Le désengagement des grandes banques françaises, comme Société Générale, BNP Paribas ou Crédit Agricole dessine un nouveau paysage africain en cédant leurs filiales dans des pays comme le Congo, le Sénégal ou la Guinée.
FINANCE – Ce mouvement, amorcé depuis plusieurs années, s’explique par une faible rentabilité de ces opérations combinée à des risques élevés liés aux marchés africains. Société Générale, par exemple, ne génère que 7 % de son produit net bancaire sur le continent, un résultat jugé insuffisant face aux imprévus et défis, tels que le risque d’impayés ou le poids de l’économie informelle.
Les exigences réglementaires européennes, qui imposent des fonds propres élevés pour couvrir les risques, ont accentué le désengagement. S’ajoute à cela une dégradation de l’environnement politique et économique dans certaines régions, notamment au Sahel, et l’absence du « miracle africain » annoncé.
Malgré l’émergence d’une classe moyenne, le marché reste jugé trop étroit par ces banques, qui préfèrent se concentrer sur des régions plus stables, comme l’Europe ou les États-Unis. Ce retrait s’inscrit également dans une stratégie de recentrage sur des clientèles plus sûres et des marchés mieux connus.
Une opportunité pour les banques régionales africaines
Ce retrait ouvre la voie à des acteurs africains dynamiques. Des banques régionales comme Vista Bank ou Coris Bank multiplient les acquisitions de filiales françaises, voyant dans ces rachats une opportunité stratégique.
Vista Bank, sous l’impulsion de Simon Tiemtoré, a déjà étendu son réseau à 14 pays africains et vise 25 d’ici 2026. Ces acteurs locaux misent sur une meilleure connaissance des marchés et une approche plus souple pour capter les PME et PMI, trop souvent négligées par les banques françaises.
Certaines nations africaines cherchent également à tirer profit de ces départs pour renforcer leur souveraineté financière. Le Sénégal, par exemple, s’apprête à acquérir la filiale locale de Société Générale pour 268 millions d’euros.
Cet investissement vise à soutenir les PME locales et les projets de développement public, jusqu’ici sous-financés par les banques étrangères. Ce type de stratégie pourrait transformer le paysage bancaire africain en favorisant un contrôle accru par des acteurs locaux.
Le rôle pionnier des banques marocaines
Inspirées par le Maroc, des banques comme Attijariwafa Bank ont depuis les années 2000 investi en Afrique subsaharienne.
Ce modèle repose sur une approche ciblant la classe moyenne et la banque de détail, secteurs souvent ignorés par les mastodontes occidentaux.
Ces groupes marocains, bien implantés, apparaissent comme des partenaires de choix pour les entreprises françaises encore présentes sur le continent, cherchant à compenser le vide laissé par les banques européennes.
Le retrait des banques françaises marque une étape clé dans la transformation du secteur bancaire africain.
Cette reconfiguration, loin d’être une perte pour le continent, permet l’émergence de géants bancaires africains capables de répondre aux besoins locaux.
Avec l’appui de banques régionales et d’États africains plus impliqués, ce mouvement pourrait à terme renforcer la stabilité et la croissance économique sur le continent.
Pour les banques européennes, ce retrait signe une redéfinition de leur rôle en Afrique et laisse la place à des acteurs locaux mieux adaptés à ses réalités.
Maderpost / Dogfinance