plus besoin de Dakar pour compléter leur stock. D’une part, cela décongestionnerait Dakar, d’autre part, diminuerait le prix du sel.
Il n’y a pas que le sel, ce d’autant qu’il est un produit pauvre. Le vrai changement se trouve dans la transformation que la nouvelle politique portuaire va opérer au niveau du port de Dakar, avec des déchargements plus rapides – le Sénégal étant encore essentiellement importateurs, plus de 7000 milliards pour 2500 produits importés – qui feront baisser significativement les prix des denrées et autres matériaux de construction.
Il est su de tout le monde que le riz, le fuel, charbon et farine prennent le dessus sur tout les autres et par conséquent les font attendre plus longtemps en rade, vu la capacité de déchargement.
Un opérateur portuaire Jambaar pour ne pas le nommer qui « se bat pour s’installer au mole 4 du port de Dakar » fait savoir qu’il est prêt à développer et à mettre en place une flotte de navires adaptés à l’acheminement des cargaisons entre le port de Dakar et les ports secondaires.
L’objectif étant pour lui de réduire de manière significative le flux des camions dans le port et la ville de Dakar. Ce qui bien entendu améliorerait la mobilité dans la capitale, préservera les routes, réduira la pollution, désenclavera la région naturelle de Casamance, Fatick, Saint-Louis, et pour finir développera l’agriculture et l’industrie dans les régions a forte potentiel productive ou industrielle.
Une telle finalité donne de la suite à la nouvelle politique portuaire dans les ports secondaires (Ziguinchor, Saint-Louis, Ndayane, Kaolack, Bargny) qui enregistreront la réhabilitation des infrastructures, la modernisation des équipements de manutentions et de stockages, le renouvellement des quais conditionné au dragage des fleuves
La véritable révolution qu’apportera cette nouvelle politique portuaire devra être avec les partenaires dans la mise en place, enfin, d’un vrai service fluvio-maritime, avec la création de terminal polyvalent multimodal notamment au môle 4 comme le souhaite Jambaar.
Comme pour corroborer l’ambition du tandem Diomaye/Sonko de faire du Sénégal une plateforme portuaire sans précédent en Afrique, nous apprenons que le port d’Anvers Bruges a invité les autorités portuaires du port autonome de Dakar pour une visite de travail début février.
Visite qui devra donner ses fruits vu le statut du port d’Anvers, 3e mondial dirigé par M. Kristof Waterschoot et les ambitions de son homologue Wally Diouf Bodiang qui entend marquer de son empreinte le port de Dakar et les ports secondaires. Il y a de quoi espérer pour un bol d’air frais sur les quais senegalais.
Maderpost / Charles Faye